Sauf, bien sûr, à être beurré comme un Petit Lu, à toute heure du jour et de la nuit, ce qui, vous le savez, n’est pas notre philosophie de la vie à l’ABV, cette citation que certains attribuent à un journaliste belge, va comme un gant à une large part de ceux dont le regretté Coluche disait que « si on leur vendait le Sahara, dans cinq ans il faudrait qu’ils achètent du sable ailleurs. » Cependant, afin de ne pas nous dédouaner de notre propre connerie, je me réfère à « L’autopsie de la connerie » de Denis Faïk, une chronique très complète et très savante publiée le 30 janvier 2009
« Quand on a défini un con, alors on a l’illusion d’être soi-même prémuni. La « cible » donne le sentiment que nous sommes en face d’elle, donc hors du champ de la connerie… »
Afin de bien cerner le champ de la connerie, de ne pas s'en exclure car, comme le fait justement remarquer Frédéric Dard «Traiter son prochain de con n'est pas un outrage, c'est un diagnostic » je vous livre quelques extraits de cette chronique.
« Un con, en effet, ne tire aucune conclusion de son échec et continue. Il persévère dans son comportement, de même que l’attitude dogmatique fixe l’individu dans une croyance constante qui le met complètement à l’écart des faits […]
La connerie est une insistance établie que rien ne peut déstabiliser […]
Un con a tendance à généraliser : il élargit son ego au reste du monde, pensant alors que chacun doit penser et agir comme lui.[…]
L’ego, trop fort, finit dans la psychorigidité. Têtu, il ne bouge pas d’un iota. Mais parfois le nombril est trop petit, alors un con, loin d’être enraciné, flotte aux quatre vents, il change sans cesse d’avis, prêt à suivre les propos du premier beau parleur venu. C’est alors sans doute dans les extrêmes que l’on trouve le plus de cons. […]
S’il fallait une devise à la connerie, celle-ci lui irait à ravir : Un point c’est tout. Un point c’est tout’désigne que tout l’Être est dans le jugement énoncé et qu’il est alors impossible de rajouter quelque chose. ‘Un point c’est tout’ signifie en d’autres termes : « Taisez-vous ! » j’ai « métaphysiquement » raison. Or cela va de pair le plus souvent avec une certitude suffisante, arrogante, dédaigneuse, méprisante.
Le con est un gros-plein-de-satisfaction : « Avez-vous réfléchi quelque fois (…) à toute la sérénité des imbéciles ? La bêtise est quelque chose d’inébranlable, rien ne l’attaque sans se briser contre elle. Elle est de la nature du granit, dure est résistante. » (Flaubert, Lettre à Parain, 6 octobre 1850). »
Fort bien, mais pourquoi diable m’en prendre une nouvelle fois à ces « pauvres dégustateurs » pas à tous d’ailleurs, qui n’aiment rien tant que de se référer à la fumeuse « typicité » et de condamner à mort des vins qui selon eux ne sont pas dignes de faire partie de la famille, serait-ce de l’acharnement malsain pour gonfler mon tirage ?
Nullement, je n’ai aucun goût pour ce type de pratique et je ne tire ni sur les ambulances ni sur qui ou quoi que ce soit. À l’image du petit peintre de la marque Valentine je me démultiplie pour tenter de faire barrage à ceux qui vont contre l’esprit de la réforme en s’accrochant comme des chancres à leurs mauvaises habitudes et leurs vieux réflexes. N’oublions pas que c'est dans le plan d'inspection qu'il faut définir la place et le rôle que l’on veut donner à cette commission de dégustation.
Le problème ubuesque de la situation actuelle c'est que beaucoup d’OI se retrouvent à ne faire pratiquement que du contrôle produit parce qu’ils n'ont encore ni plan d'inspection, ni de cahier des charges. Alors que l'esprit, et même la lettre, de la loi privilégiaient les contrôles plus importants en amont, revenant en cela à la philosophie de l’appellation d’origine contrôlée, au respect des fameuses conditions de production, dans la pratique certains font exactement le contraire avec le risque de voir se professionnaliser la dégustation. La directive du CAC est claire cette commission de dégustation doit être composé de différents collèges. Donc, si vous m’avez bien suivi, beaucoup de décisions de suspension du bénéfice de l'appellation sont à ce jour juridiquement mal fondées et ne résisteront pas à un recours devant le tribunal administratif.
Le problème c’est que pendant ce temps-là, des vignerons ou des vigneronnes en butte à ces décisions couperets se trouvent confrontés à des situations économiques et commerciales qui peuvent prendre des tours dramatiques. En effet, détail d’importance, ces vignerons sont des chefs d’entreprise qui vendent et exportent leurs vins à des clients qui les ont dégustés et appréciés. Qui s’en soucie ? Il est vrai que la situation économique est en ce moment un long fleuve tranquille, les banquiers sont sympas, les clients empressés, les consommateurs euphoriques et que je suis un « emmerdeur » qui s’occupe de ce qui ne le regarde pas. De qui se moque-t-on ? Des hommes et des femmes qui n’entrent pas dans les clous, ceux-ci étant par ailleurs inadaptés à ce que doit être un vin d’AOC.
Ces pratiques sont des insultes à l’intelligence. Elles font de nous la risée de tout ce qui compte dans le monde du vin dans notre vaste Monde. Que par 5 voix contre 4 des « censeurs étriqués» puissent faire jeter au caniveau un vin sélectionné par ceux qui font que ce vin existe, c’est-à-dire qu’il soit acheté, proposé, vendu, bu et apprécié, ça dépasse l’entendement. Le concept de connerie touche là des sommets himalayens, à la différence près que ceux-ci sont beaux alors que dans le cas présent nous pataugeons dans la médiocrité.
Moi je le dis tout net, même si comme l’écrivait le regretté Desproges « Dieu est peut-être éternel, mais pas autant que la connerie humaine. » je suis assez con, mais je me soigne, pour continuer de croire que l’intelligence triomphera un jour de la connerie et que Jean-Pierre Amoreau, dont le Château le Puy, un Côte de Franc, est cité comme le « choix de Dieu » dans le Manga « Les Gouttes de Dieu », passe à la télé japonaise, pourra se sortir du pétrin où certains « dégustateurs » l’ont précipité en retoquant ses 2005 et 2006 en Vin de Table. « Il faut sauver le soldat Amoreau » vigneron d’une famille vigneronne de père en fils depuis 1620, et bien aux actes les citoyens !
Cette chronique écrite je suis sorti et en passant à la Madeleine je suis entré chez Lavinia. J'aime aller humer la cave des vins rares et fragiles au sous-sol. Là, sur la gauche, sur plus d'un mètre linéaire : que du Château le Puy, des vieux millésimes, des grands flacons aux noms qui me fascinent : jéroboam, nabuchodonosor... : impressionnant ! Mon petit doigt me dit que les ventes Château le Puy sont l'un des plus beaux chiffres de Lavinia, en France comme à l'export, comme c'est étrange ! La première réflexion que je me suis faite : est-ce qu'un jour 4 ou 5 petits mecs dans un labo retoqueraient un Latour ?
Hilarant ! Vin de Table ! Cuvée François Pinault !
Je ne galèje pas car, là, sous mes yeux, toute petite, elle est là, orpheline, la bouteille cuvée Marie-Cécile 2006 Vin de Table qui est un Château le Puy privé de son nom. Entre nous je trouve l'affaire plus que saumâtre. C'est une mise à mort que de priver "de jure" une entreprise de sa "marque", de son identité. Intolérable ! Quand on pense aux agréments à la Bordelaise qui ont amené certains, lors de la dernière crise, à demander la distillation, même le père UBU trouverait que c'est ubuesque. Proposition iconoclaste : et si on faisait une vidéo des conditions de la dégustation que l'on pourrait visionner en cas de litige ?
Pour ceux qui, comme moi, aimaient Alain Bashung, une chronique de nuit avec paroles et musique :
« Un jour je parlerai moins, jusqu'au jour où je ne parlerai plus » Bashung Alain parti sans laisser d’adresse… l