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22 novembre 2011 2 22 /11 /novembre /2011 00:09

hospice-002.JPGSamedi matin, en descendant du tortillard brinquebalant assurant la liaison Dijon-Chalon s/Saône, il tombait sur Beaune une pluie glacée. Le quai était noir de monde et dans l’étroit boyau passant sous les voies je ne pouvais m’empêcher de penser qu’un petit effort pourrait être fait pour l’accueil de ceux qui font le déplacement pour la vente des Hospices en étant carbone neutral. Pour autant j’avais le cœur léger, empli de l’intuition que ces deux journées bourguignonnes allaient se révéler d’une saveur particulière.


Programme chargé, bien minuté, pour la première journée j’avais décidé de me glisser dans la peau d’un dégustateur en charge d’acheter pour ses clients des vins correspondants à leur demande. Mise à l’épreuve sans filet sur trois terrains différents :


-         Toute la Bourgogne  assemblée au Palais des Congrès de Beaune ou la meilleure façon de marcher ;

-         Toutes les cuvées de la récolte 2011 du domaine des Hospices de Beaune ou le recueillement de la salle Saint Nicolas de l’Hôtel Dieu ;

-         Toutes les cuvées de la Maison Corton André au château de Savigny-les-Beaune ou le bruissement d’une dégustation d’acheteurs.


Pour cet exercice j’étais accompagné d’une référence me permettant a posteriori d’étalonner la perception des vins que je venais de déguster. La logistique fut sans faille et les conditions  de dégustation idéales y compris dans le grand hall du Palais des Congrès. Bien évidemment je ne vais pas vous infliger la relation de ces différentes dégustations ce serait fastidieux et sans intérêt. Ce que je veux mettre en lumière ce matin c’est de préciser ma position par rapport à ceux qui font professions de dégustateurs et qui se répartissent en deux catégories : ceux qui le font en tant que critiques et ceux qui le font en tant qu’acheteurs pour une clientèle.


Comme je l’ai écrit je ne me suis pas mis dans la peau de la première catégorie car j’estime n’avoir aucune légitimité et peu de compétences à délivrer à destination d’amateurs, grands ou petits, une appréciation ou une note sur un vin. En revanche, je me sens plus apte à capter les désirs ou les souhaits d’une chalandise particulière que j’aurais à satisfaire et à me mettre dans la peau d’un mercanti. J’avoue humblement que jamais je n’ai ambitionné d’être caviste alors que faire le métier de négociant ça m’a plus que traversé l’esprit.


La distinction entre les deux catégories est nette : le critique de vin, comme tous les critiques, exprime un point de vue personnel qui n’a pas à tenir compte de contingences commerciales alors que le pauvre gus qui achète pour revendre doit se mettre dans la peau de ses futurs clients, sauf à être, comme l'est une nouvelle génération de cavistes, des vendeurs militants. Moi ce n’est pas ma tasse de thé de militer dans le commerce. Bien évidemment je ne mets pas non plus dans la peau d’un acheteur de GD, le barnum c’est pas non plus mon truc, mais dans celle d’un gus qui souhaite toucher le plus grand nombre avec des vins accessibles, en terme de prix comme en terme de diversité.


Au risque de vous surprendre plus je vais plus je pense que la Bourgogne est un beau champ pour cette approche car, en dépit du raffinement de ses dénominations, de ses climats, elle est au sens de la géographie humaine à la bonne taille pour bien se situer et bien tirer son épingle du jeu dans la nouvelle donne mondiale qui voit les pays émergents être les vecteurs de la croissance du marché. Rassurez-vous je ne vais pas tomber dans le dithyrambe parce que je rentre de deux journées passées à Beaune mais, comme je me veux et me vis observateur des tendances, mon nez me fait humer le fumet particulier d’une approche où l’homme, les hommes gardent la main sur leur devenir loin des emballements, du paraître, des fausses gloires et des  lucioles qui viennent se taper les mandibules sur tout ce qui brille.


La dimension humaine, charnelle, l’imbrication des hommes, de leurs entreprises, ainsi que leur capacité à se côtoyer, à se parler, à se confronter, à s’affronter parfois, à ne pas se raconter d’histoires c’est-à-dire, autant que faire ce peu, à ne pas trop se mentir à eux-mêmes, à faire comme si, à ne privilégier que la douce anesthésie de l’immobilisme, permet d’avancer. Le creuset bourguignon rassemble tous les ingrédients, pour l’ensemble de ses vins, d’une démarche durable qui serait la valeur étalon de ce que devrait être nos appellations. Pour autant je ne donne pas la Bourgogne en exemple, je dis simplement que si ces hommes le veulent bien elle est en capacité de mettre ses actes en adéquation avec ses intentions. C’est une chance mais c’est aussi une certaine forme de responsabilité.


Vous allez me dire que je suis bien loin de mon parcours de dégustateur. J’en conviens mais je ne pouvais ce matin vous le restituer sans bien le cadrer. Je ne suis pas un homme pressé. Je prends le temps de la décantation, de la réflexion. En effet, je suis de plus en plus las des petites agitations de la blogosphère, des débats sans grand contenu, des pourfendeurs au seul service d’eux-mêmes, de ceux qui passent leur temps à se justifier ou à défendre des pinces-fesses plein de vacuité. M’en fous ! Je ferme les écoutilles et je me branche sur ceux qui font. C’est reposant. C’est gratifiant. C’est simple comme une poignée de mains. C’est que du bon temps partagé.


Pour preuve le déjeuner de samedi partagé avec François Desperriers et Aurélien Ibanez le duo si complémentaire de Bourgogne Live. Ils sont pour moi une réelle bouffée d’oxygène dans l’atmosphère parfois un peu confinée de la blogosphère, avec eux je me retrouve, je suis bien dans mes baskets de vieux routier. De vrais pros, ouverts, en recherche, ils sont à l’image de ce que je viens d’écrire et ils m’incitent à passer par-dessus bord tous les squames de ma vie d’avant. C’est en bonne voie.


« À un moment donné, sans prévenir, dans une vie jusque-là bétonnée au sol, tu t’aperçois, sans vrai motif, que la fin d’une période t’arrive dessus. Tu continues mais les gestes se font mécaniques, la bataille fatigue, tu le vois bien. Les hommes limitrophes à ta vie, amis et connaissances, qui étaient des hommes, avant, sont devenus des figurants diaphanes. Tu les traverses comme tu traverses l’air. Ils sont transparents.

Ils ont perdu, à tes yeux, leur raison d’être.

Les expériences qui autrefois t’apportaient de la joie ne sont plus que déception et ennui. L’existence te file entre les mains. L’existence te file entre les mains, tout simplement parce que tu as déjà trop vécu tout ça. Pourtant tu te précipites devant le miroir et tu vois que tu es encore vivant, tu n’es pas centenaire mais tu sens sur toi un poids de cinq cents ans. »

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