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3 novembre 2012 6 03 /11 /novembre /2012 12:00

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Au Bourg-Pailler, là où je suis né et j’ai vécu jusqu’à l’âge de 16 ans, nous n’avions pas de poubelles. Les épluchures, les restes allaient aux animaux de la basse-cour, aux cochons et ce qui n’était pas comestible jeté sur le tas de fumier. Le clan des femmes veillait au grain : ne jamais jeter le pain qui était béni par la croix tracée, même par les hommes, à la pointe du couteau, avant de l’entamer.  Les emballages se résumaient au papier journal ou à des pochons de papier kraft, le beurre était enveloppé de papier sulfurisé et la viande du boucher dans de grande feuille avec son nom dessus. Nulle trace de plastique tout était transporté dans nos paniers. Autre temps, autre mœurs, nous étions à la campagne et l’essentiel de notre nourriture était proche de nous. Nous étions des locavores avant l’heure.


Pour autant nous n’étions pas très conscient de l’environnement, guère écologiste au sens moderne, mais nous vivions dans une forme d’harmonie respectueuse d’une nature souvent dure mais nourricière. Ne voyez pas dans mes propos une quelconque trace de nostalgie ou de « que c’était mieux avant » car étant un urbain soumis à un approvisionnement largement exogène je fais comme tout le monde j’achète au mieux ce qui m’est proposé. Pour autant je fais mes courses avec un panier, je fais la chasse aux poches plastiques et aux suremballages et j’ai horreur de jeter. Les DLC sont certes utiles, surtout sur des produits à risque comme le steak haché, mais elles sont calculées avec une marge qui pousse certains consommateurs à balancer le produit à la poubelle alors qu’il est encore parfaitement comestible. Le principe de précaution poussé jusqu’à ce stade déresponsabilise le consommateur et est source d’un énorme gâchis. D’ailleurs, moi qui suis cycliste je peux constater, à l’heure où les supermarchés poussent leurs poubelles au-dehors, leur visite par une population « normale » loin du cliché du clodo cherchant sa pitance.


S’ajoute, pour les fruits et légumes, la religion de la belle apparence encadrée par une normalisation stupide. Sus aux pommes mal foutues, aux carottes tordues, à la grenaille de patates… Tout doit être rond et lisse, récuré et maintenant en sachet pour ne pas avoir à être trié, épluché et lavé. Bien évidemment toutes ces opérations ne sont pas le fait de petites mains mais d’opérations où la chimie joue un rôle majeur. Le temps, le temps, pas le temps ou souvent ne pas prendre ce temps pour privilégier un mode de vie avachi devant sa télé, les consoles de jeu ou Face de Bouc. Nous gaspillons donc allègrement tout en nous émouvant des files nocturnes de distribution de repas des Restos du Cœur et, donnons une fois l’an à la Banque Alimentaire un paquet de pâtes et une boite de haricots verts, et plus simple encore un chèque glissé dans une enveloppe.


Nulle posture morale de ma part mais pur constat qui devrait nous amener à réfléchir un chouïa avant de tout réclamer à nos pouvoirs publics impécunieux et donc de plus en plus fauchés. « D'après l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), les dépenses incompressibles des Français ont fortement augmenté entre 2001 et 2006. Elles sont passées de 50 % à 70 % pour les 20 % des ménages aux revenus les plus bas. Leurs dépenses de logement atteignent 44 %, contre 31 % cinq ans plus tôt. La précarité énergétique, liée à la hausse des factures de chauffage, augmente au rythme de la montée des prix du gaz ou de l'électricité. En province, la mobilité en voiture est touchée par les cours du pétrole. La montée de ces dépenses contraintes fait baisser de fait le pouvoir d'achat des dépenses non contraintes, c'est-à-dire le plus gros du marché de la grande consommation.

Le nombre de consommateurs sous contrainte de pouvoir d'achat est donc en forte augmentation, les plus démunis coupant dans leurs dépenses de santé ou d'alimentation. On retrouve le « marché de la pauvreté » des années 1990. Il concernerait aujourd'hui près de 50 % des Français et renvoie à trois grandes pratiques de consommation économe, comme l'ont observé les enquêtes réalisées à l'échelle des familles. » constate Dans une tribune du Monde « Du consommateur malin au consommateur contraint » Dominique Desjeux anthropologue, professeur à l'université Sorbonne René-Descartes, directeur du diplôme doctoral professionnel en sciences sociales, et membre de l'Observatoire de la consommation. Il est coauteur, avec Fabrice Clochard, de Le Consommateur malin face à la crise, entre cadrage et marge de manœuvre, (L'Harmattan).


Guillaume Garot profitant de l'ouverture du Salon international de l'agroalimentaire (Sial), la grand-messe de la consommation de masse, Guillaume Garot, ministre délégué chargé du secteur, a donc annoncé la mise en place d'un plan d'action visant à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d'ici à 2025. Légumes abîmés, yaourts périmés, assiette entamée des cantines ou pain des restaurants «Chaque Français jette de 20 à 30 kilos de nourriture par an. Ce gaspillage représente environ 400 euros pour une famille de quatre personnes, autant d'argent jeté par la fenêtre ou à la poubelle. Consommateurs et industriels, «tout le monde» est concerné.


Le site du Ministère de l’Agriculture et de l’Agro-alimentaire répond à la question : Qui gaspille le plus ?


« Ce ne sont pas forcément ceux que l’on croit ! Contrairement aux idées reçues, les restaurants traditionnels perdent et gaspillent beaucoup plus que les cantines, au sein desquelles existent de fortes disparités.


- la restauration commerciale : si la restauration rapide est peu concernée par le gaspillage alimentaire, les restaurants traditionnels et gastronomiques ont les plus grosses pertes, avec 230 grammes de denrées perdues ou gaspillées par personne et par repas. En cause : la difficulté à estimer les commandes en amont et à gérer les stocks, les minima de commandes imposés par certains fournisseurs, les règles strictes de sécurité sanitaire et les manières de cuisiner (déchets).


- la restauration collective (167 grammes par repas et par personne) : les plus grosses pertes se situent chez les patients en court séjour à l’hôpital. La restauration collective des établissements de santé et médico-sociaux est confrontée à différentes difficultés, notamment : la grande variété des profils nutritionnels à satisfaire (souvent une trentaine de profils différents),  le peu de temps pour se restaurer, la présentation et la qualité des plats les difficultés des patients pour se nourrir.


Côté restauration scolaire, les meilleurs élèves sont les écoles primaires. Au collège et au lycée, on surévalue souvent les quantités à préparer, et on peine à satisfaire des convives aux préférences variées et qui manquent souvent de temps pour déjeuner. Enfin, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, les restaurants d’entreprise gaspillent peu (125g par personne et par repas).


La différence entre la restauration et de la distribution alimentaire rend difficile les comparaisons entre ces deux métiers. L’étude révèle que dans la grande distribution, l’importance du gaspillage est directement corrélée à celle du chiffre d’affaires et du nombre de salariés (moyenne : 197 tonnes / établissement /an). Les métiers de bouche gaspillent quant à eux 2,6 tonnes par établissement et par an.


Manger un acte citoyen ? « Manger, c’est accomplir quelque chose qui a du sens, participer à un projet citoyen. » Comme l’affirmais récemment le New York Times « l’alimentation peut changer le monde » Comme l’écrit avec une pointe d’ironie Corinne Maier « La nourriture, une idée neuve en Europe ? » et de noter que « le nombre d’émissions, de blogs et de télés consacrés à la jubilation du goût est phénoménal. Masterchef, La cuisine express de Jamie Oliver, l’école des chefs, Affaire de goûts, Suivez le chef, Escapade gourmande… » et de lancer « Après la Révolution sexuelle des années 1970, voilà la révolution gustative des années 2000 » Le dernier avatar de ce déluge, qui me permet de faire le lien avec ce qui précède, nous vient d’Angleterre avec l’incroyable émission TV « Great British Waste Menu » où des grands chefs ont pour mission de réaliser des plats dignes d’un grand restaurant avec des détritus… disons des produits récupérés dans les poubelles… Peut-être que les Français auront droit à cette émission puisque Christophe Dechavanne, jamais en reste d’une pitrerie pour remonter à la surface, aurait acheté les droits. Mais comme l’explique  Angela Hartnett, à la tête d’un établissement londonien réputé et l’une des quatre professionnels de la version originale, son objectif est louable : « Tout le monde veut des carottes, des pommes ou des oranges parfaites. Mais cela n’a aucun rapport avec le goût. Ce qui compte, c’est la saveur du légume. La génération d’après-guerre n’aurait jamais rien gâché »

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En guise de conclusion bien provisoire je rebondis sur notre chef anglaise via la célèbre formule de Guy Roux (parrain auxiliaire de la vente des Hospices de Beaune cette année)  « Faut pas gâcher… » appliqué par un blog  au vert des blettes «Autant il y a des légumes qui sont de vrais plats de pauvres, comme les artichauts (« Les artichauts, c’est un vrai plat de pauvres. C’est le seul plat que quand t’as fini de manger, t’en as plus dans ton assiette que quand t’as commencé ! »dixit Coluche), que y’en a d’autres qu’on dirait réservé aux riches, comme les petits pois ou les blettes. Quand tu vois le prix affiché au kilo, et ce qu’il te reste dans l’assiette une fois préparés et cuits, ça fait un peu mal au crapaud (NDLR: nom argotique d’un porte-monnaie. Pas mal vu, hein ?). » Suite ICI link


« Le domaine Philippe Girard a reçu vendredi dernier Guy Roux, venu voir ses nouvelles vignes fraîchement vendangées, dans la commune de Savigny-lès-Beaune. Souriant, détendu, l’ancien entraîneur d’Auxerre a goûté le raisin tout en racontant l’histoire de la colline, où se trouvait une léproserie aujourd’hui détruite.

L’histoire, Guy Roux l’aime avec passion. Au moins autant que le vin et le football. Il y a du monde pour l’écouter distiller ses anecdotes : la famille Girard – c’est avec Arnaud, le fils de Philippe, le propriétaire du domaine, qu’il a acheté les vignes et créé un groupement foncier agricole –, sa compagne, son amie Safia Otokoré, venue en coup de vent avec une délégation chilienne, et d’autres amis.

Après les vignes, la cave. La vinification de ses parcelles est en cours. Guy Roux se la fait expliquer, puis vient la traditionnelle dégustation, en petit comité. C’est là que la magie opère. L’ancien entraîneur reconverti consultant sportif est comme un jeune homme. Les questions fusent sur les millésimes, le vocabulaire, les climats. Guy Roux, l’œil rieur, prouve que sa Bourgogne, il l’aime tout entière. »


Tous droits réservés © Bourgogne-Vins.com


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