Au Bourg-Pailler, la nuit comme le jour, les portes étaient toujours ouvertes, c’est-à-dire jamais fermées à clé. Qu’avions-nous à voler ? Pas grand-chose certes, mais cette attitude reflétait surtout une façon d’être. Seule la tante Valentine pestait sur ce qu’elle considérait comme du laisser-aller. Je dois dire que tout le monde s’en fichait. S’encombrer de clés, se barricader, n’était pas inscrit dans notre ADN de bons campagnards. J’aime toujours les portes ouvertes où l’on frappe et où l’on répond : entrez ! Quand j’étais mioche, du fait du métier de mon père : entrepreneur de battages et de travaux agricoles la salle commune était très souvent occupée par des clients qui venaient soi-disant régler leur note mais qui très souvent après avoir éclusé quelques verres repartaient comme si de rien n’était. Cette forme de table ouverte, de maison où l’on entre et l’on sort, le ballet matinal des bonnes qui venaient quérir le lait pour leurs patronnes (tous les ragots venaient à mes oreilles), m’ont marqué à jamais. De plus, mon pays étant un pays d’épais bocage où la clôture de fil de fer n’existait pas : le buisson entourait les prés et les champs et il était toujours possible de sauter les échaliers qui étaient comme des fenêtres sur. Vous comprendrez donc plus aisément tout le plaisir que j’ai à accueillir du monde sur cet espace de liberté. Vigneronnes et vignerons vous êtes donc en permanence les bienvenus ici alors, une fois la vendange engrangée – faites de belles photos pendant – en surveillant le vin qui se fait profitez-en pour laisser libre-court à votre plume. Vous êtes les bienvenus. Aujourd’hui c’est Christine et Bernard Isarn qui s’y collent, merci à eux.
Je ne sais par quel bout prendre le sujet. Il y a tellement à dire… On me demande de nous présenter : Christine et Bernard Isarn vignerons indépendants en Languedoc, potiers céramistes pendant des années, 4 enfants...
La tête au ciel, les pieds sur terre, tout sauf des hurluberlus ? Enfin, il me semble.Voilà : j’ai trouvé, des idéalistes. Des qui ont envie de créer leur monde intérieur. Il en reste plus que ce que l’on croit.
Voilà huit ans, alors que nous étions artisans d’Art nous décidons de nous reconvertir dans le vin. Au hasard des chemins de traverse nous achetons un endroit, un lieu. 25 ha de terres, 6 de vignes et un mas typique Languedocien avec l’honnête ambition d’y installer un domaine et d’y faire du vin….. Le lieu est merveilleux, chargé, vues imprenables sur la plaine surplombée d’un volcan, parsemée de sources discrètes. Un terroir, un caractère, un esprit. Nous voilà envoutés… On fonce sans réfléchir. Seulement l’endroit est quasi à l’abandon et il va falloir tout refaire du sol au plancher, des vignes à la cave sans compter qu’en vignes et en vinif nous sommes pour ainsi dire, complètement néophytes. Après tout la vie est faite de transformations, de défis, de folies…
Tout cela rend fier et humble car il y a toujours un Everest à gravir. C’est le sel…
On fait du vin à Cadablès. Quatre cuvées. Un rosé et un blanc élégants, minéraux, sur le fruit. De cinsault et grenache en rose et de terret en blanc. Quant aux rouges, plus sérieux, le « chemin à l’envers « tout en gourmandise, croquant de syrah, grenache et carignan et, un pur terroir concentré de complexité en Carignan identitaire et d’un soupçon de syrah issu du meilleur de Cadablès, le « Champs de pierre ».
Nous accueillons à Cadablès, beaucoup de Parisiens d’ailleurs. Durant la saison, d’avril à décembre dans notre maison de charme conçue pour partager des instants et nous secourir quand la finance corollaire du moral descend en chute libre. L’agriculture est un métier coûteux. On ne va pas ici, rentrer dans les détails. Simplement vous donner envie d’en savoir plus car, au gré du temps nous racontons tout cela sur notre blog ( auquel vous pouvez adhérer ), vous donner envie de nous goûter (c’est l’expression), de nous visiter, de s’intéresser à nous, première génération de vigneron indépendants de Cadablès . Sortez des sentiers battus et venez voir les iconoclastes du Languedoc et prenez avec nous « les chemins à l’envers »
D’ailleurs, et, heureusement, nous ne sommes pas les seuls et les copains sont toujours là quand la bise siffle, quand les hivers se font rigoureux ou les étés arides. Et puis ensemble on est tellement mieux et c’est, au sortir, toujours dans un éclat de rire autour d’une bouteille que nait la profondeur. L’imbécile nous appelle des concurrents. S’il savait, ô combien nous partageons cette foi qui renverse tout sur son passage.
Ici, loin des lumières de la ville la porte ne se referme vraiment jamais. Il y la vie recréé dans ce lieu, les mains dans la matière, en contact du réel. On a l’intelligence au bout des doigts, les mains rugueuses, les tripes ovales et le cœur joyeux.
Tout avance et nous avons musicalisé cet été lors de soirées lumineuses. Une lueur apparaît. Le 2012 arrive ! C’est incroyable toute cette belle énergie, cette vie retrouvé. On fait du vin. On a envie de le hurler, de le danser, de le chanter afin que tous sachez la sueur, la passion, l’abnégation, le plaisir et le bonheur qu’il y a derrière une bouteille de vin. Et puis, merci à Jacques de nous laisser vous l’affirmer…
Allez zou, je vous colle une bise et vous donne notre adresse. On sait jamais ça peut servir…
Christine et Bernard Isarn vigneron indépendant
Domaine de Cadablès 34 320 Gabian
04 67 24 76 07
cadables@free.fr