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14 octobre 2008 2 14 /10 /octobre /2008 00:01

Le titre de ma chronique, volontairement provocateur, est extrait d'un "Abécédaire gourmand", où, à la lettre V : "Vin de Champagne" Michèle Gazier, née à Béziers, ancienne critique littéraire à Libération puis à Télérama, nous conte une expérience enfantine. C'est publié chez NiL éditions dans la collection Exquis d'écrivains. C'est un beau petit livre. J'adore les petits livres que l'on peut glisser dans sa poche pour pouvoir les lire à tout moment en tout lieu : banc public, terrasse de café, métro, file d'attente... J'en fais une moisson à l'humeur, à l'odeur, au coup de coeur... comme pour les vins je suis un peu folâtre, insoucieux des conseilleurs, picoreur, découvreur, simple amateur... j'avoue préférer me tromper que d'être moutonnier... plaisir suprême et orgueilleux que de croire être le premier... en amour c'est l'extrême rareté mais l'imaginaire a ce privilège de pouvoir s'inventer des mondes...

Je dédie ce beau texte aux ayatollahs de l'ANPAA et à la cohorte des "n'y touchez jamais..."

" Lorsque je vois ma petite fille (deux ans) tremper son doigt menu dans tous les verres de champagne, puis le sucer avec délices, je ne m'interroge plus sur les mille et une facéties de l'hérédité. J'ai pris ma première cuite à cinq ans, au champagne, en finissant les verres de mes voisins de table indifférents à ma soif et à mes cris à boire de moins en moins convaincus. Au fil des heures, boire n'était plus mon problème, j'avais trouvé d'autres sources que l'eau ferrugineuse à laquelle on m'avait vouée.
Ce déjeuner de fête se célébrait au champagne, j'étais la seule enfant à table, mes parents étaient loin de moi et la jeune femme qui devait me surveiller s'occupait plus des messieurs qui lui faisaient les yeux doux que de ma sage petite personne. Plus je buvais, plus j'avais soif et plus je me sentais des ailes. J'avais conscience de m'enivrer et ce sentiment de l'ivresse me rendait follement joyeuse. Soudain, dominant le brouhaha des conversations, j'ai crié très fort et non sans fierté : " Maman, maman, je suis soûle, je suis soûle." Rouge de honte, ma mère est venue m'arracher à la table, aux convives rigolards et surpris pour me porter dans mon lit où je me suis endormie dans un formidable éclat de rire.
Il n'est pas de déraison sans raison, et ce jour-là, j'ai brûlé les étapes et atteint cet âge dit de raison deux ans avant la date conventionnelle de sept printemps. Le champagne m'avait fait vieillir prématurément.
A la suite de cette brève aventure, j'ai longtemps été interdite de dîner de fête et de vin blanc. Mais, pour lutter contre une anémie qu'on croyait déceler dans ma pâleur native, ma grand-mère versait parfois deux doigts de rouge dans un verre qu'elle additionnait d'eau et de sucre. J'avais le droit, voire le devoir, d'y tremper un boudoir que l'on appelait...champagne.

J'ai toujours détesté ce biscuit pour le sucre cristallisé qui le recouvre et agace les dents, et pour le mensonge d'un nom qui ne tient pas ses promesses. Les champagnes au vin rouge étaient une sorte de punition infligée à la fillette frêle qui un jour avait bu sans modération.
Je continue à aimer le champagne. J'aime la finesse des bulles, le contact délicat du vin qui pétille doucement sur la langue. La légèreté et l'euphorie très douce qui suivent deux ou trois coupes. J'aime le champagne des fêtes mais surtout celui de l'intimité.
Avoir toujours une bouteille de champagne au frais était un rêve d'étudiante sans le sou. L'achat d'un bouchon hermétique et un travail salarié correct on fait le lien entre rêve et réalité. Boire une coupe avec l'être aimé, pour fêter le simple plaisir de se retrouver chez soi au terme d'une journée bien pleine en écoutant de la musique sans paroles demeure un bonheur jamais éventé."

 

Achetez ce petit opus, comme moi, adorateur des pâtes - la lettre N décline le grand bonheur des Nouilles en l'occurence les coquillettes, vous y trouverez de quoi raviver vos souvenirs d'enfants. Bonne lecture...

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