Quel titre !
L’œuvre de 3 compagnons qui ont fait un bon bout de route ensemble et qui racontent, à 3 voix, plusieurs années d’ivresse mémorables, de pérégrinations communes ou non…
Je vous livre des extraits et l’intégralité du mot manuscrit d’Antoine Blondin.
La nuit, « le goût de la nuit où les différences s’estompent, où les conflits se résolvent dans l’anonymat des bistrots… La nuit ce n’est pas seulement la rue, la marche dans le noir, la fuite devant la panique d’avoir à ranger sa vie dans une boîte, ne serait-ce que durant quelques heures (ah ! la vie rangée…), c’est aussi la lumière de rencontres, les sociétés soudaines qui s’improvisent autour des comptoirs… »
Nostalgie ?
Victor Hugo définissait la mélancolie comme le « bonheur d’être triste ». La nostalgie, qui exprime au sens littéral du terme le mal du pays, c’est la tristesse par la joie, quand celle-ci revêt les couleurs déchirantes de la rétrospective, une joie déracinée… »
« Le beau nom d’«habitués»… la petite volupté quotidienne d’avoir sa place traditionnelle au zinc ou sa chaise immuable et un coude familier contre son coude à soi… »
« Faire échec à la solitude par le truchement de ce que nous avons appelé des « verres de contact ».
« Aux détours de l’existence contemporaine qui tend à séparer les êtres, je sais pourtant des refuges où le bonheur d’être ensemble demeure vivace… »
« Il fut néanmoins un temps récent où s’épanouissaient sous une forme nouvelle le vieux désir de lier connaissance avec les autres, ce sentiment d’avoir quelque chose à leur communiquer, et l’illusion qu’on pourrait s’arranger pour vivre si l’on était assuré d’une marge où l’existence s’échauffe et brille dans ses plus fastueuses comme dans ses plus modestes manifestations… »
« À l’époque où il faisait bon de partager les approches de l’aube, une Aveyronnaise charbonneuse tenait un bistrot-tabac à l’enseigne du Bar-Bac, dont le mérite le moins secret était de ne fermer jamais… »
« On y voyait, dans un espace restreint et sans apprêts, des membres de l’Institut, des prix Goncourt, quelques La Rochefoucauld, côtoyer des typographes, des manœuvres, quelques clochards au long cours, sans compter de vrais acteurs et ces traînards patentés qui sont les effigies de la fête nocturne. Ce joli monde s’offrait sans discernement des tournées mutuelles, ayant vaguement conscience que le rassemblement de tant de spécimens de la société composait une manière d’arche de Noé. »