Dans les travées de Vinitech il se murmurait que monsieur rapport, vous savez l'animateur d'un groupe stratégique pour horizon lointain et maintenant incertain, oui le chroniqueur un peu zinzin des petits matins sur la Toile, un type qui se dit le créateur d'un machin au nom américain, un truc imprononçable, un ThinksTank à l'appellation incontrolée " Sans Interdit ", serait la plume de... Oui de... C'est pas possible... Mais si on me l'a dit... Vous en êtes sûr ? Puisque je vous le dis qu'on me l'a dit... Des gens bien informés me l'ont assuré : il prêterait sa plume pour que notre divin nectar soit enfin reconnu à sa juste valeur là où il faut..
L'intéressé, informé comme il se doit par un journaliste, se contenta de sourire. On ne prête qu'aux riches, se dit-il dans sa petite Ford intérieure. Par bonheur, au lieu d'arborer la casaque (voir photo) dont il s'était vêtu à Vinisud, et qui avait fait jaser, plus sagement il s'était revêtu de son costume Kennedy bleu, bleu de l'encre bleue de notre enfance. Sur le grand écran du débat de l'après-midi, le coquet, bobo pour les uns, industrialo pour les autres, sans se soucier des rumeurs sur le fait qu'il serait la plume de..., animait. Il animait avec le brio qu'on lui connait un savant débat sur la réforme de l'OCM Vin. Désolé mais faut bien vanter la camelote pour qu'elle se vende, chers lecteurs.
Tout ça serait resté une petite brise de mer dans les branches de safafras si, revenant à la charge, un journaliste, prenant la chose très au sérieux lui déclara, quelques jours après, qu'il allait publier un écho sur cette importante nouvelle. Diantre, se dit-il, calfatons. Que faire ? Allait-il monter sur un tonneau pour démentir : " non je ne suis pas la plume de... " ? C'eut été stupide. Alors que fit-il, le bougre ? Très simplement, il rappela au journaliste son pedigree chargé, insista sur la couleur de sa casaque qui ne faisait pas de lui le leader du Giro, pointa son index sur son étiquette contenant toutes les mentions obligatoires qui lui avaient valu quelques déboires, même la splendeur d'un placard doré... Bref, qu'il ne fallait tout de même pas pousser le bouchon trop loin, que tout ceci était une affaire privée, que monsieur rapport avant d'être un écrivain public était un citoyen.
Je me doute que certains d'entre vous vont encore me reprocher que mon histoire de ce matin est aussi claire que du jus de boudin, codée grave, pleine de références aux gens d'en haut. J'en conviens volontiers mais je pense que vous comprendrez que si je nommais celle à qui je suis sensé prêter ma plume ce serait à la fois désobligeant pour elle, et trop flatteur pour moi. Comme le chante l'impayable Florent Pagny nul n'attentera à ma liberté de pensée mais sachons raison garder, tout plumitif que je fusse, je ne prêterai jamais ma plume. Je la donnerai, et comme le dit la contine donner c'est donner, reprendre c'est voler. A chacun sa plume, seules les idées comptent. Et là, je suis tout disposé à ce que mes vieilles idées, une fois recyclées - c'est mon côté faut pas gâcher - deviennent des idées neuves