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31 décembre 2020 4 31 /12 /décembre /2020 06:00

 

L’avantage d’avoir fait mes études secondaires dans une école d’agriculture c’est que l’on m’y a enseigné les fondamentaux de l’agronomie, et dans nos travaux pratiques quotidiens, avec le frère Bécot, ce qui faisait que du raisin devienne du vin.

 

Ce n’était ni de l’idéologie, ni l’observance d’une religion, mais de la pratique.

 

La confusion savamment entretenue par la gente journalistique, les antis de tout bord, entre les pratiques dans la vigne et l’élaboration du vin permet d’éviter de se poser les bonnes questions, mais sert à disqualifier le camp d’en face.

 

Dans la vigne, comme dans toutes les cultures, l’émergence du Bio, puis de la biodynamie, est le résultat de l’intransigeance moderniste des sachants, leur cécité, leur surdité, leur absolue résistance face à une culture sous perfusion d’engrais et de pesticides,  confortée par les qui ne s’intéressaient qu’au vin, la presque totalité des amateurs et des critiques. Aller dans les vignes aurait sali leurs belles godasses.

 

Cette opposition frontale a eu pour résultat d’exacerber le goût que nous avons pour les guerres de religion, une forme de radicalisation qui a transformé le bio, et plus encore la biodynamie en des chapelles bien verrouillées par les nouveaux papes de la pureté originelle.

 

Très peu pour moi, ce qui compte, ce qui permet de prendre les bons virages, les bonnes orientations ce ne sont pas les anathèmes, les excommunications, c’est d’affronter la réalité et celle-ci est complexe, elle ne se réduit pas à des croyances.

 

Que des pratiques agronomiques plus soucieuses de l’environnement, de la vie des sols, des désirs des consommateurs, puissent se mettent en œuvre pour un produit non-essentiel, que l’on gargarise au terroir tous les jours que Dieu fait, ne relève pas de l’angélisme mais de l’intelligence économique, sociétale.

 

Pour autant, le vin issu de raisins biologiques ou biodynamiques, n’en déplaise aux détenteurs des tables de la loi, ne recèle pas une supériorité constatable sur celui issu d’une culture dite conventionnelle. Depuis que je m’intéresse à ces questions, je n’ai jamais trouvé d’études sérieuses sur ce sujet. Celles qui existent sont biaisées.

 

En effet, dans le chai, la boîte noire, les pratiques œnologiques modernes, les intrants pilotés par les œnologues et les marchands de poudre, y compris du côté des vins dit bios, sont déterminantes pour le goût du vin. L’affirmation exacte : « il n’y a plus de mauvais vin » à un avers qu’il faut avoir le courage de constater : ils se ressemblent comme des cousins-germains. Une caviste de mes amies m’avouait qu’après dégusté à l’aveugle un nectar du sibérien des PO, elle pensait avoir bu du Bordeaux.

 

Les amateurs de vin qui raillent les boissons alcoolisées ou non, pur produits industriels, reproductibles à l’infini, devraient se poser des questions  au lieu de disserter jusqu’à plus soif sur des différences qui n’existent que dans leur tête, la mémoire dégustative m’a toujours fait sourire.

 

Face à l’unanimité des sachants, les têtes de turc des amateurs et des journalistes furent les vins nu et surtout leurs fans, ceux qui proclamèrent qu’ils allaient faire avec eux la Révolution, prendre le pouvoir, changer le monde. Des rigolos, barbus, chevelus, des pas sérieux.

 

J’aime les vins nu mais je n’ai pas été affilié aux fans de Lénine, sceptique que je suis sur les minorités dites agissantes qui précèdent le bon peuple pour lui indiquer le bon chemin. Je suis un buveur de vin nature mais je suis stupéfait par la vitesse à laquelle, les nouveaux chefs de cette tribu ont transformé leur combat en gestion d’un fonds de commerce. Afin de d’étoffer la petite troupe, voir l’énorme succès du nouveau syndicat des vins fait nature, ils pratiquent l’annexion, le bio, la biodynamie, le nature dans le même sac. Ce qui me met encore plus en joie ce sont les nouveaux grands amateurs de vins nu qui versent dans le même travers que les Butane&Degaz : ils encensent tous les vins de leurs copains.

 

Du côté de la critique, qui se veut « sérieuse », même si elle est profondément conservatrice –je n’écris pas réactionnaire car, après tout le bio fut une réaction contre les excès des marchands de produits merveilleux – réduire les vins nu aux vins vinifiés sans soufre est pratique, ça lui permet de se refaire une virginité à bon compte, de prendre le sens du vent. Désolé mais un vin vinifié sans soufre n’est pas forcément un vin nature. 

 

Non monsieur Abellan (voir plus loin) la mode des vins alternatifs, n’est pas une mode et la culture bio  ou biodynamique ne concerne que le raisin, la confusion est commode mais elle ne traduit qu’un manque de rigueur scientifique.

 

Ambiguïté commode, en sortir, comme le notait Talleyrand, ne se fait qu’au détriment de ceux qui s’y complaisent.

 

Pour le petit monde du vin, bien étroit qui pratique l’entre-soi, je le cite encore « L’inertie est une vertu, l’activité est un vice… »

 

Tout ce qui s’écrit sur les réseaux sociaux se réduit à un peu de vent dans les sarments des ceps de vigne *provoquant de minuscules tempêtes dans un verre d’eau ou de vin.

 

*« Du vent dans les branches de sassafras » René de Obaldia

 

Dans ma vie agricole j’ai toujours été fasciné par la prétendue supériorité de la viticulture sur toutes les autres formes de culture, élargir la focale, être curieux des autres, a conduit les grands chefs à déconstruire l’AOC, à ignorer l’évolution de nos sociétés, à se complaire dans une vision passéiste du vin. L’addition est au rendez-vous.

 

C’est signé d’un baby-boomer grand soutien à la consommation du vin qui regrette que les vins nu ne lui confèrent l’immortalité et qui a fait son temps, a tourné la page, et ce sera aussi le lot de beaucoup des conseilleurs actuels, qui ne font que gratter du papier, ils ont vécu. Qu’ils ne prennent pas à mal mes gratouillis, l’avenir est à la proximité et la proximité c’est : la ou le caviste indépendant qui déguste tous les vins qu’il vend, se déplace dans les vignes, tente de répondre aux souhaits de ses clients. À la différence des conseilleurs, s’ils se trompent, si ses clients ne la ou le suivent pas, c’est la clé sous la porte.

 

Pour illustrer mes propos iconoclastes : La LPV titre un grand débat de fond : Clap de fin pour le guide Bettane et Desseauve ?§ ICI 

 

Le grand et incomparable « Jérôme Pérez a répondu au sujet : Clap de fin pour le guide Bettane et Desseauve !

 

C'est évident que dans cette nouvelle culture de l'immédiateté, la rédaction devient obsolète.

 

Il faut se battre pour préserver le verbe attaché aux sensations. Bien mieux que des étoiles ou des pouces en l'air.

 

Et s'il y a en effet la paresse du lecteur, il y a en même temps la paresse du rédacteur qui va de concert. C'est bien la lutte de LPV : mais c'est pitié de voir d'anciens rédacteurs de talent se perdre dans les brumes de Facebook ou d'Instagram pour jubiler de leurs trophées photographiés avec ce qu'ils appellent des amis et qui ne viennent plus ici que pour prendre sans donner.

 

Quand Jacques Dupont étudie la biodynamie, ça fait des étincelles

Dimanche 27 décembre 2020 par Alexandre Abellan

 

[Article publié le 6 février 2020] Dans un dossier remarqué (« l’enquête qui pique » le 23 janvier dernier), le journaliste du Point s’est lancé à contre-courant de la mode des vins alternatifs. Revenant à la genèse des vins biodynamiques, il en fait tousser certains dans les allées du salon des vins de Loire et même s’étrangler derrière les stands de la Levée de la Loire ou de Demeter. ICI

 

 

 

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commentaires

P
Fini la trêve des confiseurs ! Avec malice faisons remarquer à notre cher Taulier que la phrase sur l' ambiguîté est de Jean-François Paul de Gondi, Cardinal de Retz (ouf !)<br /> " On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment "<br /> Sauf erreur of course !
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P
“ Depuis que je m’intéresse à ces questions, je n’ai jamais trouvé d’études sérieuses sur ce sujet. Celles qui existent sont biaisées ”<br /> <br /> Ah, parce que l’agronomie officielle n’est pas biaisée, elle ? <br /> Quand Marc-André Selosse dans un de ces cours en ligne présente deux points de vue sur un problème agronomique le premier issu des *fondamentaux de l’agronomie* et l’autre des dernières découvertes sur la vie du sol c’est donc bien qu’il y a plusieurs approches, non incompatibles d’ailleurs, mais diverses tout de même.<br /> Dans les bouquins d’agronomie du début du 20è la mycorhize n’existe pas, sinon sous la forme d’un parasite, j’arrête là faute de temps.<br /> Donc les fondamentaux sont à revisiter, la génération des vins nus pense le faire, mais comme le dit Olivier “ l'enseignement de la biologie décline ” et les synthèses sont rares, chacun doit se fabriquer des morceaux de vérité à partir de son expérience, de ses moyens et de sa curiosité. <br /> Bon bout d'an ...
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J
Ben oui je n’ai jamais affirmé que l’agronomie officielle me séduisait toujours ce putain esprit de chapelle
P
J'ai beaucoup de mal à comprendre cette irrépressible envie des hommes à tout vouloir codifier, réglementer comme pour imprimer leur position et l’imposer au monde et ouvrir, comme le souligne le Taulier, d’abord à la polémique puis pour des choses plus graves vers des catastrophes.<br /> Que ne restons pas chacun à cultiver notre jardin, sans s’occuper de celui des autres et ou nos rapport, de bon voisinage, consisterait à se refiler des tuyaux pour tel ou tel problèmes rencontrés.<br /> Ce besoin mortifère de figer les choses…<br /> Est il difficile de comprendre comme le dit Vladimir Jankélévitch dans un essai qu'il titre reprenant un mot de Rilke que nous sommes tous « Quelque part dans l'inachevé ».<br /> Dieu aidant, Dieu voulant à tous, bonne année quand même. Oublions le vain de cette année deux mille qui achève la deuxième dizaine de ce nouveau siècle.
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O
Bonjour à tous,<br /> <br /> Soit. Je penserais presque comme à chaque fois à la question: où en sommes nous ? Pour ne pas copier : D'où venons nous, qui sommes nous, où allons nous ? J'ai peur de la réponse. <br /> Le problème du vin est que nous avons mélangé techniques, science et commerce. Ca ne peut pas faire bon ménage. Avec en plus des considérations esthétiques. Et une hiérarchie des genres. <br /> Conjointement l'enseignement de la biologie décline. Marc-André Selosse le regrette. Et du vin malheureusement on peut faire n'importe quoi. C'est assez déprimant au final. Et certains vins peuvent donner l'illusion d'être bons, voire grands alors que le chemin de leur naissance n'est pas sans poser question. De plus j'ai peur de projeter qu'en se posant la question de l'agroécologie, et le stockage du CO2 dans les sols on change obligatoirement le profil de certains vins qu'on a porté au pinacle. Alors que ce changement de pratique est non seulement la vertu, mais il est nécessaire. Se poser la question des arbres, des plantes, de la vie, du respect du vivant, du respect de la glomaline est un chemin intéressant. Le vin ne devient alors qu'un exutoire ( ça peut choquer !!!). Il ne faut pas oublier que l'homme a longtemps été chasseur-cueilleur et que la sédentarité ne s'est installée que par contrainte, et que dès qu'ils pouvaient les hommes retournaient à leur condition initiale. Bonne journée.
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