Petit bouseux de Vendée, avant de monter à Paris, l’asperge était pour moi blanche point c’est tout. Je l’ai déjà écrit « Avec Marcel Proust et Édouard Manet, les asperges blanches sont de bonne compagnie, avec le vin aussi... »link et l’Asparagus n’était qu’un fouillis de branchages vert que la fleuriste de la Mothe-Achard utilisait pour donner de l’ampleur à ses bouquets ; je trouvais ça moche.
Le vert c’était le poireau même si ce cousin éloigné de l’asperge avait le pied blanc et les feuilles d’un vert plus pétant que celui du chou vert. Je dois avouer qu’au cours de mes jeunes années je n’appréciais que du bout des lèvres tout ce qui était vert. J’étais plutôt friand de patates et d’haricots secs que de vert.
Mais les années passant, et avec la Révolution Verte de certains chefs avec au premier chef Alain Passard, les asperges vertes furent au sortir de l’hiver propulsées au rang de stars. Elles sont dans toutes les belles assiettes avec leur goût de sauvageonnes car elles se prêtent mieux à l’invention culinaire.
Un peu d’histoire sur cette fille du bassin méditerranéen, de la « famille des Liliacées comme l'ail, l'oignon, le poireau ...ou la tulipe et le lis, l'asperge est un légume-tige que l'on trouve à l'état sauvage ou cultivé. Comme la rhubarbe, l'artichaut, le raifort, c'est une plante vivace qui peut produire jusqu'à 10 ou 15 ans de suite.
« Les Égyptiens offraient des asperges en bottes à leurs dieux.
Les Grecs étaient grands amateurs d'asperges sauvages de même que les Romains qui les cultivaient aussi en fosse. Caton donne de précieux conseils sur la culture de l'asperge. D'après Pline les asperges cultivées de la région de Ravenne étaient très réputées, mais ce dernier ne semble guère les apprécier: « La nature a voulu que les asperges fussent sauvages pour que chacun puisse les cueillir et voilà des asperges cultivées. »
Suétone rapporte que l'empereur Auguste utilisait volontiers la locution : « En moins de temps qu'il n'en faut pour cuire les asperges. »
On sait que Jules César les dégustait avec du beurre fondu.
Apicius conseille de les cuire en deux eaux pour les rendre plus fermes et en propose plusieurs recettes dont des sortes de gratin, patinae, purées à l'œuf relevées de garum et d'aromates.
On ne reparlera plus de l'asperge jusqu'à ce qu'elle soit à nouveau cultivée en 1300, autour de Paris, Argenteuil, sa terre d'élection, Bezons et Épinay. Ni le Ménagier de Paris, ni le Viandier de Taillevent n'en font mention et on ignore si les asperges sauvages étaient ramassées. Il semblerait que ce soit les Arabes qui aient introduit l'asperge en Espagne d'où elle gagna la France. » La suite ICI link
Pour les petites louves et petits loups qui ne mettent pas souvent le nez dehors je précise :
1- Que l’asperge blanche est blanche c’est qu’elle ne pointe pas son turion dehors, sevrée de chlorophylle puisqu’elle ne voit jamais le jour elle garde son teint laiteux ;
2- Que l’asperge violette laisse dépasser un peu de son turion de la butte, et c’est sous l'action du soleil qu’elle devient violette ; elle bronze comme bronzent les cachets d’aspirine ;
3- Que l’asperge verte pousse à l'air libre et donc est verte sur toute sa longueur ; certaines sont carrément sauvages comme l’écrit joliment Bruno Verjus « L’asperge se cueille en sauvageonne dès le mois de mai, dans les talus et les vignes. Auguste, elle dresse un épi, semblable au blé, sur une tige frêle. Sa saveur presque piquante rappelle la sève de sureau ;
4- Quand ma mère disait que je poussais comme un asperge elle faisait référence au fait, que pour être tendres, les asperges doivent pousser vite. Il leur faut de l'eau et de la chaleur, un sol léger contenant du sable qui se réchauffe plus facilement que l'argile.
La sauvageonne des vignes est la chérie des chefs de cuisine, pour preuve :
1- Asperges Vertes des Alpilles fleuries au géranium oseille large de Belleville d’Alain Passard
2- Asperges vertes de Sénas, œuf imparfait, nombril de Vénus de Bruno Verjus photo Isabelle Spiri
Reste à relever le défi d’Ophélie qui en tant que Miss Glou Glou nous faisait le coup de l’asperge qui « dégaine l’amertume comme James Coburn la dynamite dans Il était une fois la révolution » pour nous affirmer que « Les asperges, il vaut mieux les avoir en photo que dans son verre de vin »
Là mon verdict est sans appel : avec les vertes sauvageonnes c’est NATURE !
Pour preuve ce j’ai bu ci-dessous photo Isabelle Spiri et si vous n’êtes pas d’accord avec ce mariage contre-nature soit vous pouvez, si vous êtes un peu barjot, descendre dans la rue pour protester, soit nous proposer un vin plus convenable et présentable.
Pour les préoccupés de leur santé c’est ICI link