Qui connaît Maxime Lisbonne (1839 – 1905) ?
Ce héros de la Commune, compagnon de Louise Michel, méritait d'être sorti de l'oubli, ce qu'a fait Didier Daeninckx avec son talent habituel dans le banquet des affamés.
Sans tergiverser, l'auteur donne la parole à son héros qui s'est toujours dressé contre le mensonge.
« Bohème, mauvais soldat, criminel vulgaire, incendiaire et assassin », l'a qualifié le capitaine Charrière, commissaire du gouvernement auprès du conseil de guerre. Cela a beaucoup choqué notre homme qui ne reconnaît qu'un mot dans cette liste : bohème.
Dès l'âge de 16 ans, il était engagé dans la troupe de Napoléon III au siège de Sébastopol où le choléra faisait plus de victimes que la guerre. Affecté au théâtre Zouave, il découvre sa vraie vocation et il signe pour sept ans ce qui l'emmène en Italie puis en Syrie où un officier découvre que son nom cache un changement de patronyme effectué par son père, juif expulsé de Lisbonne, changeant son prénom, Jacob, pour Auguste.
Conter toutes les aventures vécues par Maxime Lisbonne serait bien trop long. Il faut noter simplement qu'il épouse Élisa Dodin en 1866 et reconnaît leur fils, Félix, qui a déjà 10 ans. Il se lance dans l'organisation de spectacles mais la situation politique de la France est très chaotique. Paris est assiégée le 1er septembre 1870 et Napoléon III hisse le drapeau blanc à Sedan. La République est proclamée. Victor Hugo revient après dix-huit ans d'exil.
Hélas, la famine sévit dans Paris et Maxime Lisbonne ne peut rester indifférent : « Je n'avais qu'un désir en combattant : aider à la conclusion d'une paix honorable et rentrer la tête haute dans la vie civile, consacrer mon existence au théâtre. »
Commence alors une lutte sans merci entre la Commune et les Versaillais dirigés par Adolphe Thiers. « Ferry l'affameur » a fui et notre homme déplore un attentisme qui se révèlera néfaste. Thiers fait tirer sur Paris. C'est la guerre civile. Maxime Lisbonne est un meneur d'hommes, se battant au milieu des cadavres et des ruines.
Pour protéger Henri Bauër, fils naturel d'Alexandre Dumas, il se laisse accuser d'avoir fait brûler la rue Vavin et cela va le poursuivre longtemps. Blessé grièvement, il a la gangrène et demande à ce que soit inscrit, sur sa tombe : « Maxime Lisbonne, Colonel de la Commune, membre du Comité central. »
Le 25 janvier 1873, il embarque, à Toulon, avec 360 forçats de droit commun et 60 déportés de la Commune pour Nouméa et l'île de Nou, matricule 4589, où il retrouve Louise Michel quelques mois plus tard. Il est choqué par ce qui est écrit sur la Commune par George Sand, Flaubert, Théophile Gautier, les Goncourt, Dumas fils.
Les conditions de vie sont très dures mais, en France, Hugo, Zola, Raspail, Jules Guesde, Clémenceau, Naquet… demandent la clémence pour les déportés de la Commune. Enfin, après sept ans, il revient, prend la parole à la gare Montparnasse et retrouve Élisa. Tous les deux, ils reprennent la vie théâtrale, organisant ce fameux Banquet des affamés pour les malheureux du VIIIe arrondissement.
Retiré à La Ferté-Alais, il meurt à 66 ans, peu après Louise Michel et seul, le journal L'Humanité lui rendra vraiment hommage.
Signé Fandol le 30 juillet 2017
La Commune inspire les auteurs de romans noirs. On avait vu Patrick Pécherot avec Une plaie ouverte, sortir un beau texte où se mêlait la vie tragique de la Commune à une méditation sur la modernité et ses tracas [1]. Ensuite, c’était Hervé Le Corre qui après L’homme aux lèvres de saphir, donnait l’excellent Dans l’ombre du brasier, avec une vraie enquête sur un sérial killer [2].
Le propos de Didier Daeninckx qui a fait ses preuves dans le roman noir, n’est pourtant pas d’écrire un roman criminel qui serait situé pendant la Commune. L’idée est de faire revivre un personnage assez peu connu, Maxime Lisbonne, un homme plutôt curieux. D’origine juive portugaise, mais athée, il avait une attirance singulière pour les carrières militaires et pour le théâtre. C’était une forte tête, un insoumis. Pendant la Commune de Paris, il s’illustra dans la bataille, gagnant ses galons de colonel. Mais, blessé et fait prisonnier, s’il échappa à la peine de mort, il fut déporté en Nouvelle Calédonie, avec tout ce que cela signifie, en même temps que bien d’autres, notamment Louise Michel. Théâtreux dans l’âme, à son retour de déportation, il se lança dans le montage d’affaires dans le spectacle, mais aussi dans la restauration. Il avait eu cette idée loufoque d’ouvrier un restaurant, La brasserie des frites révolutionnaires, où on servait des plats qui rappelaient le bagne et la défaite des Communards.
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MAXIME LISBONNE
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