Aujourd’hui c’est «Dresser pour tuer » (1982)
Pourquoi ce film ?
Pour continuer la série des films racontant une histoire et donc divertissants en ce sens mais aussi pour entrer, par la petite porte, dans le monde d’un fabuleux metteur en scène ?
Samuel Fuller est un homme hors norme comme seuls les USA, semble t’ils peuvent produire. Mais aussi parce que le film, encore une fois, est tiré d’un roman de Romain Gary « Chien blanc » Gallimard 1970.
Ce film ne sera jamais projeté aux États Unis. Sommé de le remanier Fuller refuse et s’enfuit au Mexique avec les négatifs.
Quelle est l’histoire ?
Wikipédia nous dit : À la période du mouvement américain des droits civiques, Julie Sawyer heurte accidentellement un chien de berger blanc. Après que le vétérinaire l'a soigné, Julie l'héberge dans sa propriété afin de retrouver ses maîtres. Un intrus essaie de l'agresser, mais le chien lui porte secours. Elle décide de devenir sa maîtresse, mais son petit ami Roland Graele ne le supporte pas. On apprendra que le chien a été dressé par un mystérieux propriétaire raciste blanc pour tuer les gens de couleur. Le chien sort dans la nuit hors de la propriété et tue un camionneur noir. Au studio, Julie emmène le chien avec elle et il blesse une actrice noire devant des gens. Julie transfère le chien chez un professionnel nommé M. Carruthers qui insiste pour euthanasier le chien. Un autre dresseur noir de chiens, nommé Keys, cherche à éduquer le chien : il porte une protection et séquestre le chien à l'intérieur d'un grand enclos, ce sera Keys qui le nourrira et non Julie.
Réalisation
C’est l’immense Samuel Fuller qui est aux commandes notons qu’il est également le scénariste comme il le sera pour tous ses films. Américain il est né aux USA en 1912 et où il mourut 85 ans plus tard en 1997.
Ce phénomène à presque tout fait pendant toutes ses années. De grouillot dès 12 ans dans les grands journaux de New York , il devient vite « pisse copie » pour les ainés puis pleinement journaliste. A 17 ans il sera le plus jeune chroniqueur judiciaire de l’histoire de la presse. La fréquentation de ce milieu lui inspirera « Violence à Park Row » 1952 considéré aujourd’hui comme un des meilleurs films de Fuller. En parallèle il ne cesse d’écrire des récits, des nouvelles ou comme nègre. À partir de 1936 il entre en contact avec Hollywood à qui il fournit des scénarios. Pendant la seconde guerre mondiale Il sert dans la 1re division d'infanterie américaine la célèbre « Big Red One ». Il y est à la fois soldat et reporter de guerre. Pendant ce temps, sa mère lui trouve un éditeur pour son premier roman. C’est un polar qui attire l’attention d’une maison de production qui en achète les droits. Non seulement Fuller combat mais il tourne des documentaires ce qui ne fait pas de lui un planqué pour autant. Il sera blessé deux fois au combat. Il recevra la Bronze Star, la Silver Star et la Purple Heart, "pour conduite héroïque".
Cette expérience du front lui permet de réaliser des films comme «Au-delà de la gloire» (1980), témoignage autobiographique au sujet du front européen. Ce film est moins connu que d'autres grands films de guerre, un peu trop « son et lumière » comme « Apocalypse Now »,1979 ou « Platoon » 1986 Ce film n’a rien à envier à« Full Metal Jacket » 1987, ou « Voyage au bout de l'enfer.»1978. En effet, pour les vrais amateurs de films de guerre « Au-delà de la gloire » est considéré, comme l'un des meilleurs films dans cette catégorie.
Après la guerre, il devient salarié de la Warner Bros comme scénariste. Cependant peu de scénarios passe au stade de la production qui, souvent même, ne va pas jusqu’au bout. C’est avec son troisième long métrage, « J'ai vécu l'enfer de Corée » 1951 que viendra la reconnaissance et que sa carrière de cinéma démarre. C'est le premier film sur la guerre de Corée dans lequel le silence est également brisé sur les camps d'internement pour les Nippo-Américains durant la seconde guerre mondiale C'est un succès financier aussi, avec un budget de 100 000 dollars, le film en rapporte 2 000 000 nous dit Wikipédia. Fuller signe alors un contrat avec la 20th Century Fox et Darryl Zanuck avec lesquels il devient coproducteur, scénariste, metteur en scène de ses films.
C’est de cette époque que date « Le Port de la drogue » 1953, qui recevra un Lion d’Or à Venise. « La Maison de bambou » 1956 date de la même période. En effet, peu après il fonde sa propre société de production. Ce qui lui permet de financer un western, « Le Jugement des flèches ». 1957
La reconnaissance de Fuller en Europe, notamment par les Cahiers du Cinéma démarre avec ce film et se confirme avec un film de guerre « Porte de Chine », 1957 puis « Quarante Tueurs »1957 Il renoue avec la Warner Bros pour « Les Maraudeurs attaquent » 1962 Mais surtout deux films aujourd’hui cultes qui vont lui valoir les foudres des critiques et mis au ban des sociétés de production. Il s’agit de « Shock Corridor »1963 et de « Police spéciale » 1964. Bien sûr, il ne reste pas inactif. Il se consacre à la télévision et continue, çà et là être acteur.
À l’occasion de ses séjour en France, on le voit tenir son propre rôle dans « Pierrot le fou » 1965 de Jean-Luc Godard. Plus tard on le verra dans des longs métrages de Wim Wenders et de Claude Chabrol. Il poursuit également sa carrière d’écrivain. Tous croient sa carrière finie. Mais ce diable d’homme trouve quand même de quoi financer un film qui lui tient à cœur depuis 1956 : « Au-delà de la gloire » qui relate son histoire au sein de la première division d'infanterie américaine « The Big Red One » 1980 au cours de la Seconde Guerre Mondiale. C’est un succès aussi grand que « J’ai vécu l’enfer de Corée » Il rentre en grâce à Hollywood et réalise alors « Chien blanc ». Ce sera la rupture définitive avec « La fabrique de rêves »
Il finit par s’installer à Paris, toujours actif et tournera « Les voleurs de la nuit » 1984 en France. « Sans espoir de retour » 1988, ironie du sort, est son dernier film européen. Il ne retournera en Amérique qu’en 1994 pour y mourir 3 ans plus tard diminué par un AVC.
Qui fait quoi ?
Les acteurs, dans l’ensemble, sont des acteurs de films plus ou moins de série B. Bien sûr ils sont connus aux USA. Les nombreux films tournés et/ou les séries leurs assurent une notoriété certaine mais qui ne dira rien aux spectateurs français de film mais peut-être un peu plus aux amateurs de séries. Pour la petite histoire on pourra noter que Kristy McNichol : qui tient le premier rôle, Julie Sawyer, a tourner avec le cinéaste français Edouard Molinaro une bluette : « Just the Way You Are » 1984 dans lequel elle tient le premier rôle : Susan Berlanger
Temps forts
Il n’y a pas, à proprement parler, de temps fort. Le suspense est quasi constant. Une scène de répit ne l’est jamais vraiment car on ne sait quand va se dérouler la prochaine scène violente. On ne sait même pas si « la scène de répit » ne va pas brusquement évoluer en scène de violence.
C’est tout l’art de Fuller de nous mener comme il veut, là où il veut et nous faire comprendre la folie qui s’empare de ces dresseurs de « chiens blanc »
Remarque : De tout temps, Fuller fut un homme d’action. C’est sur ses expériences qu’il a bâti une œuvre. Il n’a eu de cesse de dénoncer sur tous les sujets toutes les hypocrisies des discours qui masquent la réalité. Sa vision pessimiste et sans concession de son pays s'exprime dans « Les Bas-fonds new-yorkais » 1960, le dernier film produit par sa société de production Globe Enterprises. Hollywood ne le considérait que dans la mesure où il rapportait beaucoup de dollars. C’est dans ses gènes comme on dit aujourd’hui. Souvenez-vous des paroles de Michael Cimino à ce sujet. Fuller fut toujours un homme libre doublé d’une grande gueule qui ne mâchait pas ses mots. C’était peut-être dans sa nature mais lui, au moins, a toujours payer comptant cette liberté et le droit de « l’ouvrir »
Pour terminer : On peut lire dans le livre « Je suis en train de me rendre compte que le problème noir aux États-Unis pose une question qui le rend pratiquement insoluble : celui de la Bêtise. Il a ses racines dans la plus grande puissance spirituelle de tous les temps, celle de la Connerie.»
Pour conclure« Qu’est-ce que j’ai à faire des noirs, je ne suis pas raciste »
Pax
Prochainement «Jeux d'espions (Hopscotch)»