Sur Face de Bouc j’adore la mention : en couple. Après tout le mariage devant le maire n’est qu’un contrat civil pas un brevet d’amour à durée indéterminée. Comme la fièvre sondagière sévit en ces temps électifs sur notre vieux pays, le site de rencontres Meetic, surfant sur la pandémie a fait réaliser en mars auprès de 1 032 personnes représentatives, une enquête par l'institut Opinion Way dont il ressort qu’il est possible de s'aimer, même si l'on ne partage pas les mêmes idées. « 65 % des Français ne seraient pas gênés de s'installer en couple avec quelqu'un qui aurait des opinions politiques contraires aux leurs ». Seulement 34 % des Français ont répondu qu'ils seraient gênés, ce pourcentage étant plus fort chez les sympathisants de gauche (43 %).
Comme sur la Toile le copié-collé sévit, tous des grosses féniasses qui se contentent de citer l’article du Monde Le couple à l'épreuve de la politique de Rafaële Rivais, je vais pour enrichir l'info d’abord broder sur le moustachu Frédéric Thiriez, style guidon à la Pélissier, ci-devant président de la Ligue de football professionnel, avocat auprès du Conseil d'État et de la Cour de Cassation depuis 1990 (c’est une charge), dont le couple « mixte » politiquement est mis en avant dans tous les papiers. En effet, il est marié depuis 1995 « avec une militante de l'autre bord, Marie-Claire Carrère-Gée, élue UMP du 14e arrondissement de Paris. La politique les divise donc. Pourtant, ils sont unis depuis dix-sept ans, et parents de deux enfants. Mme Carrère-Gée assure que les échanges sont « continuels », mais qu'ils n'ont jamais provoqué de « dispute ».
J’ai côtoyé Frédéric Thiriez alors qu’il était tout d’abord en 1981 conseiller technique au cabinet de Gaston Defferre alors ministre de l'Intérieur et de la décentralisation, puis en 1982, directeur de cabinet de Joseph Franceschi, le secrétaire d'État chargé de la Sécurité publique. En 1984, il redevient directeur de cabinet de Gaston Defferre, devenu ministre chargé du Plan et de l'aménagement du territoire et ce jusqu'en 1986. C’est alors qu’il se rapproche de Michel Rocard, ce qui n’est pas du goût des rocardiens historiques, directeur des Affaires politiques, administratives et financières de l'Outre-mer au ministère des départements et territoires d'outre-mer de 1988 à 1990 alors tenu par Louis Le Pensec. Il quitte l'administration en 1990 pour devenir avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et associé du cabinet d'avocat Lyon-Caen, Fabiani.
Pour ma part, lorsque j’étais Directeur de Cabinet de Louis Mermaz, Ministre de l’Agriculture et de la Forêt, j’étais « chapeauté » par un Conseiller auprès du Ministre, Jean-Pierre Philippe très « à gauche » qui, dans un premier me marqua à la culotte : pour un fabiusien un rocardien c’était de la mauvaise graine, pour très vite jeter l’éponge lorsqu’il comprit qu’il ne maîtrisait aucun des fondamentaux du 78 rue du Varenne. Sous le gouvernement Jospin il fut Directeur du cabinet de Dondoux Ministre du Commerce extérieur avant de se faire parachuter à la Sopexa comme directeur. En 2003 il s’est marié, dans la basilique de Longpont-sur-Orge, avec Nathalie Kosuskio-Morizet (celle-ci est Ingénieur du Génie Rural des Eaux et des Forêts). Pour la suite lire l’article de Paris-Match. Pour le livre de JPP « Où c kon va com ça? Le besoin de discours politique » disparu dans les oubliettes de l’Histoire voir l’article de l’Express. Les deux sont trouvables sur Google. Pour ne rien vous cacher les commissaires politiques quelle que soit leur obédience n’ont jamais été ma tasse de thé.
Comme d’habitude dans ce genre d’étrange conjecture on sort le pédopsychiatre et psychanalyste de service, en l’occurrence un certain Samuel Lepastier qui déclare doctement : qu’ « avoir des opinions divergentes ne pose pas de problème au couple, à condition qu'il y ait une éthique commune » et qu' « être amoureux, c'est aller vers l'autre » : une opinion différente « peut être un facteur d'attirance ». Il souligne qu' « il y a toujours des tensions dans les couples », et que « les plus sages d'entre eux choisissent des motifs d'opposition extérieurs, ne portant pas atteinte au narcissisme de l'autre ».
Non dépourvu d’humour le PP remarque que dans la mesure où la politique « a perdu la valeur sacrée » qu'elle avait autrefois – de mon temps les lignes des blocs étaient hérissées de barbelées et l’impérialisme américain guettait le social-traître qui osait ne pas s’agenouiller face aux diktats des intellos compagnons de route du PC, en 68 l’affrontement avec les Troskos et les Maos fut aussi très sportif – « Désormais, on défend modérément des idées modérées, et l'on éprouve moins de passion à dire que l'on est pour l'augmentation de la TVA sociale plutôt que pour la relance de la consommation par la croissance »
Mais les couples « dissonants « sont encore minoritaires : 14 %, « constatait Anne Muxel, directrice de recherche au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), dans son livre Toi, moi et la politique, paru en 2008 (Seuil). « Les trois quarts des Français font état d'une convergence idéologique avec leur conjoint, soit à gauche (29 %), soit à droite (29 %), soit ni de gauche ni de droite (17 %) « , précisait-elle. »
Selon le sondage Meetic :
- 40 % des Français devraient donc voter comme leur conjoint(e), 56 % parmi les sympathisants du PS et de l'UMP. Seuls un quart (25 %) « Ne mettront pas dans l'urne le même bulletin que leur tendre moitié. En 2007, 27 % des couples ne votaient pas de la même manière », notait dans son livre Anne Muxel. Mais les femmes sont plus nombreuses que les hommes à reconnaître exprimer un vote différent de celui de leur conjoint.
- 94 % des ménages parlent de la présidentielle. Seuls 4 % des ménages disent que « la politique, c'est tabou »
- 38 % des personnes sondées disent qu'elles ne savent pas quel sera le choix de leur conjoint(e) et qu'elles ne le lui demanderont pas.
Rafaële Rivais dans la conclusion de son papier du Monde cite Anne Muxel « En couple, on peut parler de politique tout en gardant son vote secret. Si la connaissance du vote du conjoint s'est répandue au fil du temps, la transparence ne s'est pas encore généralisée ». En 1978, le secret du vote concernait un tiers des couples, aujourd'hui, il en touche un quart. « Ce secret touche davantage les catégories peu favorisées socialement et culturellement, sans doute parce que l'on y observe un intérêt pour la politique, ainsi qu'une fréquence des discussions plus faible ».
Du côté du Taulier ne vous attendez pas à ce qu’il vous fasse aujourd’hui plus de confidences sur cette forme intéressante de cohabitation car elle l’amènerait à vous confier les secrets de son petit jardin d’intérieur et ce n’est ni le lieu, ni le jour. « L’amour est une douceur dont le jus est savoureux et la pâte amère. » c’est écrit dans les Milles et Une Nuits.