Paris le 31 août 2006
Cher JR,
La nouvelle est tombée : vous partez ! Vous quittez la présidence du syndicat des vignerons que vous occupiez depuis une grosse poignée d'années. Combien ? Je ne sais... Ce dont j'ai souvenir c'est que président vous étiez lorsque je débarquai d'un avion d'Air Liberté, en plein été, juste avant que le raisin ne soit vendangé, dans votre pimpante cité au pied des Pyrénées. Vos collègues venaient tous de démissionner du Comité et, dare-dare, les gens haut-placés du cabinet me dépêchait pour tenter de vous proposer un traité de paix. Médiateur y m'avait baptisé. C'était la première fois que ça m'arrivait depuis que je suis né.
Sous les stocks vous crouliez, des petits prédateurs, des bradeurs patentés ne faisaient que vous énerver. Bref vous faisiez que vous chamailler, vous insulter, faire du courrier aux autorités et plein de procès et autres joyeuseutés. A mon arrivée aux côtés du fringant Bringuier vous étiez dans vos petits souliers. Moi j'étais très étonné de ce défilé dans l'antichambre du préfet. Tout le monde voulait me causer. Se faire psychanalyser. Les excités voulaient des têtes coupées que bien sûr je ne leur ai pas données vu que je suis né en Vendée et que là-bas c'est pas notre tasse de thé. Bref j'ai écouté. J'ai même engueulé votre banquier préféré. J'ai beaucoup proposé. Dissous le Comité. Vous ai demandé de prendre vos responsabilités. En un mot j'ai essayé de faire au mieux le boulot pour lequel j'étais mandaté. Le résultat n'a pas été à la hauteur des problèmes posés mais qu'est-ce j'y pouvais ?
Pour en revenir à vous de prime abord je vous ai trouvé un peu ébouriffé même si je dois avouer que ce que vous me proposiez ne m'a pas décoiffé. Je n'ai pas toujours saisi ce que vous m'expliquiez, c'était un peu alambiqué mais, comme je ne suis pas très éveillé, j'ai évité de vous contrarier. On a beaucoup réunionné. Même que vous m'avez, à plusieurs reprises, invité à causer dans vos assemblées. J'y suis toujours allé. Faire des discours m'a toujours botté. Et puis ça faisait plaisir au préfet de me voir pérorer. Au bout du compte on a piétiné et les problèmes ont perduré.
Et puis la roue a tournée. Je m'en suis allé dans d'autres contrées. J'en ai profité pour jeter sur le papier mes petites idées. La dernière fois qu'on s'est revu c'était le jour où votre voisin préféré du département d'à côté, une célébrité avec Ray Ban incorporé, m'a donné un bel exemple de sa fidélité à la parole donnée. Vous aviez l'air gentiment peiné. Rassurez-vous la terre ne s'est pas arrêtée de tourner. Ce qui compte pour moi c'est que dans votre département ké presque tout Aocé, un peu moins que le bordelé, j'ai noué de solides amitiés, des gens de qualité et de fidélité. Alors j'aime toujours y retourner.
Allez, cher président retraité, je vous fait mes amitiés. Chassez bien le sanglier et sachez que moi, le gratte-papier, j'aurais tant aimé voir sur les arpents du vignoble de votre beau département, plutôt que des ceps arrachés, les premiers signes de la prospérité retrouvée... Bon vent cher président...
Votre dévoué
Pour les non initiés je suis désolé pour les clés de ce courrier. Je vous promets de ne plus recommencer.