Vendredi dernier messire le soleil ayant enfin consenti à sortir le bout de son nez j’ai de suite enfourché ma flèche d’argent pour rattraper le temps perdu. Marre de la pluie même si le ciel se pare parfois de superbes arc-en-ciel. Pour m’accompagner j’ai sorti Shaun le mouton héroïque de Wallace et Gromit de son étagère, il est tout content de prendre l’air.
Moi aussi, ça me donne faim, une faim de tartare et en voilà un qui vaut le détour je vous l’assure de quoi défroquer une tribut de vegan des plus enragée ! Mon estomac en rit encore en se souvenant aussi de cet Avis de Vin Fort ce Bourgueil clairet de printemps même si nous ne n’y sommes pas encore.
Shaun gentiment m’attendait pendant que je me prenais pour un grand reporter avec mon Leica C en bandoulière.
Bien sûr j’ai pris aussi une entrée et un dessert avec le liquide qui va avec mais ce sera pour une autre fois. Faut pas gâcher la matière à chronique !
Le ciel perdait son sourire, des bubons noirs masquaient le Dieu soleil, et voilà que ça « guenassait » (pluie fine et collante caractéristique du climat breton). Je craignais le pire. Mes lunettes prenaient l’allure d’un pare-brise sans essuie-glaces. Ça se calmait ou plus exactement ça n’empirait pas et j’arrivais à bon port un peu humide.
Faire des courses, savoir faire ses courses, constitue la première marche pour qui veut cuisiner bon. C’est comme un bon raisin pour nos amis vignerons.
Sous l’œil indulgent d’Alessandra RAP ici link je prenais mon temps. Je cherchais et bien sûr je trouvais.
Certains esprits caustiques vont dire que je suis à l’Ouest (avoir un petit vélo dans la tête) puisque je m’écriais « Est ! Est !! Est !!! » en exhibant une fine quille aux reflets jaune paille.
Qu’est-ce-à-dire ?
Je l’ai déjà dit en 2007 :
L'Est ! Est !! Est !!! est un vin blanc de Montefiascone, près du lac de Bolsena.
Les points d'interrogation ne sont pas toujours portés sur les étiquettes mais c'est un vin célèbre à Rome, sec ou plus souvent doux, jaune foncé, même si ce n'est pas un grand il faut le goûter rien que pour sa légende.
Sa légende veut qu'il remonte à l'an 1111 au cours duquel un certain évêque Fugger fit un voyage d'Allemagne à Rome. le prélat très pointilleux sur le chapitre du vin envoya un de ces hommes de confiance goûter les vins dans toutes les auberges et les tavernes de la route. S'ils lui semblaient bons l'homme devait écrire près de la porte « est » et dans le cas contraire « non est ».
Bref tout se passa normalement jusqu'à ce qu'il atteigne Montefiascone. Là, à peine eut-il goûté le vin qu'il ressortit en trombe écrire sur le mur : « Est ! Est !! Est !!! ».
Selon la légende, lui et son maître en burent, heureux jusqu'à leur mort.
En prime dans cette chronique une belle nouvelle de Frédérique Echard : Le balcon link et link
Tout content de cette belle prise : imaginez mon bonheur que cet Est ! Est !! Est !!! avec ses 6 points d’exclamation, je sentais que je devais pousser plus loin mon avantage. Du doigt, ce qui est malpoli aurait dit ma mémé Marie, je montrais à Alessandra un fromage qui me semblait nimbé de rouge.
Bonne pioche : l’ubriaco-di-rabioso est un fromage au lait de vache affiné au vin produit uniquement dans la région de Trévise.
Je goûtais.
Ubriaco signifie ivre être en état d'ivresse.
Selon la légende les origines de ce fromage remontent à la Première Guerre mondiale lorsque les paysans italiens de la région du fleuve Piave cachaient leurs meules de fromage dans des fûts de fermentation du jus de raisin pour empêcher les armées d'invasion de les voler.
C'est donc un fromage de lait de vache cru demi-dur qui est pressé mais pas cuit. Il est plongé dans du Raboso, du moût de raisins pendant plusieurs semaines. Au cours de cette immersion le fromage absorbe la saveur du moût, son arôme et sa croute se teinte d’une couleur rouge rubis profond. Il est affiné pendant six mois dans les caves du maître affineur Mr. Carpenedo.
La pâte du fromage obtenu est jaune pâle avec des petits trous et des notes de couleur rouge à la surface interne de sa croute. Sa saveur forte, puissante même laisse en bouche des notes de fruits noirs et de cerises acides avec des notes poivrées. Il a du caractère.
Alessandra me proposait aussi de compléter mon plateau de fromage avec un BLU’61 Raboso qui est un fromage bleu au lait pasteurisé ensemencé vieilli dans du mout de vin de Vénétie (raboso) et des myrtilles (canneberges). Comme il est enveloppé et sous poche car il baigne dans son jus je ne l’ai pas goûté. Depuis je l’ai fait c’est un fromage parfaitement équilibré en saveur et en texture, assez La vinosité n’est jamais envahissante, elle se marie à merveille avec les notes de lactées et les marbrures.
Pour mettre un peu de baume sur notre susceptibilité de vieux pays qui produit plus de 365 sortes de fromages et qui, selon de Gaulle, ne peut pas perdre la guerre ! Je vous propose un Roquefort le Vieux Berger de la maison COMBES fondée en 1923.
« C’est avant tout une histoire de famille profondément attachée aux valeurs de son terroir et à celle de la fabrication manuelle du Roquefort.
Ainsi depuis trois générations, la famille COMBES apporte sa sensibilité particulière à l’élaboration du Vieux Berger en s’inspirant de principes simples et immuables.
Des méthodes traditionnelles à la fabrication
Un savoir-faire incomparable à l’affinage
Pour faire du Vieux Berger un produit gastronomique de très haute qualité. »
- Et avec le bleu vous boirez-quoi monsieur ?
- Quelque chose de fort comme avec le Roquefort !
- Alors un blanc macéré sur peau…
- J’ai ce qu’il vous faut mais je vous ferai aussi découvrir le Bel Hazard issu d’une saignée de Merlot fait de raisins très mûrs qui a passé 4 ans en barrique et développé naturellement son voile…
Je remontais sur ma flèche d’argent, descendais la rue Rodier qui luisait, le ciel restait menaçant, je pédalais de bon cœur mon cabas plein de provisions accroché au guidon ce qui est le gage de futures chroniques…