Là, j’en suis sûr, je vais me mettre tout le monde à dos : les vignerons naturistes, les tauliers de restos et de bars naturistes, les petits cavistes naturistes et pas naturistes, les bobos forcément naturistes, Jonathan Nossiter nouveau converti au naturisme, les tronches de vin tous 5 naturistes, tous les garçons et les filles en plus jeune âge qui agitent leur verre de vin naturiste et puis, bien sûr, toute la maison Castel maison mère de Nicolas qui n’en a que faire de mes réflexions à la noix, la CNAOC, le CN de l’INAO et celui des IGP, les Interpros, les ODG, les OC, les marchands d’engrais, de phyto et de produits œno, les fabricants de machines à vendanger et les vendeurs de matos, le vigneron de Fronton qui me traite de con, n’en jetez plus je n’ai aucune vocation à me poser en martyr car ma fin de vieil homme indigne chroniqueur impénitent est proche.
Mais en attendant le clap j’ai des excuses :
1- Lorsque j’officiais à la Société des Vins de France entre 1986-1988 à Gennevilliers, charmant port de pêche, j’ai embouteillé le jaja de la maison Nicolas à la suite d’un appel d’offres gagné haut la main sur les gars de Castel. À cette époque-là Nicolas était entre les mains du groupe Rémy-Cointreau et officiait à Charenton.
2- J’ai bien connu Pierre Boisset l'acheteur des vins de la maison Nicolas.
« PENDANT PLUS DE CINQUANTE ANS, Pierre Boisset a été l'acheteur des vins de la maison Nicolas. De cette vie passée à arpenter les vignobles armé de son tastevin pour déguster des milliers d'échantillons où les piquettes voisinaient avec les vins loyaux et marchands, de cette expérience qu'il fut à peu près seul à réaliser à cette époque, il extirpa de savoureux souvenirs dans un livre paru au milieu des années 1980, Millésimes et Campagnes. Les carnets d'un acheteur de vins. Dans sa conclusion, cet observateur d'un monde viticole paysan et humble confiait son plus grand étonnement : « Jamais je n'aurais pu penser, en commençant mon métier, qu'un jour on vendrait des vins au prix des parfums de luxe. » Qu'aurait-il dit aujourd'hui en voyant un flacon de Pétrus se négocier autour de 3 000 euros, des Lafite ou des Latour dépasser allègrement les 1 000 euros ou en égrenant les chiffres des records de vente aux enchères de grands crus à Londres, New York ou Hongkong ? Il avait mis le doigt sur le phénomène le plus profond et le plus marquant de l'histoire de ce secteur économique depuis le milieu du XIXe siècle, quand le développement du chemin de fer fit du vin une boisson nationale, bon marché et quasi industrielle. Le passage, très rapide, d'un mode de consommation à un autre et le changement de statut qui s'ensuivit, la fin du « vin boisson » et l'émergence d'un produit transmettant autant d'émotions culturelles que de sensations gustatives, porteuses de valeurs statutaires et hédonistes. Certes, il reste aujourd'hui une large place de la production viticole dédiée à la mise en marché de vins accessibles mais, même dans ces catégories, la dimension « expérience émotionnelle » est importante pour les consommateurs. » THIERRY DESSEAUVE
3- Les « Petites récoltes de Nicolas » existent depuis 1995. Un concept qui avait donné un sacré coup de jeune au vin de table. Le principe était simple, des bouteilles aux étiquettes « comme à la main » qui jouaient sur le mythe de la découverte du petit producteur. Un mythe qui s'écoulera à plusieurs millions de bouteilles tous les ans.
4- J’ai confié récemment à une boîte spécialisée, qui me l’avait demandé, mon analyse gratis sur la stratégie de Nicolas. Bien évidemment je n’en ferai pas ici état c’est mon affaire et celle des dirigeants du groupe Castel qui, je n’en doute pas un seul instant, ont dû apprécier mes réflexions à la con.
Que les naturistes intégristes se rassurent, en évoquant une collection « les petites natures » dans cette maison très conservatrice je ne lance aucun pavé dans la mare, je me contente de constater que les voies de l’extension du domaine du vin sont impénétrables et que dans ce domaine ceux qui savent anticiper les tendances sont toujours les grands gagnants. Après tout le Vin de France, que Cap 2010 a préconisé, est l’héritier du Vin de Table, en mieux, et les vignerons naturistes en sont les fers de lance. Moi ce que j’en dis c’est pour causer et ramener ma fraise alors que l’on ne me demande rien.
Gus et Bilal