La comtesse me bombardait de SMS languides où je la sentais au bord du péché de chair, prête à tous les renoncements pour y tomber tout en se défendant de le vouloir. Elle palpitait, preuve vivante de l’insatisfaction, de la frustration, de l’incapacité de son imbécile d’époux à la satisfaire. J’entretenais sa flamme avec une désinvolture qui la ravissait. De son côté le comte, drapé dans sa dignité outragée, ne manquait pas de me mettre en copie de ses nombreux e-mails appelant à la mobilisation. « Je me permets d’attirer votre attention sur la gravité des conséquences à long terme des projets de Mariage pour tous et de PMA en cours au Parlement. Il ne s’agit pas d’un problème politicien (de nombreux élus de gauche sont contre et quelques élus de droite pour/ voyez un remarquable article de Jospin) et encore moins d’une hostilité aux homosexuels (la société peut reconnaître leur amour par un élargissement des droits du PACS). Il s’agit de bien mesurer les conséquences à long terme de cette évolution fondamentale de la filiation. Reconnaître un « droit à l’enfant » égal à tous les mariages conduira « pour l’égalité » à nécessiter la Procréation Médicale Assistée pour toutes les femmes et la Gestation Pour Autrui pour les couples d’hommes ce qui revient à marchandiser le corps des mères « porteuses » et à priver l’enfant de sa filiation réelle. Une des conséquences parmi beaucoup d’autres … est que la destruction voulue par une élite « bobo » du modèle familial dit traditionnel renforce les situations de misère et de précarité sociale pour les plus faibles (70% des français en dessous du seuil de pauvreté sont des familles monoparentales). Peut-on au nom de l’égalité entre adulte, créer une inégalité entre enfants qui seraient délibérément privé d’un père et d’une mère et d’un lien avec leur filiation réelle? »
Pour ceux qui ont le courage de se taper la lecture des écrits de Sylviane Agacinski, la dame de Jospin, celle-ci est hostile à la gestation pour autrui (GPA) qu’elle a dénoncée dans Le corps en miettes (Flammarion, 2009). Moi aussi d’ailleurs, mais concernant le projet de loi sur le « mariage pour tous », elle était longtemps restée discrète. Comme l’avance le comte Yoyo avait fait part de ses réserves le 9 novembre 2012 sur le plateau du Grand Journal tout en déclarant respecter la position de son parti. La Sylviane donc, femme de gauche, philosophe, et accessoirement « femme de » s’est donc exprimée elle aussi, à plusieurs reprises sur les ondes. Qu’a-t-elle dit ? Que ce n'est pas le mariage entre personnes homosexuelles qui la gêne - d'autant plus que l'institution lui semble obsolète - mais l'homoparentalité qui déstabiliserait la filiation. Son credo : « le père et la mère ne sont pas interchangeables ». Au-delà de l'approche philosophique, madame Jospin, n'hésite pas à prendre part à la controverse politique. « Je pense qu'il y a énormément de gens de gauche qui sont sceptiques sur ce projet. Elle dénonce aussi un « manque de courage de certains » sur la question. Des noms, des noms, Sylviane, puisqu’à la question de savoir si elle était prête à manifester, tu as répondue « absolument ». Ce qui me plaît dans cette affaire c’est de voir le couple Jospin récupéré par le comte et ses potes alors qu’ils l’ont conchié sans vergogne lorsqu’il était Premier Ministre.
J’ai lu dans une chronique que « Ceux qui sacralisent le mariage et la filiation refusent de les profaner en les ouvrant à l'homosexualité. Libre à chacun de valoriser davantage l'hétérosexualité, au motif qu'elle serait naturelle ou divine. De fait, selon l'actuel Catéchisme de l'Église catholique, les actes homosexuels sont des « péchés graves », « intrinsèquement immoraux » et « contraires à la loi naturelle ». Les auteurs se posaient la question : Pourquoi préserver ainsi la PMA de l'égalité ? « Les craintes du gouvernement sont le révélateur des ambiguïtés du droit de la filiation. Certes, la loi continue d'y accorder au mariage une place majeure, avec la présomption de paternité, mais aussi en lui réservant l'adoption conjointe. Pour autant, cette institution n'est plus son fondement unique : le législateur a cessé depuis 1972 de hiérarchiser ainsi la filiation, mettant à égalité les filiations qu'il renonce d'ailleurs à nommer « légitime » et « naturelle ». Aussi la biologie apparaît-elle désormais comme un fondement alternatif de la filiation – le développement des « preuves génétiques » lors des recherches en paternité l'atteste. Les lois de bioéthique en apportent la confirmation paradoxale. Tout se passe comme si, pour le droit, la reproduction artificielle était... naturelle ! Au couple composé d'un homme et d'une femme, on demande d'être « en âge de procréer » (une exigence absente pour l'adoption), l'effacement des donneurs contribuant à renforcer l'illusion d'une reproduction naturelle. Ceux qui répugnent aujourd'hui à ouvrir la PMA aux couples de même sexe veulent ainsi sauvegarder une vraisemblance qui n'a rien à voir avec la vérité. Renversons la perspective. La biologie qu'imite le droit de la PMA n'est qu'une construction juridique parmi d'autres : la filiation n'est pas la reproduction. Mais cette convention peut devenir dangereuse. Avec l'adoption internationale, on renonce à la ressemblance de l'enfant à ses parents ; au contraire, pour la PMA, la médecine procède à un véritable tri racial : elle assortit la couleur des cheveux, des yeux et de la peau. Est-on sûr de vouloir préserver pareil impératif de vraisemblance ? Le « mariage pour tous » est l'occasion d'expliciter les enjeux de la filiation. D'un côté, l'Église va au-delà de son refus du « mariage pour tous ». Pour les évêques, « la loi ne doit pas mentir sur l'origine de la vie ».Conformément au droit canonique, la vérité de la filiation deviendrait biologique. Plus question d'effacer les géniteurs de la filiation : adieu l'anonymat de la PMA et l'accouchement sous X, mais aussi l'adoption plénière. Sauf à exempter le mariage de cette « vérité », c'en serait fini de la présomption de paternité : l'époux n'est pas toujours le père biologique... »link