Je ne sucre pas encore les fraises mais mon âge avancé m’a permis de vivre le conflit larvé Sud-Nord à propos du droit de sucrer le moût, en terme plus soft : chaptaliser !
En clair, la France viticole du nord avait le droit de chaptaliser, après demande, toujours accordée, alors que celle du Sud, Languedoc-Roussillon, Provence, Côtes-du Rhône sud… en était privée ; les côtes-du-rhône étaient coupée en 2, celle du Nord pouvaient, celles du sud non.
Comme nous avions porté la plume européenne cette césure était devenue européenne car nos amis allemands pratiquant le sucrage-mouillage nous avaient soutenus : le donnant-donnant franco-allemand. Bien évidemment nos voisins italiens hurlaient à la distorsion de concurrence, ils n’avaient pas tort même si leur pratique en vin de table n’était pas toujours très catholique. L’entrée de l’Espagne renforça le camp des adversaires de la chaptalisation.
La plaisanterie est en effet saumâtre puisque les vins du Nord, majoritairement d’AOC, l’élite, chantant la vérité du terroir, l’authenticité, chaptalisaient et chaptalisent encore à tour de bras alors que la piétaille languedocienne, le gros rouge, le vin popu, le 13° en litre étoilé s’en voyait privé. La seule restriction pour les AOC chaptalisées c’est que les vins ne pouvaient pas être déclassés en vin de table.
Ça chauffait dur et le mou Pierre Méhaignerie, ministre de l’Agriculture commanda un rapport à mon directeur de l’ONIVIT, Pierre Murret-Labarthe, afin de dénouer ce nœud gordien. Celui-ci proposa de permettre aux viticulteurs du sud d’enrichir leurs moûts avec des moûts concentrés ou des moûts concentrés rectifiés dit MCR en effet du sucre de raisin. Ce qui fut fait et entériné à Bruxelles.
Chaptalisation : procédé qui consiste à enrichir de sucre le moût en fermentation afin d’augmenter son potentiel en alcool. ICI
Cette invention est l’œuvre du chimiste français Chaptal, d’où le nom de chaptalisation. En général, on pratique la chaptalisation lors des années difficiles, lorsque la pleine maturité du raisin n’est pas atteinte. Ainsi, le sucre ajouté se transforme en alcool de la même manière que le ferait le sucre naturel contenu dans le raisin. Chaptaliser est en France strictement règlementé. ICI
Sans cacher derrière son petit doigt la chaptalisation permet la mise en marché de vins qui, sans elle, ne le pourraient pas, on augmente donc artificiellement les volumes. Quant à la vérité et l’authenticité du vin je vous laisse juge. Le moins qu’on devrait faire c’est de porter la mention chaptalisé sur le flacon.
Bref, pour le baratin nous sommes très bon mais de moins en moins crédibles. Certes, économiquement c’est justifié mais les pourfendeurs des vins nu devraient fermer leur clapet.
La crainte de pénurie de sucre explose les coûts de chaptalisation
Mardi 28 septembre 2021 par Alexandre Abellan
L’apparition de foyers de pourriture accélère la vendange et augmente le besoin de chaptalisation. - crédit photo : ODG Médoc
Le besoin d’enrichissement des moûts met sous tension l’approvisionnement du vignoble pour assurer les montées en degrés alcooliques nécessaires face au ralentissement des maturations et à l’augmentation du risque de pourriture grise.
Le saccharose mis à sac et les Moûts Concentrés Rectifiés (MCR) en grande tension. Le rythme de maturation allant moins vite que le risque Botrytis, les vendanges s’accélèrent dans le vignoble français, augmentant mécaniquement le besoin en sucre pour enrichir les degrés et retrouver des profils habituels. Dans de nombreux bassins viticoles, la tendance est au stockage pour anticiper les besoins futurs. « Ceux qui attendent les analyses en cuve pour préparer leurs achats risquent d’avoir une mauvaise surprise » prévient un vigneron bordelais, qui a vu la semaine dernière le prix du kilo de sucre augmenter de 10 centimes. Face à la crainte de ne pas pouvoir suffisamment chaptaliser, les opérateurs stockent selon leurs besoins, très variables selon les terroirs et leurs volumes de saccharose en réserve. « Nous allons devoir faire tomber du sucre, mais nous en avons suffisamment en stock » indique ainsi un vinificateur dans le Beaujolais.
Pour d’autres fournisseurs, le besoin explose soudainement, exacerbé par la crainte de pénurie. Si la petite récolte dans le Muscadet réduit à peau de chagrin les besoins dans le pays nantais, les demandes augmentent en Anjou et Touraine indique Philippe Serrault, le directeur général de Loire Viti Vini Distribution (LVVD), qui a reçu pour la première fois des appels d’autres vignobles pour se fournir en sucre, comme Gaillac. « Nous avons la chance d’avoir passé un contrat d’approvisionnement qui nous protège des fluctuations » souligne le fournisseur, voyant dans l’anticipation une solution aux tensions actuelles sur les matières premières (bouteilles, cartons…). « Le fond du problème c’est la spéculation mondiale sur le sucre » note Stéphane Becquet, l’animateur conseil du Syndicat des Vignerons Bio de Nouvelle-Aquitaine, qui reste confiant dans les disponibilités régionales en sucre certifié bio (coûtant deux fois plus cher que le conventionnel).
MCR
Pour réussir des vinifications techniques, les alternatives au sucre existent, comme l’assemblage 85/15 de millésimes différents (pour baisser les degrés alcooliques 2020 et remonter ceux 2021) et les MCR. Ces derniers sont le seul outil d’enrichissement des moûts dans le Sud, où l’ajout de sucre de betterave est interdit. Actuellement, les demandes de MCR sont significatives sur l’ensemble du vignoble français rapporte Yoann Maillard, le directeur marketing de l’union de distilleries coopératives Grap’Sud, l’un des principaux producteurs de MCR pour le marché français. Faisant tourner à plein régime ses installations de la Mancha pour répondre à la demande de ses adhérents et d’autres vignobles français, « nous sommes globalement en mesure de faire face à la demande » rassure Yoann Maillard, ajoutant que les tarifs sont en forte hausse de leur côté, répondant aux lois de l’offre et de la demande avec une augmentation de 40 à 50 % du prix des MCR depuis le début de la campagne par effet d’aubaine.
« Je n’entends pas parler sur le terrain de gens n’ayant pas réussi à trouver de MCR, mais la raréfaction de vins espagnols après le gel raffermit les prix. On a atteint des prix allant de 2,5 à 4 €/°.hl » indique Laurent Vial, le directeur du secteur de l’Hérault pour l’Institut Coopératif de la Vigne (ICV). À date, la situation sanitaire reste globalement maîtrisée, mais l’absence d’évolution des degrés alcooliques et l’humidité de la météo forcent à accélérer le ramassage. « Cela faisait des années que l’avait oublié la problématique d’un millésime tardif ayant du mal à accumuler des sucres » souligne Stéphanie Prabonnaud, consultante pour le laboratoire Natoli & Associés dans le Langeudoc, qui souligne des problèmes de livraison de MCR pour les gros faiseurs alors que les fermentations alcooliques n’attendent pas en cuve. « On ne parle pas d’enrichir toute une cave, mais certains lots (comme le cinsault après les pluies) » conclut l’œnologue.