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10 mars 2008 1 10 /03 /mars /2008 00:02

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Au temps, c'était en 1986, où je passais mes jours sur les rives enchanteresses du merveilleux port de pêche de Gennevilliers à mettre du vin en bouteilles – des 6 étoiles et des verres perdus – à le distribuer avec mes petits camions dans le Grand Paris, à discuter avec les syndicats de notre avenir, à ferrailler avec mon PDG et sa cour pour obtenir le financement de mes investissements, le soir venu, fourbu, je rentrais chez moi à Courbevoie. J’avais acquis, en ce lieu merveilleux, sur une dalle de béton recouvrant un complexe commercial érigé sur l’emprise de l’ancienne caserne Charasse, un atelier d’artiste. Il y en avait une douzaine face à une barre UAP, c’était un ilot ignoré, calme et paisible, comme une anomalie dans un urbanisme dévoyé. Sous mes 6 mètres de plafond, comme dans une grosse bulle, je décompressais. Dans ce havre au parfum new-yorkais, mon vin quotidien était le Pontet-Canet. À la holding, Th. Jacquillat, se faisait livrer du « Vieux Papes » en magnum et moi je carburais au Pontet-Canet. Pourquoi diable me direz-vous ? L’histoire vaut d’être conté.
 
Dans l’enceinte de notre « usine » de Gennevilliers, en retrait du bloc de béton où nous embouteillions et stockions nos produits, un hangar anonyme, qui ne payait pas de mine, semblait être posé là comme une verrue sur un gros pif. Son appellation officielle « les eaux minérales » ne laissait en rien présager de la réalité de son contenu. Le lieu était bouclé. Les clés en ma seule possession avec un double pour le patron des achats. La première fois que j’y ai pénétré, c’était à la fin de l’été, je fus frappé par la sensation de fraîcheur : le lieu était bien isolé. Très vite j’en compris la raison : c’était le paradis de la caisse bois, une caverne d’Ali Baba de grands crus bordelais avec, entre autre, un stock étonnant de Léoville-Las-Cases, d’Ormes-de-Pez et de Pontet-Canet. On me dit que pour ce dernier longtemps propriété des Cruse, la raison de notre richesse s’expliquait : Cruse était maintenant dans l’escarcelle de la SVF (lors d’un déplacement à Bordeaux j’ai le souvenir du 124 quai des Chartrons).
 
Bref, l’ignare que j’étais se plongeait le soir même dans sa bible « L’encyclopédie des vins et alcools » d’Alexis Lichine. J’y appris l’essentiel, son voisinage avec Mouton, son classement de 1855 : en tête des cinquièmes crus, l’ampleur de ses caves souterraines et son rachat en 1976 par Guy Tesseron. Lichine le disait « parfois très distingué, lent à vieillir. Et d’autres années plutôt commun.» De retour sur les quais de mon ravissant port de pêche, je goûtais je ne sais plus quel millésime, je l’appréciais et l’adoptais (en l'achetant bien sûr, un prix qui rendrait vert les amateurs actuels). Ainsi je devins un « Pontet-Canet » addict.
 
Bien sûr, en ce temps-là, et aujourd’hui encore, je suis tout, sauf une référence pour les maîtres en dégustation, et j’entends déjà leurs ricanements : comme l’avait écrit un internaute, en 2001, à la suite de mon rapport : "Comment accorder un quelconque crédit à un gus qui a mis du « Vieux Papes » en bouteille ! " D’accord, j’en conviens, mais si j’ai pris la liberté de commettre cette petite chronique ce matin pour conter ma découverte du Château Pontet-Canet, ce n’est pas pour rouler des mécaniques, simplement pour vous dire que l’autodidacte que je suis dans le domaine des vins lui doit beaucoup. Il a été le pied de cuve de mon imaginaire, le point de départ d’une relation intime avec le vin et, je l’avoue sans honte, il épousait bien l’évolution de mon statut. Depuis, sous l'impulsion d'Alfred Tesseron mon chouchou est devenu un must, alors à défaut d'avoir du nez pour la dégustation j'en ai pour découvrir les pépites qui font les beaux joyaux.

Avant d’écrire cette chronique je suis allé faire un tour sur le site du château  pour rafraîchir ma mémoire et c’est avec plaisir que j’y ai découvert « Reine, Babette et Kakou, trois chevaux de race bretonne, qui viennent d’arriver à Pontet-Canet dans le but de cultiver la vigne.
 
C’est une véritable révolution dans la propriété.  Aujourd’hui, nous ne savons plus mener les chevaux. Il faut tout réapprendre et tenir compte du caractère et de l’humeur de chaque cheval.
 
Ce n’est pas un retour en arrière, ni la recherche d’une vision folklorique mais un véritable pari sur l’avenir qui nous oblige à adapter le travail du cheval aux contraintes modernes. 
 
C’est évidemment un challenge qui nous rapproche davantage de la nature et qui nous permet d’aller encore plus loin dans notre politique de respect des ceps de vigne et de notre terroir.
 
Si nous réussissons, nous envisagerons, petit à petit, d’agrandir nos écuries. Mais c’est une autre histoire… »
 
Le fondateur de la Journée Nationale du Cheval que je suis ne pouvait que s’en réjouir. Dans la foulée j’ai sollicité Alfred Tesseron pour un Trois Questions à… et très aimablement il a accepté de répondre à mes questions.
           
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