*secret des délibérations
* opinion partagée par Irène Frain membre du jury
J’achète toujours le bouquin du lauréat du Prix « Le Point » du Polar européen, c’est de la bonne came.
Cette année, plus encore, bonne pioche.
Le cold case, en matière de polar, c'est toujours un peu la même rengaine. Une découverte fortuite, une rencontre hasardeuse et un enquêteur qui, des décennies après un crime, se métamorphose en justicier. Il ouvre des archives poussiéreuses, remonte des généalogies plus torses qu'un chêne pluriséculaire et ne lâchera pas le morceau avant d'avoir coffré celui qui a fait le coup. Avec L'Eau rouge, Jurica Pavicic a choisi d'exploser les codes du genre et il a si bien réussi que, séance tenante, c'est son passé à lui qu'on a envie de fouiller.
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L'Eau rouge, un polar croate de Jurica Pavičić: une quête dévorante sur fond de Yougoslavie déchiré
Le 11 mars 2021 par Karen Lajon
Septembre 1989. L'année de tous les bouleversements : le dernier automne communiste croate. Le mur de Berlin tombera le 9 novembre et l'équilibre des forces au plan international en sera à jamais modifié. Dans la famille Vela, l'onde de choc n'est pas encore arrivée jusque-là. La vie coule, heureuse, faîte de milles petites habitudes. Le port, le poisson saboté à la cuisson par Jakob mais que Vesna regarde avec un amour apaisé. "Puisque ça lui fait plaisir." Silva a 17 ans, c'est la pin-up indomptable de Misto, un bled sur la Côte dalmate. Elle est la soeur jumelle de Mate, un garçon un peu sans relief pas comme elle, la fille de tous les espoirs, de toutes les audaces.
Une tragédie familiale
Silva est à la fois partout et nulle part dans le roman de Pavicic puisque dès le départ, elle disparaît. C'est le début d'une tragédie familiale qui va courir sur trois générations. Le flic Gorki Sain, la trentaine, venu tout spécialement de la grande ville Split, va s'occuper de ce qui sera dans un premier temps, une histoire de fugue, avant de devenir "la" grande affaire de tous les protagonistes. On est dans la Yougoslavie de Tito, les canons n'ont pas encore pulvérisé la nation communiste rétive au grand frère russe moscovite.
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Jurica Pavicic mêle admirablement bien ce drame familial et intime, aux bouleversements d’un pays qui connaitra les turpitudes de l’Histoire, et ses conséquences.
De la chute du communisme, à la guerre, en passant par crise économique et un libéralisme à tout crin qui ne manquera pas d’altérer les liens sociaux de cette petite communauté villageoise, l’auteur nous offre une fresque remarquable qui court sur près de trois décennies.
C’est beau, c’est triste, c’est poignant, c’est une magnifique littérature que les éditions Agullo nous ramènent de Croatie