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7 avril 2007 6 07 /04 /avril /2007 00:37

Quand je me suis éveillé, de la fenêtre grande ouverte, la lumière du fin du jour, tendre, portée par des caresses d'air marin venues du fleuve tout proche, m'emplissait d'images de Marie. Entortillé dans le drap je me sentais petit. Sali. Pourri. Mon corps pesait cent tonnes de bois mort. Assise à mon côté, vêtue d'un seul tee-shirt blanc, Sylvie lisait un magasine de filles. Me relever me paraissait une tâche insurmontable ; les mots aussi semblaient me fuir. Restaient mes mains, mandibules arythmiques qui tapotaient le drap froissé. Dans un effort monstrueux je tentais de relier le temps présent à ce que je venais de vivre. Tout s'embrouillait. Ma tête concassait des tronçons d'images, des bouts de phrases et l'obsédante chaleur des seins de Sylvie. Ange exterminateur au sourire ironique, Marie, l'immaculée me rejetait dans mes ténèbres extérieurs. La culpabilité, ce calice voluptueux et masochiste des catholiques romains, me recouvrait de honte. La main de Sylvie filait sur mon torse, tentante. Je la refusais en m'agrippant à son poignet. Forniquer sous le regard de Marie me révulsait. Et pourtant je bandais. Sylvie ramassait ses jambes sous elle, se libérait de mon emprise en me demandant " comment vas-tu grand fou ? "


C'est alors que je m'aperçus que je n'étais plus dans ma chambre, celle-ci donnait sur le quai. Rassemblant ce qui me restait d'énergie, je me hissais sur les coudes et Sylvie me calait le dos. Je grognai, " je morfle, c'est comme si on m'avait passé à la moulinette, j'ai du mal à recoller les morceaux..." Sylvie me caressait la nuque : " normal mon grand, tu étais ivre-mort. Tu nous a flanqué une sacré frousse. On t'a ramené ici dans un état pitoyable, tu râlais, tu délirais et tu semblais, par instant, vouloir cesser de respirer. Heureusement que je connais du monde. J'ai fait venir le docteur Hébert, un ancien client. Il t'a fait une piqure, nous a rassuré en nous disant que tu étais solide. Après, ton sommeil s'est apaisé. Sur le matin tu t'es mis à parler. Tu as l'alcool mélancolique. C'était beau. C'était plein d'amour. Des mots comme je n'en ai jamais entendu. J'en ai même pleuré. Pour te rassurer je me suis allongé près de toi. Tu dormais comme un bébé. Sur le coup de midi je suis rentrée chez moi. J'ai fait ma valise. J'ai laissé un petit mot à Bréjoux. Il comprendra. T'en fais pas je ne t'encombrerai pas. Tu n'es qu'un prétexte, ça fait quelque temps que je voulais partir. La vie de bobonne m'ennuie. Je me ferai toute petite. Et puis, même si tu me jettes, je ne retournerai pas avec Brejoux. Il est vieux, sa peau sent la mort. Je veux vivre..."  

 

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