6 mars 2020
Au temps du groupe Saint-Germain j’ai côtoyé Jean Viard l’homme du Sacre de la terre… ICI
Récemment je l’ai vu à la télé dans l’émission d’Yves Calvi sur Canal + l’Info du vrai, analyser la nouvelle galéjade à la mairie de Marseille, le tango du Vieux Port Rubirola&Payan.
« Noël sera le tournant vers une renaissance de la société », selon le sociologue Jean Viard
Le sociologue Jean Viard, qui a signé un livre sur l'impact de la pandémie de coronavirus sur l'avenir de la société, "La page blanche" aux éditions de l'Aube, fait le point sur l'impact de la crise sanitaire sur la période symbolique des fêtes de fin d'année.
Pour Jean Viard, sociologue et auteur du livre "La page blanche" (éditions de l'Aube) sur l'impact de la pandémie de coronavirus sur la société, les fêtes de fin d'année marquent un virage vers une renaissance de la société, "secouée" après une année marquée par la crise sanitaire et appelée à se réinventer avec la perspective du vaccin, un "horizon dans la brume".
Interview.
La Dépêche du Midi : En quoi le symbole des fêtes de fin d'année va-t-il changer cette année avec le coronavirus ?
Jean Viard : On est tous déprimés, on vient de passer une année épouvantable et on avait besoin de faire la fête. Il risque d'y avoir des tensions dans beaucoup de familles et il y aura sans doute environ 20 % des gens qui ne respecteront pas les règles sanitaires. Pour le Nouvel an, ce ne sera pas le triomphe de l'amitié et de l'érotisme des autres années. Ça risque d'être difficile pour les jeunes.
Mais pour Noël, qui est la communion autour de l'espérance, on est en quelque sorte revenus à l'origine de la fête chrétienne. Le vaccin est devenu l'étoile du Berger. Les Rois mages s'appellent aujourd'hui Moderna, Pfizer et BioNTech. On va sans doute moins dépenser, on sera moins nombreux et on ne garde que ceux qu'on aime le plus, sans les personnes qu'on est contraints d'inviter... On revient à des valeurs plus traditionnelles, avec le foyer au cœur du refuge. On pourrait presque dire qu'il y a une purification de la fête de consommation.
- Les confinements successifs et les gestes barrière nous ont-ils conduits à nous replier sur nous-mêmes et vont-ils rendre ces moments de retrouvailles plus compliqués ?
Justement, cette année, on s'est repliés sur nous-mêmes et le foyer familial s'est placé au cœur de la sécurité. Ça a revalidé la notion de famille légale, officielle. Je pense que là, à cette période de Noël, il y a une majorité de familles pour lesquelles ça va bien se passer. On a tous peur de la maladie et on veut protéger les autres et ne pas tomber malade soi-même.
On a tellement entendu les consignes, la plupart des gens se lavent les mains, portent le masque... Et on va s'adapter, peut-être passer deux heures sur Zoom avec Papy et Mamie qui n'ont pas pu venir le soir de Noël. L'amour familial est devenu numérique. Quelque part, ça sera un Noël original, ça donne plus de sens à une fête obligatoire et répétitive, qui est parfois devenu une débauche d'argent. Même si on n'est pas nombreux, on a besoin de se voir.
- La perspective d'une troisième vague après les fêtes et d'un possible reconfinement ne risque-t-elle pas de balayer cette notion "d'espérance" qui symbolise justement Noël ?
Noël, c'est un peu le tournant, qui arrive en concomitance avec le vaccin. Dans la symbolique de nos sociétés occidentales, c'est un moment de naissance, là, ce sera un moment de renaissance. En janvier, février, mars, il y aura un regain de l'épidémie et un probable reconfinement, on le sait tous ! Mais ce n'est pas très grave parce qu'il y a la perspective du vaccin, c'est la porte de sortie. Même s'il y a des personnes réticentes, il y aura quand même un mouvement autour du vaccin et l'horizon va se dégager dans la brume. Il y aura quand même de la brume mais, quand on voit l'horizon, c'est beaucoup plus supportable.
- En quoi consistera, selon vous, cette "renaissance" ?
Je pense que l'on vit une épopée de temps de guerre. Mais comme à chaque grande crise, il y a ensuite un regain de désir, d'amour et de création. C'est ce qui s'est passé pendant les Trente Glorieuses. Depuis un an, la société a été secouée comme un prunier. On a beaucoup appris pendant cette période et cette année a été marquée, mais pas forcément que de négatif. Les couples se sont retrouvés, les gens ont investi dans leurs maisons, ils se sont posé des questions sur leur travail... Et les Français ont économisé 200 milliards d'euros, qui pourront être dépensés dans la création d'entreprises, dans les commerces... Il y a toujours une énergie énorme qui succède aux crises.
Propos recueillis par Capucine Moulas