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10 janvier 2022 1 10 /01 /janvier /2022 06:00

Allocution radiodiffusée du Général de Gaulle du 26 octobre 1962

Acte de décès de la IIIe République :

 

Le 10 juillet 1940, les Chambres, réunies à Vichy, votaient à une écrasante majorité les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, mettant à bas la IIIe République et portant sur les fonts baptismaux un nouveau régime, l’État français.

 

Naissance de la IVe République :

 

La République est réinstallée dès la libération de Paris, en août 1944. De grandes réformes économiques et sociales sont aussitôt engagées. La Constitution de la Quatrième République, difficilement adoptée après deux référendums, se traduit finalement par l'établissement d'institutions très proches, dans leur esprit et plus encore dans leur pratique, de celles de la Troisième République.

 

L’assemblée  constituante  élue  le  21  octobre  1945communistes  et  socialistes  ont  la  majorité absolue  mais  les  socialistes  imposent  une  cohabitation  pluraliste  avec  le  nouveau  parti  qui regroupe  les  démocrates-chrétiens  issus  de  la  Résistance,  le  MRP

 

Le  général  de  Gaulle,  choisi  par  l'Assemblée  constituante comme  président  du  gouvernement  provisoire  de  la  République  française  en  novembre  1945, s'oppose  rapidement  aux  partis  sur  le  projet  de  constitution  et  démissionne  de  ses  fonctions  le 20  janvier  1946

 

Un  premier  projet  ayant  été  rejeté  le  5  mai  1946un  nouveau  texte  prévoit deux  chambres  (dont  le  Conseil  de  la  République  qui  joue  un  rôle  consultatif)  et  une  légère extension  des  pouvoirs  du  président.  Le  16  juin  1946,  dans  son  discours  de  Bayeuxle  général de  Gaulle  se  prononce  sans  succès  pour  un  exécutif  fort  dans  un  régime  de  caractère présidentiel

 

Le  second  référendum  13  octobre  1946,  permet  l'adoption  de  la  Constitution  de la  IVème  République.  Le  10  novembre,  l'Assemblée  nationale  est  élue  pour  cinq  ans  à  la proportionnelle  départementale.  Le  parti  communiste  est  le  groupe  le  plus  important  devant  le MRP et  la  SFIO  qui  recule. 

 

Le 16  janvier  1947  Vincent  Auriol  est  élu  à  la  présidence  de  la République  par les deux  chambres réunies  en  congrès  à  Versailles.  Le  nouveau  gouvernement  présidé  par  Ramadier  est  confronté aux  difficultés  de  ravitaillement  et  à  l'inflation  qui  crée  mécontentement  et  revendications salariales.  Interpellé  par  les  députés  sur  la  politique  des  salaires,  le  gouvernement  obtient  la confiance  le  4  mai.  Toutefois  l'opposition  du  parti  communiste  entraîne  le  départ  de  ses ministres  du  gouvernement.  Dans  le  même  temps  de  Gaulle  crée  le  14  avril  1947  le Rassemblement  du  Peuple  français,  instrument  de  reconquête  du  pouvoir.  Désormais  le gouvernement doit  faire  face  à  l’opposition des communistes et des gaullistes.

 

Acte de décès de la IVe République

 

Après une dernière et longue crise ministérielle, chute de Félix Gaillard, 15 avril 1958, la constitution du gouvernement Pierre Pflimlin 12 mai provoque l'émeute d'Alger, où s'installe, avec l'accord de l'armée, un Comité de salut public (crise du 13 mai 1958) présidé par le général Massu.

 

Ces événements favorisent le retour au pouvoir du général de Gaulle, qui apparaît alors comme seul capable de rétablir l'ordre. Après la démission de P. Pflimlin 28 mai, il devient président du Conseil, le 1er juin, constitue un gouvernement d'union nationale et obtient les pleins pouvoirs pour régler le problème algérien et préparer une nouvelle Constitution.

 

Naissance de la Ve République

 

La Constitution de 1958 est approuvée par le référendum du 28 septembre 1958. La IVe République prend officiellement fin le jour de la promulgation de cette Constitution 4 octobre 1958. Le 8 janvier 1959, le président Coty transmet ses pouvoirs au général de Gaulle, élu le 21 décembre 1958 à la présidence de Ve République.

 

Élection du président de la République au suffrage universel direct

 

Avec 82 % de « Oui », le référendum sur l’élection du président de la République au suffrage universel direct est approuvé par les Français, le 28 septembre 1962.

 

La continuité, la fermeté, l'efficacité

 

Deux jours plus tôt, le 26 septembre, le général de Gaulle les a exhortés à voter « Oui » dans une allocution radiotélévisée :

 

« Françaises, Français ! Après-demain, en toute clarté et en toute sérénité, vous allez par votre vote engager le sort du pays. La question, qu’en ma qualité de président de la République et m’appuyant sur la Constitution, je pose aux citoyens français, est aussi nette et simple que possible : "Voulez-vous, dorénavant, élire vous-mêmes votre Président au suffrage universel ?” La raison de cette proposition, c’est qu’à l’époque moderne, il faut une tête à un grand État […] la continuité, la fermeté, l’efficacité, instaurées au sommet de l’État, sont les conditions nécessaires de la rénovation que nous avons commencée […]. »

Le général de Gaulle et le président Coty à l'Elysée

En finir avec la Vème République !

 

Crise finale de la Vème République

 

Cette élection présidentielle traduit plus encore que celles qui l’ont précédée, l’épuisement des institutions de la Ve République, leur caractère délétère, le besoin urgent de notre pays d’en finir avec elles et de redéfinir un régime qui soit plus démocratique, dans lequel l’équilibre des pouvoirs serait respecté, dans lequel le peuple français pourrait exprimer sa volonté autrement qu’en dégageant tous les cinq ans celui qui a été à la fois tout-puissant et impuissant, ou par des émeutes qui ont leur vertu mais débouchent rarement sur une solution politique faisant prévaloir ses intérêts.

Quels sont les symptômes de cet effondrement de la Vème République dans laquelle l’élection du Président de la République au suffrage universel détermine l’ensemble de l’organisation politique ?

 

La multiplication des candidatures, d’abord, à gauche comme à droite et à l’extrême droite. La plupart des candidats ne proposent aucune politique clairement définie et beaucoup d’entre eux doutent à ce point d’eux-mêmes qu’ils ne présentent pas une candidature mais une « intention de candidature » (j’envisage de… j’ai envie de…) proposée aux sondages.

 

L’effondrement des partis politiques, ensuite. Beaucoup de candidats se présentent sans le soutien d’un parti politique. De Gaulle qui voulait la fin du « régime des partis » (mais qui n’a jamais oublié d’avoir le sien) serait satisfait. Les partis organisent de moins en moins la vie politique, mais la démocratie n’en sort pas renforcée, bien au contraire. JL Mélenchon ne dispose que d’un parti qu’il qualifie de « gazeux » ; Anne Hidalgo a été désignée par un parti sans militants, réduit à quelques milliers d’élus. Arnaud Montebourg et Christiane Taubira ne bénéficient du soutien d’aucun parti. Celui de Zemmour n’existe pas vraiment. On hésite à qualifier la République en marche de parti, tant ce rassemblement de personnes recrutées sur entretien professionnel montre chaque jour un peu plus son inconsistance ; le débat grotesque sur le passe-vaccinal en cours à l’Assemblée en est un bon exemple.

 

L’absence de véritable campagne électorale enfin. La disparition des partis politiques s’ajoutant à la poursuite de l’épidémie de Covid, utilisée par le pouvoir pour réduire au maximum les libertés publiques, réduisent la campagne électorale à l’occupation des « réseaux sociaux ». Mais la visibilité sur les réseaux sociaux doit plus au bon usage des robots et des trolls qu’à l’ancrage territorial des mouvements politiques censés s’exprimer par ce moyen. Qu’importe, candidats et journalistes se persuadent qu’il s’agit de la vraie vie car ils y retrouvent leur image et l’écho de leurs messages.

 

Les réseaux d’influence dans les médias écrits et audiovisuels font le reste. Il faut passer le plus souvent possible à la radio et à la télévision. Pourtant, certains habitués des plateaux de télévision devraient se demander pourquoi les intentions de vote en faveur de Philippe Poutou ou Nathalie Artaud ne sont très éloignées de celles dont sont crédités A Montebourg, Fabien Roussel, A Hidalgo ou Christiane Taubira, entre 1% et 4% selon les moments et les sondeurs.

 

Le défaut de légitimité démocratique et d’ancrage dans le pays du candidat ou de la candidate qui sera élu(e) quel qu’il soit ne fera qu’aggraver un peu plus la crise démocratique du pays.

 

Il n’y aura pas de miracle

 

La candidature de Christiane Taubira n’est, dans ce contexte, qu’une candidature de plus, bien qu’elle s’en défende.

 

D’abord parce qu’elle ne réglera pas le problème de la division de la gauche si l’on considère que c’est bien celui-là qu’il faut régler prioritairement.

 

Jean-Luc Mélenchon n’acceptera pas de participer à une primaire, populaire ou pas. Il en a toujours contesté le principe même.  Peut-être, d’ailleurs, a-t-il tort puisqu’il est le mieux placé dans les enquêtes d’opinion pour porter les couleurs de la Gauche dans cette élection. Mais ce n’est pas son tempérament et même s’il a abandonné son discours opposant le peuple à la gauche, pour se rapprocher d’un positionnement assez classique de rassemblement des oppositions au gouvernement Macron, il ne veut pas que sa candidature puisse être comparée à celle des rejetons du Parti socialiste, après avoir tant fait pour faire oublier qu’il en était lui-même un pur produit.

 

On voit mal Yannick Jadot qui s’est déjà effacé au profit de Benoît Hamon lors du précédent scrutin, avec le résultat que l’on connaît, accepter de remettre en jeu sa candidature durement acquise dans le cadre d’une élection primaire, après avoir proposé à toutes le formations politiques d’essayer de trouver un accord pour une candidature commune, ce qu’elles avaient refusé dans un bel ensemble. De plus, il sait trop bien que s’il ouvre la perspective d’une remise en cause de sa candidature au profit d’un éventuel rassemblement, Sandrine Rousseau relancera immédiatement l’offensive pour essayer de reprendre ce qu’elle n’a pas obtenu par la primaire d’EELV.

 

Fabien Roussel est un des rares candidat à gauche disposant d’un parti, des parrainages et du financement nécessaire pour aller au bout de ce qu’il a entrepris et il n’a aucune raison de se rallier à plus faibles que lui.

 

Dès lors, la candidature de Christiane Taubira ne peut pas être autre chose qu’une candidature s’ajoutant à celle des autres héritiers du « Hollandisme », après la déroute du parti socialiste dont est responsable l’avant-dernier Président de la République.

 

Les déclarations récentes de Christiane Taubira, celle qui annonce sa possible candidature à l’élection présidentielle puis ses vœux de nouvel an, pas plus que la tribune qu’elle a signée dans « Le Monde » ne donnent d’indications sur ce qu’elle pense des questions politiques essentielles auxquelles nous sommes confrontés : crise sociale et politique, peur du déclassement individuel et collectif, relation de la Nation avec l’Union européenne. Elle se borne à proposer l’union de la gauche derrière elle, en renvoyant à plus tard les questions qui la divisent, considérant que ce qui réunit les diverses tendances de la gauche est plus important que ce qui les divise. Mais c’est précisément parce que ces problèmes politiques majeurs n’ont jamais été tranchés depuis 1983, que la gauche se trouve dans cette situation désastreuse aujourd’hui.

 

La candidature d’Arnaud Montebourg était l’ultime tentative de reconstruire une gauche populaire en utilisant l’élection présidentielle

 

Sa candidature a été contestée par ceux qui y voyaient un facteur de division supplémentaire d’une gauche déjà divisée. Elle se distinguait pourtant de celle de Christiane Taubira sur plusieurs points, avant qu’il ne s’écarte de plus en plus nettement de son objectif initial. Il s’adressait prioritairement au bloc populaire constitué des ouvriers, des employés, de la masse des fonctionnaires qui font vivre les services publics malgré la prolifération des « managers publics » ; il parlait aux commerçants et aux artisans qui peinent à vivre de leur travail. Il s’adressait à ces couches populaires comme au cœur battant de la société française et non comme à des bandes de gens incultes acquis à la pensée de Marine Le Pen et d’Éric Zemmour, comme le pensent la moyenne bourgeoisie urbaine, les médias, la fondation Terra nova et le parti socialiste qui a adopté ce point de vue avant d’en mourir.

 

Arnaud Montebourg mettait en avant par ailleurs la nécessaire réforme de la Ve République et la reconquête d’une partie de la souveraineté nationale en mettant un coup d’arrêt à la construction d’une Europe fédérale dont l’Allemagne a été à peu près le seul bénéficiaire, en particulier depuis la création de l’euro et l’élargissement à l’Europe centrale. Il prônait aussi la démondialisation, indispensable à toute politique écologique sérieuse.

 

Il n’a pas réussi à se faire entendre et a échoué en voulant rechausser les bottes de Jean-Pierre Chevènement (lequel avait déjà fait naufrage dans sa tentative « d’union des souverainistes des deux rives »), avant « d’offrir sa candidature » à la reconstitution de la traditionnelle « union de la gauche face au péril fasciste ».

 

Cet échec n’invalide pas pour autant les éléments principaux du diagnostic qu’il portait sur la situation politique du pays ni la pertinence des questions principales qu’il voulait poser au cours de cette campagne.

 

Ignorer l’élection présidentielle et préparer les élections législatives pour s’attaquer enfin aux vrais problèmes du pays

 

L’union de la gauche est impossible et d’un certain point de vue c’est tant mieux car elle ne pourrait se faire que sur un compromis laissant de côté tous les sujets auxquels il faut apporter une réponse.

 

Il ne sera pas possible de modifier nos institutions ou notre relation avec l’union européenne et l’organisation mondiale de l’économie, par surprise, après avoir introduit un président de la République par effraction.

 

Ce qui manque à notre pays, ce n’est pas une candidature de gauche supplémentaire, ce sont des femmes et des hommes décidés à construire une nouvelle formation politique authentiquement socialiste, capable de mener le combat pour une France républicaine, démocratique, sociale, laïque et souveraine dans une Europe confédérale.

 

Cette force politique devrait refuser le cadre même de l’élection présidentielle, contester la Vème République, proposer un chemin qui permette d’en modifier le fonctionnement, non par un grand soir démocratique qui surgirait de la convocation d’une assemblée constituante que nous risquons d’attendre longtemps, mais en proposant des amendements constitutionnels qui permettront de découpler l’élection du Président de la république de celle de l’assemblée nationale, d’instaurer un scrutin proportionnel, de redonner à l’assemblée nationale la maîtrise de son agenda, ce qui interdirait à M Macron de faire adopter un mercredi son projet de loi de passe-vaccinal et d’en imposer l’approbation par l’assemblée nationale le lundi suivant (il n’a pas tout à fait réussi en raison de l’amateurisme de ses députés).

 

Une candidature de gauche devrait décrire comment la France va imposer le respect de sa souveraineté, qui est l’autre nom de la démocratie, dans une Union européenne qui prendrait un tour confédéral, comme le souhaitent les peuples européens, et non fédéral comme le souhaitent les institutions européennes, les couches supérieures urbaines et le grand capital européen et mondial.

 

Une candidature de gauche oserait engager le débat sur l’euro qui fonctionne au bénéfice exclusif de l’Allemagne depuis sa création et au détriment, notamment, de la France, de l’Italie ou de l’Espagne. L’euro a accéléré le transfert de la production et des richesses de l’Europe du Sud vers le Nord. Il n’est pas incongru de demander une révision des règles de fonctionnement de cette union monétaire, inadaptées aux différences profondes des économies européennes. Certains économistes, comme Stiglitz, ont proposé une union monétaire plus souple, comprenant des sous-zones de solidarité monétaire plus homogènes économiquement, et non une monnaie unique imposée à des pays présentant des écarts de compétitivité et de niveaux de vie bien supérieurs à ceux que l’on trouve entre l’Europe et un grand nombre de ses partenaires. Au nom de quoi ce débat serait-il interdit et ceux qui posent des questions seraient-ils immédiatement désignés comme des populistes « frexiteurs » avec lesquels il ne faut pas parler ?

 

Il n’y aura décidément pas de sauveur ou de sauveuse suprême, pas de raccourci pour reconstruire le socialisme dévasté par le Mitterrandisme et ses héritiers.

 

L’élection présidentielle qui se présente comme la rencontre entre une personnalité et les Français est devenue un concours de beauté interdisant le débat démocratique. Il faudrait appeler à la boycotter jusqu’à ce qu’une réforme institutionnelle permettant un retour à la démocratie lui redonne sa juste place.

 

Dans cette perspective, le scrutin important est celui qui suivra pour élire les députés à l’Assemblée nationale.

 

Les deux candidats à l’élection présidentielle qui arriveront au second tour, auront réunis sur leur nom moins de 20% des électeurs inscrits au premier tour. Quelle est la légitimité d’une personne aussi mal élue pour rassembler derrière elle les Français une fois arrivée au pouvoir. Elle n’existe pas. C’est ce qu’a vécu E Macron, Jupiter tôt descendu de son olympe pour trembler devant les gilets jaunes et dont le principal objectif est maintenant « d’emmerder les non-vaccinés ». On conviendra que c’est un objectif politique limité pour un Président de la République.

 

Les mêmes causes produiront les mêmes effets. C’est pourquoi il faut mener campagne non pour tel ou tel candidat, mais contre l’élection présidentielle qui constitue un poison pour la démocratie et le fonctionnement de la société française.

 

Vivement la VIème République !

 

Jean-François Collin

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