Samedi dernier je suis allé à Lyon, du côté de Bron, au Sihra, arpenter les allées du grand barnum de la grande bouffe industrielle ripolinée par les paillettes des grands chefs. Ils étaient venus, ils étaient tous là les Charal, les Lactalis, les Bonduelle, tous les mammouths français et étrangers link de la bouffe toute prête pour resto d’entreprises et de beaucoup de restos tout court. Bien sûr nos étoilés et leurs adorateurs patentés ne mettent pas les pieds dans les travées où se bousculent les commerciaux de tous poils. Ils plastronnent sur le ring, c’est du marketing : sous la haute gastronomie, la grande bouffe. C’est la vie des affaires, la loi des grands nombres, vendre sa tronche de chef placardée sur un plat dit cuisiné vendu en hypermarché ça douille bien plus que de faire des petits plats à sa table étoilée.
Je suis donc allé me réfugier tout au fond du Hall 6 sur la Place des Vins link où y’avait pas grand monde mais c’était le jour de l’ouverture du Salon. « Créé en partenariat avec Inter Beaujolais et Inter Rhône en 2011, Place des Vins permet aux professionnels de rencontrer grands comme petits vignerons, des coopératives et Maisons d’Alsace, du Beaujolais, Bugey, Bourgogne, Diois, Forez, Jura, Lyonnais, Vallée du Rhône, Roannais et Savoie.
Place des Vins propose de formidables espaces de dégustations, d’échanges, de rencontres et d’affaires entièrement dédiés au monde du vin.
Ce salon propose aux visiteurs, professionnels du vin et de la restauration, un complément idéal à l’offre du Sirha. »
C’est bien dit mais ce cantonnement des vins ne me semble pas très favorable à une réelle attraction sur une clientèle qui ne se rend pas au Sihra pour faire ses choix de vins : les régionaux bien sûr mais aussi et surtout les acheteurs étrangers qui ne viennent pas à Lyon pour prospecter les vins de la région qui a la bonne idée de se dénommer Rhône-Alpes. Comme j’ai assisté, à l’insu de mon plein gré, à l’inauguration du salon par un peloton serré d’élus dans lesquels je n’ai reconnu que Jean-Jack Queyranne le président de la région, mais y’avait pas le maire de Lyon le sieur Collomb, j’ai le mauvais esprit de penser que cette présence à un petit parfum politique : faut faire plaisir aux élus d’une région qui, lorsque l’on prononce son nom n’évoque guère la production de vins. Et pourtant, on y retrouve le Beaujolais et les Côtes-du-Rhône septentrionales avec de belles appellations : hermitage, côte rôtie, condrieu, château grillet entre autres…
Mais sous ces grandes appellations, et d’autres comme le vin de Savoie, les vins du Bugey, vins du Diois et sa clairette, des IGP dont la plus volumique l’Ardèche, se nichent des petites appellations qui ont un petit parfum de Lyon : en premier lieu les coteaux-du-lyonnais, puis les côtes du forez et enfin la côte roannaise. J’adore ce florilège : coteaux, côtes, côte. Pour bien marquer son attachement à la vigne et aux vins la Région s’est fendu d’une plaquette très bien faite : Un patrimoine en revue : Vigne&Vins en Rhône-Alpes. L’édito de Jean-Jack Queyranne fait dans le jargon de filière à la sauce des communicants. Passons, peut mieux faire !
Quelques chiffres pour situer ces micro-appellations : sur 50 347 ha de vignes en production elles en regroupent 590 ha pour 17250 hl produits sur un total de 2,330 M.d’hl dont 380 000hl de blancs et 1,940 M.d’hl (chiffres arrondis). Donc un tout petit ruisseau dans une grande rivière.
Du côté couleurs :
- coteaux du Lyonnais 66% de rouge, 19% de rosé, 15% de blanc ;
- côtes du Forez : 67% de rouge, 33% de rosé ;
- côte roannaise : 90% de rouge, 10% de rosé.
30 caves particulières et 1 coop dans les coteaux du Lyonnais, 9 caves particulières et une coop dans les côtes du Forez, 30 caves particulières dans la côte roannaise.
30 ha sur 370 en bio dans les coteaux du Lyonnais, 21 sur 110 dans les coteaux du Lyonnais, 28ha dont 18 en conversion sur 110 dans la côte roannaise.
Les 2 photos de vignobles de la Loire sont de Camille Moirenc ®
Pour plus de détails Sonia ici même dans ses chroniques vous dira tout sur les vins de ces micro-appellations. Dans la plaquette du Conseil Régional j’ai extrait les points de vue d’un sommelier pour les coteaux du Lyonnais et de Pierre Troisgros pour la côte roannaise.
Pour les cinéphiles Deux ou trois choses que je sais d'elle est un film réalisé par Jean-Luc Godard, sorti en 1967 qui déclarait «Quand on soulève les jupes de la ville, on en voit le sexe.» En effet, le thème du film est le portrait d'une jeune mère de famille, habitant dans un grand ensemble de la région parisienne, qui s'adonne à la prostitution occasionnelle. Marina Vlady garde un très mauvais souvenir du tournage car après qu’elle eut repoussé la demande en mariage de Jean-Luc Godard juste avant le début des prises de vue, celui-ci ne lui adressa plus la parole comme elle le relate dans ses mémoires 24 images/seconde : séquences de mémoire, Éditions Fayard : « Je n'ai plus entendu sa voix s'adresser directement à moi pendant le tournage. Il me donnait des ordres, des textes à répéter après lui grâce à un système de micro-oreillette. J'étais extrêmement mal à l'aise — comme tous les autres acteurs, d'ailleurs. Ce système ne laissait que peu de place aux émotions. Nous étions tous à l'écoute, tendus pour exécuter les ordres. Souvent, Jean-Luc nous piégeait en nous posant une question personnelle. Par exemple, il me demanda :
— Définis-toi en un mot, et réponds en regardant droit dans l'objectif.
Furieuse, je lançai :
— Indifférence !
On peut voir ce plan dans le film au cours d'une scène de café.
Cette technique lui a permis d'étayer sa thèse selon laquelle les acteurs sont les meilleurs robots, formule qu'on lui prête et que je soupçonne d'être authentique. Le résultat n'en est pas moins stupéfiant : cette tension dans l'écoute confère à chacun une étrange présence, une inquiétude latente qui choquent et dérangent. Seule la scène avec le petit Christophe Bourseiller, qui joue mon fils, me permet d'être plus naturelle. […] J'ai gardé le souvenir que c'est la seule et unique fois où il m'a laissé improviser. »