En ces jours de préparation des fêtes de fin d’année, je n’ai pu résister à vous servir ce méli mélo de lieux communs, j’adore ! C’est la quintessence du creux, un ensemble vide plein des petits riens de ceux qui se prennent pour l’élite. C’est sous la plume de Marie Varroud-Vial – une consœur de ce cher Gurvan Le Guellec déjà cité comme expert es-bobo – dans l’un de ces suppléments papier glacé, bourré jusqu’à la gueule de pub de luxe, dégoulinante de clinquant, de faux chic, pour moi le pic de l’indécence, que chaque magazine nous gratifie à la veille de Noël. Dans le cas présent c’est le Nouvel Ob’s et ça frise le foutage de gueule. A lire absolument, chers lecteurs, car ces petites bêtes décrites avec complaisance picolent !
LA GAUCHE CAVIAR
Coincée entre Sarkozy et un PS à la dérive, la gauche caviar se retient très fort de ne pas caler ses pas dans les pas de Bernard Kouchner, un de ces anciens membres. D’ailleurs, depuis la mort de François Mitterrand, sous le règne duquel la gauche caviar a pris son envol, elle est quasiment une espèce en voie de disparition. Pas facile…Mais elle n’est pas du genre à se laisser gagner par le blues. Au pis, elle demandera l’asile politique au maire d’Ars-en-Ré. Et si, elle ne se marre plus forcément avec Guy Bedos, elle se bidonne désormais avec Gad Elmaleh. Après ça, il faut se pousser un peu pour crier au scandale contre les quotas, les tests ADN, l’immigration choisie. Heureusement qu’il y a les enfants, les bobos, pour rappeler que « quand même, ça craint… »
Ils aiment toujours : « les enfants du Paradis » de Marcel Carné. Ils écoutent Arthur H et Tom Waits. Ils s’habillent chez : depuis que Cécilia a capté le style Prada, ils ont découvert Marc Jacobs et Marni. Même si madame Prada, l’ex gauchiste fan d’architecture et d’art contemporain, reste leur héroïne. Ils lisent : l’intégrale de Patrick Modiano. Ils se détendent à la FIAC, car « ils ont débuté une collection ». Ils partent : faire du trekking en Mongolie. Ils y achètent du cachemire (brut, vrai, chic). Et sinon thalasso. Ils picolent : du champagne. Ils s’informent : avec « Télérama », surtout pour les pages ciné. Et le « Monde ». Et dans les dîners, ils adorent dire que « le Figaro n’est pas si mal. Surtout les pages étranger… ». Ils tapotent : sur un BlackBerry. Ils aiment : Bernard-Henry Lévy. Même si parfois ils le détestent. Comme dans toutes les histoires d’amour. Les BOBOS
Le bobo, c’est l’ennemi public numéro un. Personne ne l’aime, tout le monde s’en moque. A commencer par Renaud, qui en a fait une chanson. Trentenaire branché et bien-pensant, il fait les élections (à Paris notamment, où les municipales se jouent avec sa carte d’électeur) et décide de l’air du temps. Il porte du coton bio issu du commerce équitable, mais s’approvisionne chez Monoprix (son commerce de proximité) en cachemire à moins de 100 euros. Il laisse ses enfants se rouler par terre en mettant en avant leur épanouissement et passe des heures à lui cuisiner des ratatouilles bio. Parce que bien manger aussi, c’est une éducation. Pénible et sympa, aussi prévisible que généreux, le bobo horripile souvent. Mais il inspire aussi beaucoup de tendresse. D’autant qu’il n’y a pas un bobo, mais des bobos. Des altermondialistes militants aux écolos pop en passant par les modeux du Marais et les branchés de l’Est parisien… Il y aurait même des bobos de droite.
Ils aiment toujours : « Virgin Suicides », de Sofia Coppola. Spleen adolescent + belles images = cocktail parfait. Ils écoutent : Devendra Banhart, le seul type androgyne, écolo et folk. Ils s’habillent chez APC, Miu Miu, Gap, American Apparel, Charles Anastase… Partout en fait. Ils adorent s’habiller. Ils lisent : « Cendrillon », d’ERIC Reinhardt ; Ils se détendent : en prenant des cours de cuisine thaïe le mardi soir. Ils partent : au Bhoutan, ils en rêvent… Sinon dans une île près de Stockholm. Pour réconcilier deux passions / Bergman et la marque de jeans suédoise Acne. L’acmé du denim. Ils picolent : de la manzana. Ils s’informent avec : « les Inrocks » et « Libération ». I>Télé et internet, France Inter et « on refait le monde » sur RTL, rue 89 et le site du « New York Time ». Ils s’informent. Ils tapotent : ils ne tapotent plus. Ils se servent du pouce pour envoyer des textos et changer les titres de leur iPod. Ils admirent : ils le disent à demi-mot mais ils a-dorent Bertrand Delanoë, le petit prince des Vélib.
Les INTELLOS
A priori, les intellos, les purs et durs, ne sont pas des gens dans l’air du temps. Quand ils lèvent le nez des livres de Peter Sloterdjik et qu’ils jettent un œil sur ce qui se passe alentours tout les atterre. Ils sont scandalisés par la médiatisation des déboires du couple Sarkozy. Ils ne comprennent pas non plus pourquoi leurs enfants, pourtant biberonnés à la culture, la vraie, restent scotchés devant « Nouvelle Star ». Julien Doré ? Ce n’est pas leur came. Ils ont passé leur année à hésiter entre le Modem et le PS, pour finalement suivre le PS, pour la beauté du geste. Vous avez dit ringards ? Pas vraiment. Car les intellos de la génération quinquas-velours-côtelé sont rejoint par Nicolas Demorand sur France Inter, et Ali Baddou, la superstar de France Culture. 100% philo, archinormaliens, ces deux-là et leurs copains réhabilitent les intellos. En leur donnant la touche d’impertinence, un je ne sais quoi d’air du temps qui leur manquait. Ce sont les trentenaires-velours-milleraies.
Ils aiment pour toujours : « La maman et la putain », de Jean Eustache. Ils écoutent : Jean-Louis Murat. Ils s’habillent chez : ça dépend des âges. Au-dessus de 50 ans, chez Arnys. Au-dessous de 40 ans, chez APC. Ils lisent : « Histoire de la laideur » d’Umberto Eco, et s’accordent un polar en vacances. Ils se détendent : en allant à des conférences. Ils partent : à Saint-Malo… et ils en profitent pour aller sur la tombe de Chateaubriand. Ils picolent : du Bergerac. Ils s’informent avec le « Monde ». Ils tapotent : sur la touche de la télécommande d’un magnétoscope… Oui avec des VHS. Même si Nicolas Demorand a sans doute un lecteur de DVD. Ils admirent : Pierre Bourdieu. Et des dizaines d’autres.