En France, le nucléaire civil, est une ligne de partage très ancienne qui divise, l’opposition au nucléaire fut le socle des premiers écolos, elle perdure, la prise en compte de l’empreinte carbone relance le débat entre les pour et les contre, le lobby du nucléaire est puissant, bien implanté dans une forme de complexe politico-industriel mais l’opinion publique est de plus en plus sensible aux arguments des Verts. Mélenchon a viré sa cuti, Le PC et la CGT sont farouchement contre la fermeture des centrales nucléaires, voir Fessenheim, la droite et la gauche, dites de gouvernement pataugent dans un flou peu artistique.
À titre personnel je ne me suis jamais engagé dans les rangs des contre, surtout que beaucoup fondait leur opposition sur la peur, Tchernobyl n’a rien arrangé, mais j’ai milité pour le renforcement d’une autorité indépendante en charge de la Sécurité Nucléaire, elle s’est notoirement crédibilisée, et pour la destinée des déchets.
Je verse quelques pièces au dossier en commençant par un point de vue intéressant de nos voisins suisses :
Dans la Meuse, l’envers du grand retour du nucléaire
NUCLÉAIRE
Le 23 octobre, l’enquête d’utilité publique sur le projet controversé d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure (Meuse) s’est achevée sur un constat: sur fond de lutte contre le réchauffement climatique, l’heure est bel et bien au retour en force de l’atome
Publié dimanche 24 octobre 2021
Des galeries souterraines creusées dans l’argile, à plus de 500 mètres de profondeur. Un gruyère atomique foré dans le sous-sol de la Lorraine et supposé résister durant des milliers d’années aux forces de la nature. La commune de Bure, dans la Meuse, est sans doute aujourd’hui la plus informée de France sur les conséquences à long terme de l’énergie nucléaire, que beaucoup en France rêvent de relancer pour lutter contre le réchauffement climatique et permettre au pays d’atteindre son objectif de 33% d’énergies renouvelables en 2030. Bure, ou l’envers de l’atome contre lequel des centaines d’opposants ont encore manifesté samedi, dernier jour de l’enquête d’utilité publique sur le futur site d’enfouissement des déchets radioactifs, conduite, entre le 15 septembre et le 23 octobre, par une mission indépendante de cinq membres placée sous l’autorité du Tribunal de Nancy.
Une commune symbolique
Pour l’heure, rien n’est acquis et les antinucléaires vont continuer de mener le combat dans cette région d’agriculture de l’est de la France où la paysannerie s’éteint, où l’emploi privé est rare, avec un taux de chômage d’environ 7% (contre une moyenne nationale de 8%). Bure est une commune symbolique à plus d’un titre. Si la première étape du projet est approuvée – sous forme d’une déclaration d’utilité publique –, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) augmentera considérablement les moyens dévolus au Cigéo (Centre industriel de stockage géologique), dont le territoire couvre déjà près de 600 hectares, libérés de toute présence agricole à force de rachats. La commune lorraine deviendra alors le second point focal, en France, pour le traitement des déchets radioactifs après l’usine de retraitement de La Hague, dans la très nucléaire presqu’île du Contentin, où se trouve aussi la centrale de Flamanville, dotée d’un troisième réacteur de nouvelle génération supposé entrer en fonction en 2023. 85 000 m³ des déchets les plus toxiques du parc nucléaire français (18 centrales, 53 réacteurs, 77% de la production énergétique nationale) y seraient à terme enfouis à partir de 2035.
Le plan «France 2030»
La coïncidence du calendrier en dit long sur le retour en force, en France, de l’énergie nucléaire sur fond de lutte contre le réchauffement climatique. Lors de la présentation de son plan «France 2030» le 12 octobre, Emmanuel Macron a ainsi ouvert la voie à une nouvelle étape de l’effort atomique français, initié après la crise pétrolière de 1973-1974, et devenu une priorité nationale dans les années 1980, sous les deux septennats de François Mitterrand: la création de micro-centrales – Small Modular Reactor – de puissance plus faible que des réacteurs conventionnels, pouvant être produits en série puis transportés sur leurs lieux d’exploitation.
Objectif: éviter que l’augmentation de la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique national (supposée passer dans les dix années prochaines de 20% à 33%) ne débouche sur une mise en danger de l’approvisionnement énergétique. Avec une conséquence déjà dénoncée par les écologistes: le risque accru de prolifération, et la dissémination des réacteurs sur l’ensemble du territoire, entraînant une mainmise encore plus grande du lobby de l’atome sur le pays.
Un réseau politico-industriel sans égal
«L’atome français, c’est un réseau politico-industriel sans égal, enraciné au cœur de l’appareil d’Etat et soutenu par l’ensemble de la classe politique depuis plus d’un demi-siècle», dénonçait déjà, au lendemain de la catastrophe de Fukushima en 2011, l’ancienne ministre de l’Environnement et avocate Corinne Lepage. Et de fait, tout concorde pour penser qu’Electricité de France (EDF) – avec laquelle plusieurs fournisseurs d’électricité suisses ont des contrats d’approvisionnement à long terme – n’est pas encore prête pour la révolution verte, d’autant que la multiplication des parcs éoliens suscite une levée croissante de boucliers dans les campagnes.
Officiellement, la part du nucléaire en France est supposée passer de 75% à 50% à l’horizon 2035, au lieu de 2025 comme le prévoyait pourtant la loi «transition énergétique» votée en 2015. Un premier pas a aussi été franchi en 2020, avec la fermeture définitive de la centrale nucléaire alsacienne de Fessenheim, frontalière de la Suisse, où 300 millions d’euros ont été alloués pour la transformation du site en laboratoire d’expertise du démantèlement des réacteurs. Reste la réalité: le fait que l’atome soit une énergie décarbonée relance le débat à l’avantage de ses partisans. Impossible, dès lors, d’entrevoir en France un abandon du nucléaire à la mode allemande ou helvétique.
Centrale nucléaire de Civeaux à Vienne, mise en service en 1997. (Crédits : Daniel Jolivet/CC/flickr).
Le nucléaire en France : un débat entre ceux qui le défendent et ceux qui veulent en sortir ICI
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20/01/2021
La centrale nucléaire de Cruas-Meysse au bord du Rhône en Ardèche, le 7 avril 2011. © AFP / Philippe Desmazes
Nouvelles centrales nucléaires, éolien : le rapport de RTE dessine nos "futurs énergétiques" ICI
par Victor Vasseur publié le 25 octobre 2021
Yucca Mountain ICI
John d’Agata
Zones sensibles, Bruxelles, 2012, 160 pages, 16 euros.
Accompagnant sa mère qui emménage à Las Vegas pour sa retraite, John d’Agata découvre, à une centaine de kilomètres, le site de Yucca Mountain. C’est là que le Comité américain de l’énergie atomique a obtenu, en 1980, de construire le plus grand site d’enfouissement de déchets nucléaires au monde. Dans dix mille ans, alors que la langue qui succédera à l’anglais sera à son tour devenue une langue morte, alors qu’une nouvelle île aura fait surface à côté de Hawaï, alors que l’humanité aura parcouru deux fois son histoire depuis la naissance de l’écriture, ces déchets n’auront perdu que la moitié de leur radioactivité. Folie ? Le nombre de convois nécessaires pour acheminer ces matériaux fissiles donne le vertige. « La probabilité d’un accident nucléaire à Las Vegas serait plus élevée que celle d’y gagner au casino. » Servie par la plume d’un grand écrivain, l’enquête oscille entre l’analyse éberluée d’une impossible quête de stabilité et la description du quotidien de Las Vegas, la plus folle, la plus précaire et la plus suicidaire des villes américaines (lire « Las Vegas, stade suprême des Etats-Unis »). Seul manque un post-scriptum pour indiquer qu’en avril 2011, l’administration Obama a mis un terme à ce projet, relançant la recherche d’un site d’enfouissement « sûr ».
Philippe Rivière
Posté le 3 février 2020 par Joël Spaes dans Énergie
Une récente étude, parue dans la revue scientifique Nature Materials sur le conditionnement des déchets nucléaires outre-Atlantique pour enfouissement en site profond de Yucca Mountain, apporte de l’eau au moulin des opposants au projets Cigéo de stockage profond français. Eclairage sur l’étude américaine et sur sa comparabilité avec le projet français.
Une étude pilotée par l’université américaine de l’Ohio, et publiée dans la revue Nature Materials, sur le comportement des verres utilisés pour confiner les déchets nucléaires à vie longue (des milliers d’années) montre que la corrosion est « accélérée de façon significative » dans certaines conditions. Xiaolei Guo, principal auteur de l’étude, signale dans un communiqué que « cela indique que les modèles actuels ne sont peut-être pas suffisants pour garantir la sûreté du stockage de ces déchets. »
Plus précisément, il y aurait interaction entre l’acier des fûts et le verre ou la céramique, sous l’influence de l’eau d’infiltration (l’eau finit en effet toujours par atteindre, un jour, les stockages), accélérant le processus de dégradation des fûts et risquant de libérer des éléments radioactifs (d’abord dans le sol, puis, potentiellement remontant à la surface).
Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), dont l’un des représentants a participé à l’étude, rappelle que celle-ci « s’inscrit dans le cadre du projet américain de stockage géologique à Yucca Mountain ». Un projet arrêté, puis récemment repris (mais toujours pas abouti), qui vise à stocker en profondeur, comme dans Cigéo en France, des déchets radioactifs de haute activité. Néanmoins, signale Frédéric Plas, directeur R&D de l’Agence nationale des déchets radioactifs (Andra), interrogé par Techniques de l’Ingénieur, Yucca Mountain, dans le Nevada, « est un site particulier, puisqu’il est situé dans la roche volcanique, et il s’agit d’un milieu non saturé avec des poches d’eau ». En général, les trois grandes roches envisagées pour de tels stockages sont l’argile, le granit, voire le sel. D’où les études américaines sur le sujet.
En outre, aux Etats-Unis, insiste le responsable de l’Andra, « comme les combustibles usés ne sont pas retraités comme en France, la majeure partie des déchets à stocker sont constitués de combustibles usés, qui sont aujourd’hui entreposés près des centrales américaines. »
Des conditions très différentes en France
Par ailleurs, indique le CEA, « les conditions expérimentales des travaux correspondent aux conditions d’environnement attendues à Yucca Mountain : expériences conduites sous air et donc en présence d’oxygène, avec une concentration élevée d’ions chlorures favorisant la corrosion par piqûre des aciers inoxydables ». Or, insiste le CEA, « les conditions étudiées dans cet article ne sont pas représentatives de celles de Cigéo. En effet, dans Cigéo, l’oxygène apporté par la ventilation du stockage sera consommé très rapidement par réaction avec les minéraux, une fois le stockage fermé. L’eau qui arrivera au contact du colis primaire en inox ne contiendra pas d’oxygène. De plus, les concentrations en ions chlorures des eaux présentes dans la couche argileuse du Callovo-Oxfordien de Cigéo sont très largement inférieures à la concentration prise en compte dans l’étude de Nature Materials. Dans ces conditions, le mécanisme de corrosion par piqûre est très peu probable et serait limité à la surface du colis vitrifié, si ce phénomène devait se produire. »
Le CEA rappelle qu’en lien étroit avec l’Andra, il « mène depuis de nombreuses années des travaux sur la dissolution du verre dans les conditions du stockage profond Cigéo et sur les mécanismes de corrosion spécifiques des aciers. Ces phénomènes sont pris en compte dans les calculs de performances de l’Andra pour Cigéo. »
En outre, le procédé de vitrification permet d’intégrer les éléments radioactifs dans un verre, qui présente de bonnes propriétés de confinement. « En France, les déchets vitrifiés de haute activité sont issus du traitement des combustibles usés, mis en œuvre à La Hague. Une fois les matières valorisables extraites, les déchets sont mélangés à très haute température dans un verre en fusion. La formulation du verre est adaptée selon la composition chimique des solutions à vitrifier : elle dépend donc de la nature des combustibles traités. »
Ensuite, « le verre est placé dans un conteneur en inox, ce qui constitue le colis primaire » pour le stockage futur dans Cigéo, indique Frédéric Plas. « Ce colis primaire est introduit dans un conteneur de stockage en acier bas carbone d’une épaisseur de 55 à 60 mm », qui constitue une barrière supplémentaire grâce à sa résistance à la corrosion, et à sa grande ductilité. Et le directeur R&D de l’Andra de préciser que l’analyse de sûreté ne prend pas en compte l’acier du colis primaire pour réaliser l’étanchéité du stockage final.
Puis ces conteneurs sont placés dans des alvéoles creusées dans la couche argileuse du Callovo-Oxfordien, de la région de Bure, saturée en eau et en milieu réducteur, qui joue ainsi un rôle de barrière également sur 130 à 140 m en moyenne. « Les alvéoles elles-mêmes sont d’ailleurs chemisées d’acier, et d’un coulis cimentaire au PH bas », ajoute Frédéric Plas. Le tout assure ainsi une étanchéité pour des centaines d’années.
A noter qu’en Finlande, où est implanté le site de stockage pour déchets à vie longue d’Onkalo, ou en Suède, la couche externe est granitique et laisse passer l’eau. Les Finlandais et les Suédois placent leurs déchets (là encore beaucoup de combustibles usés, puisqu’ils ne font pas de retraitement) dans des fûts en cuivre (d’environ 70 mm d’épaisseur), lesquels sont insérés dans des mini-puits couronnés de bentonite.