Je suis un plaisantin que d’aucuns prennent au sérieux. En Post-scriptum de la « lettre » du cousin Gagnon de la Belle Province «Honte à la presse du vin de France » j’avais signalé que « l’entame et la formule de politesse sont pure fiction » ce qui signifiait que je ne faisais que reprendre à ma sauce « espace de liberté » un édito du journaliste québécois. Mais comme on ne prête qu’aux riches j’ai reçu en retour le courrier électronique suivant, très pincé, en forme de droit de réponse que j’accorde volontiers. Dans cette affaire je n’ai fait que mon métier sans introduire un quelconque commentaire sur le fond. « Sans la liberté de blâmer il n’y a pas d’éloge flatteur ». Je ne suis ni journaliste, ni éditorialiste, ni même redresseur de torts, mais tout bêtement un homme qui s’essaie à ouvrir des espaces de liberté. Merci de m’accorder ce crédit minimal y compris à l’APV.
Cher Monsieur
Suite à la publication de la lettre de Marc André Gagnon, sur votre blog, merci de publier la réponse du président de l'APV Michel Bettane.
Cordialement,
Barthélèmy
Réponse à Marc André Gagnon
Dans un récent bloc Jacques Berthomeau reproduit une lettre envoyée par un « cousin du Québec » Marc André Gagnon, qui critique sévèrement le principe et le déroulement de la remise des Prix de la Presse du Vin que l’association que je préside a organisée Lundi 8 février dans le Salon Napoléon du Sénat. Il les juge incompatibles déontologiquement avec les principes du journalisme et jette l’opprobre sur la façon dont ce métier est assuré en France, en procédant à des amalgames avec la promotion des certains « produits culturels » à la radio ou à la télévision. Cette lettre hélas ne prouve qu’une seule chose, bien malvenue chez quelqu’un qui s’intéresse autant au journalisme, à savoir une méconnaissance totale de notre métier, et une déformation aussi totale dans le compte rendu des faits incriminés ! Le journalisme du vin ne peut en effet se diviser en deux branches, l’Information et la « Chronique ». La diversité des média, le grand nombre d’angles sous lesquels le vin, son économie, ses produits, sa place dans notre société et dans notre culture peuvent être abordés, réunit dans une même profession des journalistes généraux, des journalistes spécialisés, des spécialistes de l’investigation, des spécialistes du goût, des rapporteurs de faits, des dégustateurs, des historiens, des philosophes, des scientifiques, agronomes ou œnologues, des médecins, mais aussi des grands amateurs. Tous, à partir du moment où ils occupent un espace de communication sur le sujet (et donc Marc André Gagnon lui-même) peuvent être réunis dans notre association qui regroupe toutes les pratiques que je viens de citer. Certains sont bons, d’autres un peu moins bons, certains ont une large audience, d’autres ont une audience plus limitée mais c’est la même chose dans de nombreux métiers et l’Association fédératrice par son principe n’a pas en tenir compte. Mettre en doute leur indépendance ou leur honnêteté est très facile, tout comme il serait facile de mettre en doute les motivations qui ont poussé Monsieur Gagnon à réagir de la sorte. Une chose en revanche est encore plus facile, celle de montrer que son compte rendu des faits est indigne même d’un journaliste débutant. Les prix que nous avons décernés l’ont été librement, par le libre choix des membres du jury, tous membres de l’Association. Ces prix sont complètement et absolument honorifiques, sans aucune contrepartie douteuse, et n’ont comme seul but que la reconnaissance par les journalistes du vin du talent et du travail de tous ceux qui constituent l’univers du sujet qui les réunit, le Vin. Je ne vois pas en quoi ce type de récompenses serait moins moral que lorsqu’il est délivré par le public et encore moins comment on peut le mettre sur le même plan que celles délivrées par un organisme commercial. Et relayer dans la presse ou dans tout autre média les noms des lauréats ne relève pas de la communication publicitaire ou de la « promotion » mais bien de l’information. En revanche j’accorde volontiers à Monsieur Gagnon que l’exactitude dans la recherche des faits et dans leur mise en forme informative est une qualité essentielle d’un bon journaliste. C’est la raison pour laquelle nous avons délivré un prix Citron à des confrères qui dans un reportage ont hélas fait étalage de leur superficialité dans la connaissance du sujet, de leur manque de rigueur dans la recherche des faits et d’une évidente démagogie dans la manipulation par le montage des interventions de nombreux participants (voir mon éditorial du 09/10/09 sur le blog du site web de l’association : presse-vin.com). Ils ont trahi les fondements moraux de leur profession en confondant, comme le font hélas beaucoup de soi disant journalistes indépendants, le journalisme d’enquête et le journalisme d’opinion. La volonté de « défendre » le public est un aveu naïf de cette confusion : dénoncer est déjà une déformation de l’acte d’informer puisqu’il lui donne une dramatisation théâtrale et simplificatrice, avec à la clé des dommages importants par rapport aux métiers de la viticulture qui sont parfaitement honorables.
Michel Bettane
Président de l’Association de la Presse du Vin (APV)