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9 décembre 2008 2 09 /12 /décembre /2008 00:05

La scène se passe dans un cabinet médical, le praticien après avoir examiné une radio, hilare, s’adresse à son patient, assis sur la table d’examen, en caleçon et chaussettes : « Une excellente nouvelle, monsieur Ribot : vous n’êtes plus hypocondriaque, vous êtes VRAIMENT malade ! »

 

C’est le dessin de Bouchard dans le dernier numéro du POINT. Dans ce même numéro, le psychanalyste Jacques-Alain Miller décrypte le paradoxe de l’homme occidental qui, «n'a nourri autant d’angoisses, ni vécu aussi longtemps. »

 

Extraits sous forme de 3 Questions :

 

Le Point : Pourquoi, dans nos sociétés occidentales, la peur semble-t-elle progresser plus qu'ailleurs ?

 

Jacques-Alain Miller : Parce que ce sont les plus « technicisées ». Le sociologue Ulrich Beck l'a montré, la technique donne naissance à une « société du risque » : quand vous vous déplacez à cheval, tout dépend de votre habileté à vous, et de votre connaissance de la bête en question ; quand vous prenez l'avion, votre sécurité est hors de vous, car votre vie dépend d'un réseau de systèmes complexes, auxquels vous devez vous fier a priori. Mais la société du risque devient une société de la peur dès que la science cesse d'inspirer confiance. C'est le cas aujourd'hui : chacun est intimement persuadé que le grand « sujet supposé savoir » ne sait pas tout, qu'il est troué comme un gruyère, et qu'il avance et produit à l'aveugle.

 

Le Point : Nos sociétés n'acceptent le risque qu'à condition de le quantifier...

 

Jacques-Alain Miller : En effet. Le sujet supposé savoir est maintenant mis au défi de prévoir l'avenir. Demain, vos maladies, on n'en fera plus seulement le diagnostic, on vous les prédira à partir du décryptage de votre génome. D'où l'émergence de nouvelles peurs, inédites, purs produits du calcul statistique.

 

Le Point : Notre santé, et en particulier notre alimentation, nous préoccupe le plus. Comment expliquez-vous cette peur ?

 

Jacques-Alain Miller : C'est ce qui résulte de la « mise en sécurité » comme attitude fondamentale de l'homme contemporain. Chacun est à lui-même son bien le plus précieux. Chacun se rapporte à soi-même comme à un objet, à un avoir, non à un être. L'impasse, c'est que la santé est parfaitement aléatoire. Il n'y a pas de science de la santé, disait Canguilhem, l'épistémologue de la biologie. La santé, c'est un mythe."

 

À mettre en parallèle avec l’enquête du Credoc qui révèle que 51 % des Français considèrent le vin comme le deuxième produit présentant des risques pour la santé, juste derrière la charcuterie. Cote en chute libre : en 2003, seuls 26 % des habitants de l’Hexagone avait cette perception négative du vin. « Hier produit du terroir, symbole de l’identité gastronomique française, le vin est désormais considéré comme un produit alcoolisé comme les autres », souligne le Credoc. Et il suscite la méfiance au même titre que n’importe quelle boisson alcoolisée… Pourquoi diable ce quasi-doublement en 5 ans ? Bien sûr, je n’ai pas de réponse, mais il est paradoxal que cette peur intervienne alors que le vin quotidien laisse de plus en plus la place au vin occasionnel. Boire moins, boire mieux, disait-on, mais ces nouveaux consommateurs, plus soucieux de leur forme, de leur santé que leurs aînés, placent le vin dans la palette des produits alcoolisés. Cette perception nouvelle devrait faire réfléchir ceux qui pensent que, face aux antialcooliques, le bon discours est celui du vin est bon pour la santé. Dans la mesure où le vin aliment est en voie d’extinction il me semble que ces conseils ne convainquent pas grand monde. En adoptant cette stratégie de bon contre mauvais on entre sur le terrain des conseils de santé publique, aussi généraux qu’inefficaces car ils ne sont pas ciblés sur des populations précises.

 

Pour ma part, en me fondant sur la définition de la santé donnée par le Robert : « bon état physiologique d’un être vivant ; fonctionnement régulier et harmonieux de l’organisme pendant une période appréciable, indépendamment des anomalies ou des traumatismes qui n’affectent pas les fonctions vitales (un aveugle, un manchot peuvent avoir la santé). La santé correspond à une idée de la norme (opposée à la pathologie) ; elle n’est pas seulement l’absence de maladies, de symptômes pathologiques, mais suppose l’absence de menace prévisible et un certain bien-être physique. » et celle de la santé publique : « l’ensemble des techniques propres à prévenir les maladies, à préserver la santé, à améliorer la longévité des individus par une action collective. » la seule voie possible est celle de s’en tenir au produit, le vin, à ce qu’il est, d’où il vient, comment il est fait et affirmer, avec la plus grande tranquillité, sans mauvaise conscience, qu’il n’est pas en soi dangereux ni pour la santé des consommateurs, ni pour la santé générale des populations. Jouer sur les peurs, en les amplifiant ne fait que développer le caractère anxiogène de nos sociétés craintives et, comme le dit Jacques-Alain Miller, « une peur en chasse une autre, il y a des peurs à la mode, on invente des peurs, le public demande de la peur. Mais ce n’est pas un jeu, c’est, en deçà, de ces peurs multiformes et toujours renaissantes, ce qu’elles expriment et camouflent à la fois : une angoisse sociale diffuse et dont l’objet est voilé. »

 

À propos mais où est donc passé le prion qui devait faucher, selon certains grands experts, « plus de 100 000 personnes » ? Plus légèrement, j’entends en boucle « qu’il faut manger des féculents… » c’est-à-dire des patates, des pâtes, du riz… et dire que pendant des décennies les mêmes nous mettaient en garde contre… Alors, comme tout bien portant est un malade qui s’ignore, de grâce laissez moi vivre ma vie comme je l’entends, jouir des plaisirs qu’elle m’offre, même si ça trouble vos statistiques, même si je suis un bon cotisant de la Sécu, car j’ai, comme nous tous pauvres humains, une seule certitude, même si en ce monde de peureux « on rêve de faire descendre l’éternité sur terre », c’est celle de mourir.

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commentaires

D
A ce propos, voir le papier de Sébastien Durand Viel, "Le retour du vin médecin" sur www.eccevino.com<br /> <br /> amicalement<br /> David Cobbold
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