« Tous les chemins mènent à Crémone »
L’auteur, Tommaso Mellili –« L’écume des pâtes » – se rend chez Stefano, son premier maître, qui va ouvrir son premier restaurant.
« Mais les marubini au bouillon, tu en fait ou pas ? »Je pose la question avec une certaine appréhension, car dans ce système de valeurs que nous seuls comprenons, elle est cruciale.
Le menu des trattorias avec lesquelles nous avons grandi ici, jamais écrit mais toujours récité à voix haute tel le rosaire, commençait toujours par ce plat : les marubini, les raviolis typiques de Crémone.
Au début du XVe siècle, Cabrino Fondulo était le seigneur de Cremone. Pour toute une série de raisons, il décida en 1414 d’inviter dans sa ville les deux hommes les plus puissants de l’époque, le pape Grégoire XII et l’empereur Sigismond : après une courte visite guidée, son plan était de les conduire au sommet de la cathédrale, notoirement haut à Cremone. Une fois sur place, après leur avoir montré la vue imprenable sur la ville, Fondulo voulait les pousser tous les deux dans le vide, résolvant d’un seul coup plusieurs questions politiques épineuses.
Le pape et l’empereur acceptèrent l’invitation. Mais d’abord, il fallait manger.
Pour l’occasion, les meilleurs cuisiniers de la région avaient été convoqués et on leur avait demandé d’inventer quelque chose de nouveau, d’extraordinaire et d’inoubliable. Ils firent donc des raviolis, à servir dans leur bouillon, et, pour impressionner leurs visiteurs, ils y mirent pratiquement toute la viande qu’ils avaient sous la main : bœuf, chapon et porc, voire cotechino ou saucisson – on ne sait pas avec certitude. Ils firent bouillir ces trois viandes ensemble, puis les hachèrent et farcirent les raviolis à cuire dans le même bouillon et les servirent nageant encore dedans.
Cabrino Fondulo est donc assis à table et observe attentivement ses deux invités, il se frotte les mains en attendant le moment où il les jettera du haut de la tour. Lees raviolis arrivent et ses hôtes les trouvent délicieux, ils multiplient les compliments, car à Mantoue et à Modène on n’en trouve pas d’aussi bons. Fondulo est ému, il les goûte à son tour pour la première fois. Selon la légende, il s’exclame en crémonais quelque chose comme : « Ah, ma chiestti chi,’i è i ma rubéén », c’est-à-dire : « Par Dieu, mais ce sont mes rubis. » Bref, il finit par oublier d’expédier ses invités dans le vide.
Dès lors et jusqu’à aujourd’hui, il a toujours été clair que les marubini devaient avoir la forme d’un rubis et, par conséquent, il existe trois versions différentes de cette forme, mais pas du contenu.
On comprend donc pourquoi ma question était si délicate : choisir d’en faire signifie s’inscrire dans une tradition locale forte, qui s’est néammoins essoufflée ces dernières années. Choisir de ne pas en faire, c’est rejeter ce monde ancien.
« Et alors ? Marubini ou pas ?
Cremonese Marubini ICI
Michela Gaimarri , blogueuse culinaire et instagrammeuse de Crémone nous présente un plat typique de sa ville: les marubini en bouillon (Marubeen) . C'est un plat de la tradition crémonique, le plat des fêtes, magnifiquement substantiel et savoureux qui a ses racines dans la tradition paysanne.
C'est une pâte farcie (reconnue comme un produit alimentaire traditionnel lombard) et sa caractéristique est qu'elle est cuite et servie dans les trois fameux bouillons (i tri brod), élaborés avec trois types de viande différents (poulet, bœuf et porc).
Ils sont vraiment fabuleux. Attention à la recette ... ..