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27 mars 2012 2 27 /03 /mars /2012 16:00

Je baigne dans un océan de lait. Hier un producteur me demandait au téléphone qui va gérer nos quotas. Alors je me suis   dit dans ma petite Ford intérieure : Qui se souvient du temps où l’Europe comme on dit, a instauré des quotas laitiers pour juguler la marée de lait et les montagnes de beurre ? Pas grand monde sans doute, début 1984, nous venions de présider le Conseil Européen, et la mesure passait mal. Michel Rocard, tout nouveau Ministre de l’Agriculture, en bon petit soldat avait fait le sale boulot sous l’œil du conseiller du Président Henri Nallet. Ça chahutait sec dans les campagnes. Sortir sur le terrain relevait de la provocation. Moi je planchais sur l’autre bombe à retardement : l’élargissement à l’Espagne et au Portugal. Bref, puisque les quotas laitiers vont disparaître en 2015 et que je me débats dans un dossier de producteurs de lait je ne résiste pas à l’évocation de ce minuscule morceau d’histoire.

 

Le localier du Courrier Picard plongeait sa plume dans une encre qui puisse plaire au Président si littéraire :  La Picardie était plongée dans la brume, depuis deux jours un crachin glacial noyait le voyage présidentiel. Nous sommes au tout début février 1985, flanqué de son Ministre de l’Agriculture Michel Rocard qui l’énerve avec son goût des chiffes et de son conseiller agricole Henri Nallet, dit le Sphinx, qui se verra un beau matin propulsé au 78 rue de Varenne pour remplacer au pied levé le père Rocard démissionnaire nuitamment sur une histoire de proportionnelle. Ne riez pas !

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Septembre 1994 : Mitterrand et Vichy
Une jeunesse française", un livre de Pierre Péan, révèle les activités du président sous l'administration pétainiste. François Mitterrand s'en explique, sur un plateau télévisé, devant Jean-Pierre Elkabbach. Comme ce dernier est très difficile à dessiner, il m'apparaissait plus commode de le représenter basculant sous le bureau. J'ai éludé le problème.

 

Avec le  Président on prend le temps de manger : un banquet pour 180 convives a été prévu au réfectoire du lycée agricole. Dehors la FNSEA et les JA chauffent l’ambiance et déversent des tombereaux de fumier et bottes de paille. Les CRS veillent au grain. Bougon le matin, le vieil animal politique se sent stimulé par l’adversité.

 

Après le repas, Gérard de Caffarelli, grand notable que connaît bien Henri Nallet, attaque bille en tête sur les quotas laitiers. La France a accepté de réduire sa production de 2 %. « Une catastrophe ! », selon lui. Le chef de l’Etat soudain disert, presque badin, ne craint pas de « faire la leçon » aux professionnels du secteur : « Naturellement, ils m'en voudront, mais comme ils m'en veulent déjà, cela n'ajoutera pas grand-chose à la difficulté ».  Et de se lancer dans un long plaidoyer pro-quotas : « La catastrophe eut été pire si l'on avait continué à produire des excédents parce que l'Europe n'aurait plus accepté de les payer et donc de garantir les prix ». Puis il renvoie la balle dans le camp des organisations agricoles. « Si la profession s'était mise d'accord, en particulier sur les transferts pour l'administration de ces quotas, nous n'en serions pas là. Donnez-les nous, mais vous ne les donnez pas. Alors il ne faut pas inverser l'ordre des responsabilités. »

 

La « leçon » dure plus d'une heure. Durant laquelle le Président à l’ancienne plaide également pour l'adhésion de l'Espagne et du Portugal à l'Europe, défend l'enseignement agricole public ou tend l'oreille aux promesses d'un tout nouveau carburant, l'éthanol. De temps en temps, il digresse aussi : « Les statistiques, les pourcentages, ça veut dire quelque chose, mais ça ne veut rien dire dans la réalité. C'est-à-dire que dans la moyenne, il y a un riche, il y a un pauvre et le pauvre, naturellement, n'est pas content et le riche non plus. Et comme le riche a généralement plus de moyens de s'exprimer que le pauvre, c'est le riche que l'on entend le plus. Mais c'est une réflexion purement personnelle et qui n'a rien à voir avec le sujet que je traite »…

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commentaires

D
<br /> Merci Jacques pour vos explications, et bravo pour ce que vous faites. <br />
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D
<br /> Dans le Bordelais il y a aussi des producteurs de lait et un certain nombre d'entr'eux ne savent comment ils trouveront à vendre leur production, l'espagnol Pascual arrêtant le ramassage après le<br /> 15 Avril. Je ne sais pas combien de producteurs sont touchés ni ce qui peut être envisagé. C'est peut être un casse tête pour Jacques, à moins que ces borde...laits ne soient pas assez nombreux<br /> pour les hautes instances de l'agriculture.  <br /> <br /> <br />  <br />
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J
<br /> <br /> 13 producteurs dont 11 autour  de Coutras soit 7 millions de litres... Comme il n'existe pas de service public de ramassage du lait en France la puissance publique ne peut que s'en remettre<br /> aux entreprises laitières pour collecter le lait de ces producteurs. Je suis à Bordeaux demain pour régler leur problème. J'ai déjà recasé 120 producteurs pour 35 millions de litres.<br /> <br /> <br /> Et dire que certains pensent que je me goberge et que je drague les minettes... <br /> <br /> <br /> et en plus j'écris ici <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />

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