Je vous l’assure, si ça peut vous rassurer, ce n’est pas une détestation de circonstance mais une allergie originelle et profonde, la quenelle représente pour moi, sur l’échelle de Richter des gastronomes, le sommet du mauvais mou. Ce n’est pas une question de goût mais de texture sous la dent : j’ai le sentiment – les lyonnais vont m’insulter, je sais – d’absorber du Sheba au saumon.
Après une telle affirmation je vais me faire reprocher, à juste titre, de ne jamais avoir dégusté à la petite cuillère, de la pâté, même de luxe, pour chat. J’en conviens mais, si votre compagnon ou votre compagne, vous donne du mon Minou ou de ma minette vous pouvez toujours tenter l’expérience lors du prochain réveillon.
Je suis sérieux comme un Pape car, sur le plan de la dégustation, l’Homo sapiens fonctionne peu ou prou comme Felis catus, et vous pouvez devenir goûteur pour chats grâce à Gary Pickering, biologiste spécialisé dans la science du goût et du vin, le bien-boire et le bien-manger, s'est intéressé à la nourriture pour chats.
« En effet, les nombreux tests effectués par l'industrie du « ragoumatou » – dont le chiffre d'affaires annuel s'évalue en milliards de dollars – pour améliorer l'attractivité de ses produits auprès des consommateurs à quatre pattes, tests coûteux en temps et en argent, ne sont souvent pas concluants. Les chats s'avèrent capricieux côté repas et, surtout, relève Gary Pickering, si l'on excepte le chat du Cheshire et Sylvestre, l'ennemi de Titi le canari, ils présentent le défaut majeur de ne verbaliser ni désirs ni raisons de leurs répugnances »
Mais ne devient pas goûteur de pâté pour chats qui veut !
Gary Pickering a élaboré un protocole de dégustation très rigoureux et fiable et a soumis ses candidats à une impitoyable sélection, « en éliminant ceux qui avaient les sinus encombrés (car apprécier la nourriture implique des fosses nasales bien dégagées), des problèmes de vision des couleurs ou des allergies alimentaires, ceux qui n'étaient pas assez sensibles aux saveurs primaires et à la dureté des aliments, et ceux, enfin, qui, trop dégoûtés, ne voulaient pas donner leur langue aux chats. »
11 candidats retenus.
Formation en 6 sessions d'une heure et demie où ils se sont entraînés à décrire et à classer les aliments :
- selon 18 critères d'arôme - sucré, salé, épicé, aux herbes, caramel, brûlé, rance, amer, crevettes, abats, etc.
- et 4 de texture - dureté, facilité à mâcher, viscosité (pour les sauces et gelées) et caractère graveleux, au sens premier du terme.
Protocole de Dégustation de 13 aliments du commerce :
1- rinçage de bouche à l'eau ;
2- 0,5 à 1 cuillerée à café d'échantillon placée dans la bouche ;
3- l'échantillon déplacé dans la bouche et mâché pendant dix à quinze secondes ;
4- une portion de l'échantillon avalée et le reste expectoré dans un crachoir ;
5- notation de l'intensité pour chaque critère sur une échelle de 15 cm ;
6- rinçage de bouche à l'eau.
7- Une pause d'une à deux minutes était obligatoire entre les échantillons. » Histoire de vomir un peu diront... les mauvaises langues. »
Chaque dégustateur en référence à une échelle de 1 à 9 (1 j'adore, 9 je déteste) devait donc noter la pâté et donner leur appréciation personnelle.
La note moyenne fut 4,97 entre le « je n'aime pas spécialement mais je ne suis pas dégoûté non plus » et le « j'aime légèrement »
La meilleure note 6,59 fut attribuée à une pâté au poisson.
Tout ça est paru dans un article publié en 2008 dans le Journal of Animal Physiology and Animal Nutrition link et dans une chronique de Pierre Barthélémy dans M planète (journaliste et blogueur) « Qui veut goûter la pâtée pour chats ? » link
J’en reviens au poisson pour signaler aux amis des chats que l’alerte rouge est mise sur le saumon link et qu’il va falloir trouver un produit de substitution. C’est là que je suggère l’introduction de la quenelle dans l’alimentation des chatons.
Quand j’étais en culotte courte nos chats bouffaient du mou que nous donnait le boucher et ils adoraient ça, alors…
Je disais à ma mémé Marie que le mou ça m’asirait.
Dans notre patois bas-poitevin (oui Pousson je sais) le verbe ASIRER signifiait DÉGOÛTER.
Vous l’aurez compris et ce sera la morale de cette chronique « La quenelle ça me dégoûte »