Sur le chemin de l’école, dans un jardin en contrebas, des cerisiers nous narguaient, nous tentaient, nous invitaient au péché de gourmandise. Ironie de l’affaire, ce jardin était situé face à la maison bourgeoise de l’instituteur laïc, considéré par les grenouilles de bénitier comme la quintessence du diable.
Nous portions en ce temps-là des culottes courtes, de nos jours ce sont les filles, qui exposent en des shorts leurs longs compas au Dieu soleil, et des chaussettes. L’escalade du tronc nous éraflait les cuisses mais le plaisir de la chair juteuse des cerises nous faisait ignorer ces désagréments. L’un d’entre nous se postait en guetteur, nous le rétribuions en nature en remplissant les poches de nos blouses de cerises pour lui. Nous ne nous sommes jamais fait prendre la main dans le sac, si je puis le dire ainsi.
Des cerises il y en avait à profusion dans le jardin du pépé Louis, un immense cerisier couvert de petites cerises rouges acidulées dont je me goinfrais à califourchon sur les immenses branches, et un cerisier de taille plus modeste, plus tardif, produisant de grosses cerises blanches et roses, celles qui aujourd’hui coûtent un bras, que nous nous amusions à offrir aux filles pour qu’elles les portent, par deux, en pendentifs.
Le fruit défendu a plus de goût, celui de l’enfer, comment ose-t-on gourmander la pauvre Ève d’avoir cédé à la tentation ?
De ce temps révolu, les cerisiers du chemin et du jardin du Bourg-Pailler ont été coupé, je dois me contenter d’en acheter chez la marchande de 4 saisons – façon de parler parce qu’elle aussi a disparue – j’ai gardé une forte addiction aux cerises. Lorsque j’allais passer des vacances dans le Luberon, du côté d’Apt, je me régalais sur les chemins environnant de cerises sauvages.
Enfin pour compléter ce tableau, j’adore le bois de cerisier ou de merisier, et j’ai sauvé de la destruction des années formica, un bel homme debout aux pieds chantournés en cerisier. Pas facile à déménager mais quand on aime on ne compte pas.
Homme debout:
« À l'origine, l'homme debout était une petite armoire très haute à une seule porte. Selon la légende, ce meuble servait aux insurgés vendéens de cachette pendant la révolution pour échapper aux soldats républicains : un homme debout pouvait y loger ».
Depuis, je ne sais pourquoi on l’a baptisée bonnetière.
11 mai 2006
C'était en 1983 je crois, une crise de la cerise de bouche, je suis en charge du dossier au cabinet de Michel Rocard. Un matin un coursier nous porte trois panières emplies de magnifiques cerises en provenance des producteurs de l'Ardèche.
Sur chaque panière une lettre épinglée : madame Danièle Mitterrand, madame Delors, madame Michèle Rocard.
Nous transmettons aux intéressées et très vite on me confie le pensum d'écrire la réponse de chacune de ces dames aux producteurs de l'Ardèche. La missive de ces derniers est fort bien tournée, émouvante et sympathique.
Je me prends au jeu et je commets trois réponses différentes en fonction de l'idée que je me fais de la personnalité de ces dames.
Fin de l'épisode à part que le chef de cabinet de Rocard, Yves Colmou, reçoit un coup de fil de Danièle Mitterrand pour remercier et ajouter « pourtant François a fait beaucoup pour la cerise... » au détail près qu'en l'occurrence la cerise dont elle parlait était le bigarreau d'Apt cher au défunt et regretté Henri Michel et à notre ami JL Piton.
Cette chronique a vu le jour suite à la lecture d’une chronique de Jacky Durand publiée dans Cuisiner un sentiment chroniques savoureuses éditions de l’épure ICI
LE TEMPS DES CERISES
« C’est un confetti de verdure coincé à la verticale du périph. Trois herbes folles, deux chardons en fleur, une vigne courant sur un grillage et un cerisier. Pas un arbrisseau ou un sauvageon. Non, un vrai cerisier avec de beaux fruits formés mais pas encore mûrs, insolent de végétation au milieu de cette gangue de béton. C’est sûr, on y reviendra dans les beaux jours à cette porte de Paris picorer les fruits de cet arbre franc-tireur entre les murs antibruit et les panneaux publicitaires. Car on l’aime bien le cerisier qui fait un peu figure de rescapé des fortifs, de dernier des Mohicans dans la friche urbaine. On continue de se demander s’il est arrivé là par la volonté ‘une main verte ou le hasard du noyau d’un mangeur distrait ou d’une fiente de corneille. Et puis, indice supplémentaire de sympathie, bien avant l’accrobranche, il y avait le cerisier. Si, si, souvenez-vous, les cerises étaient encore meilleures quand elles étaient mangées dans l’arbre. Car vous pouvez gauler les pommes ou les noix, mais pour une poignée de burlats ou de griottes, il faut s’exposer au vertige ascensionnel du maraudeur. C’est une autre caractéristique de ce fruit : on aime grappiller, picorer la cerise plus que la pomme ou la prune. Avec gourmandise pouvant valoir contravention (article 331-2 du code forestier) quand le cerisier et ses fruits sont propriété d’autrui. C’est dire l’ampleur de la faute en ces temps de loi anticagoule. »
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Cerises guignes
Cerises bigarreaux
Cerises griottes
Cerises vraies (ou cerises douces)
Le cerisier domestique provient de deux espèces sauvages d’origine incertaine : le merisier ou cerisier des oiseaux (Prunus avium), à feuilles tombantes et à fruits de saveur douce, et Prunus cerasus, à feuilles droites et à fruits acidulés.
Du croisement de ces deux espèces, sont nées quatre races principales :
Cerises guignes
Cerises bigarreaux
Cerises griottes
Cerises vraies (ou cerises douces)
Les variétés acidulées sont auto-fertiles, alors que les variétés douces exigent la présence d’un autre arbre à proximité pour assurer la fécondation des fleurs nécessaire à la production de fruits.
Cerisier
Nom latin: Prunus serotina Ehrh.
Origine: Canada, É-U
Poids moyen (sec): 600 kg/m³
Couleur de l'aubier: blanc
Couleur du bois de coeur: rouge rosé
Prix: $$$
Cette essence est très utilisée dans l'ameublement haut de gamme et en ébénisterie en général. Son bois fonce avec le temps et sa couleur prend du caractère. Le fruit est utilisé pour parfumer le kirsch et le rhum. Nos voisins Américains le nomment "black cherry". Naturalisé en Europe.
Le cerisier est l’un des bois préférés des ébénistes pour le travail en atelier. L'aubier est mince et les planches larges sont fréquentes. Il est considéré comme un bois franc mi-dur et son grain varie de droit à ondulé. Son prix est relativement élevé quoique moins dispendieux que la plupart des bois exotiques.