N’en déplaise à notre orgueil national, nous qui sommes très naturellement portés à donner des leçons au reste du monde qui, bien sûr, ne comprends rien à notre génie, nous faire remettre à notre place par un pays voisin, petit par la taille, mais singulier par son positionnement géographique, sa neutralité et son mode de fonctionnement démocratique, participe à une forme de thérapie salutaire. Sans partager le sentiment des déclinistes, ni entonner les antiennes des adulateurs d’une mondialisation heureuse et encore moins enfourcher les canassons épuisés de l’ultra-gauche, je fais parti de ceux qui pensent que notre vieux pays, s’il veut bien lutter contre ses vieux démons, puiser dans la vitalité de sa jeunesse, s’appuyer sur une natalité extraordinaire, tirer parti de l’expérience des papy-boomers, possèdent de beaux atouts pour relever les défis de cette crise de notre modèle de consommation. Le nouveau président des USA, Barak Obama, sans être le sauveur du monde annoncé par la gente médiatique prompte à s’enthousiasmer, l’a bien compris pour son pays hyperpuissance mondiale si longtemps sûre d’elle, dominatrice, mais aujourd’hui en mal de nouveaux ressorts de croissance.
Toute proportion gardée notre beau secteur du vin s’est vécu lui aussi, depuis ces 30 dernières années, comme l’hyperpuissance du monde du vin. Nous étions détenteurs au travers de nos GCC, du Champagne, du Cognac, de notre beau système des AOC, de nos scores importants et réguliers de grand pays exportateur, de tous les attributs de la domination sans partage. Notre condescendance doublée d’un sentiment d’insubmersibilité nous empêchait de voir, qu’à nos portes, sur les terres de la perfide Albion, des barbares nous bousculaient sans vergogne. Au Vinexpo de 2001 c’était flagrant mais, écrire ce que j’écrivis, dans le mois qui suivit, relevait, pour beaucoup de dirigeants du secteur, d’une forme de dénigrement national. Bref, nous avons pratiqué la politique de l’autruche. Pour autant, alors que nous cinglons vers cette fameuse année 2010, pour laquelle nous avions eu l’outrecuidance de la donner pour Cap, notre capacité de rebond reste entière. Alors, que ceux qui n’ont rien vu, rien entendu, rien compris, prennent un peu de leur précieux temps pour lire ces quelques lignes d’une plume valaisanne, donc provenant de cette petite Suisse, si proche mais si lointaine de nous. Pour nos voisins nous sommes des gens situés à « l’ouest du Jura », une gentille remise à notre place. Bonne lecture.
France: le déclin de l’hyperpuissance du vin
In Valais Vins Com « la vinothèque de référence pour réaliser la cave de vos rêves »
Précision apportée par un lecteur suisse : " Le rédacteur de l'article en question est mon ami (vaudois) Alexandre Truffer, journaliste (Fijev CH) et webmestre du site www.romanduvin.ch Site sur lequel est paru bien naturellement cet article (et bien d'autres.)" Ne vous privez pas d'aller à la source lire ce qu'écrit Alexandre Truffer.
« A l’instar des Etats-Unis sur le plan politique, la France a mérité longtemps le statut d’hyperpuissance du monde du vin. Souvent admirée, toujours copiée, fréquemment jalousée, parfois raillée, notre voisin cumulait les records. Premier producteur, premier exportateur, régions les plus renommées, diversité inégalée, taille du patrimoine, inventivité. Malgré quelques chausse-trappes comme le Jugement de Paris, vin prenait une majuscule lorsque l’Hexagone était concerné. Des oiseaux de mauvais augure annonçaient bien un déclin, relevant l’évolution des pays concurrents et détaillant tous les maux –réels ou supposés- accablant le vignoble gaulois. Aujourd’hui, les chiffres confirment que la malédiction de Cassandre n’est pas de susciter l’incrédulité mais bien d’avoir raison.
Après avoir perdu sa place de premier exportateur en volume de vin au monde face à l’Espagne en 2005, la France recule encore d’un rang et laisse la médaille d’argent à l’Italie en 2008. Les Transalpins, encore, s’emparent de deux autres premières places mondiales : la production et la consommation. Le millésime 2008 n’a donné naissance qu’à, entre guillemets, 485 millions de caisses de bouteilles chez notre voisin de l’ouest, alors qu’au sud des Alpes 552 millions de caisses ont été produites sur la même période. Ces chiffres proviennent d’une étude réalisée pour Vinexpo par une société britannique IWSR. Deux consolations toutefois: concernant la valeur des crus exportés, la France reste numéro un et la baisse de consommation de la clientèle nationale devrait s’atténuer aux alentours de 2012 date où les Etats-Unis boiront plus de vin que la France. A noter que d’ici 2012, la production devrait augmenter de 4% au niveau mondial et la consommation de 6%.
Plus étonnant encore que ces chiffres qui peuvent s'interpréter à loisir, le désamour que, à l’ouest du Jura, on professe pour le nectar de Bacchus. Un peu partout sur la planète, les consommateurs de bière et les buveurs d’eau se tournent vers la dive bouteille : Les New-Yorkaises des séries hollywoodiennes passent leur temps dans des œnothèques branchées à siroter Chardonnay et Pinot Noir. Indiens et Chinois aisés se passionnent pour les grands crus. Aux Japon, un manga avec la Bourgogne pour personnage principal fait figure de best-seller. Le Portugal s’efforce de traiter le vin non comme une boisson alcoolisée mais comme un produit culturel. En France, rien de tel: une étude du Credoc, le Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie à montré qu’une majorité de Français perçoit désormais le vin comme un produit à risque pour la santé. Un peu moins nocif que la charcuterie, nos voisins le considèrent plus néfaste que la viande, le beurre ou les fromages au lait. En cinq ans cette enquête a montré que les avis négatifs sur le vin ont passé de 24 à 53%. Selon les conclusions du Credoc –qui relève également que le vin s’embourgeoise- celui-ci est désormais «reconnu pour ce qu’il est, à savoir une boisson alcoolisée, un produit à risques, à consommer avec modération.»
Chers lecteurs, je vous recommande très vivement de lire le N°44 de ma Wine News sous la rubrique PAGES (colonne de droite du blog) intitulé : " La viticulture familiale est-elle la seule garante de la qualité ? " Très français comme débat... Commentaires obligatoires !