Le mot rillettes, me dit-on, vient de loin. Au XIe siècle la reille, un long bâton plat de bois donne son nom à une préparation spécifique des viandes du cochon. Ce nom, pense-t-on vient du fait que l’on utilisait une planchette pour les émincer avant cuisson. Le mot rille désigne d’ailleurs, dès 1480, de longues bandes de lard. Rassurez-vous, ma science de la rillette n’est pas infuse mais le résultat d’un petit mâchon auquel je fus convié par une bonne amie très nature.
J’y ai appris qu’à cette époque le Grand Ménagier, le plus grand traité culinaire du Moyen Âge conseillait de « faire frire les fèves à la graisse de rihettes » et que, dès 1546, dans son Tiers Livre, le tourangeaux Rabelais, parlait de rilles. Il s’agissait alors de friandises préparées à partir de dés de viande de cochon rissolées et confites dans de la graisse.
Les rillettes sont entrées dans la littérature grâce à un autre tourangeau, Honoré de Balzac. Félix de Vandenesse, héros du Lys dans la Vallée, rend hommage à cette spécialité locale : « Les célèbres rillettes et rillons de Tours formaient ’élément principal du repas que nous faisions au milieu de la journée, entre le déjeuner du matin et le dîner à la maison ». Autre grande figure, Émile Zola en 1873 dans Le Ventre de Paris célèbre avec gourmandise « le pot de rillettes ».
Bref, si vous souhaitez tout savoir sur les Rillettes de Tours et celles du Mans, reportez-vous à mes savants écrits du 15 février 2013 Les Rillettes de Connerré et les vins de Mathias Marquet le naturel c’est la quintessence du plaisir ICI
Et puis voilà, tout change Bordeau Chesnel, propriété de Savencia la famille Bongrain : Caprice des Dieux, qui fournit la moitié des rillettes consommées en France, après les rillettes de poulet rôti au début des années 2000, puis les rillettes sans graisses ajoutées en 2010, voici les rillettes végétales
Ce ne sont pas, à proprement parler, des rillettes. Mais ce produit en a la texture et, par certains aspects, le goût. Il est conditionné dans les mêmes pots et se déguste de la même manière.
Bordeau Chesnel lance « La végétale" : un “tartinable” à base de soja et de légumes mijotés, relevés avec une pointe d’aromates, sans porc ni aucune viande. » Cette « innovation », qui a nécessité deux ans de recherche, signe disent les communicants : un tournant majeur pour l’entreprise sarthoise.
Le leader français des rillettes met ainsi un pied dans le marché du végétal en pleine expansion.
« Nous répondons aux attentes de flexitarisme », explique Pierre Hébert, le directeur général de Bordeau Chesnel. « Les Français alternent de plus en plus la consommation de produits à base de viande et la consommation de produits à base de végétaux », assure-t-il, citant plusieurs études réalisées sur le sujet. Selon le chef d’entreprise sarthois, cette nouvelle habitude alimentaire concerne aujourd'hui « une personne sur trois » tandis que « 60% des Français ont acheté un produit végétarien l’an passé ».
S’il n’est pas possible – d'un point de vue réglementaire – de parler de rillettes (car il n’y a ici ni porc ni volailles) c’est, dans le pot, à s’y méprendre ! « La végétale en a toutes les caractéristiques de texture et de saveur », reconnaît Pierre Hébert, « La recette se rapproche des tartinables à base de viande. Sa texture fibrée est la plus proche possible de nos rillettes traditionnelles. De même, son goût rappelle les notes de nos viandes mijotées qui composent les rillettes », détaille l’entrepreneur sarthois.
La végétale ne renferme « ni arôme artificiel ni additif », assure le dirigeant qui, pour l'occasion, a noué un partenariat avec une PME locale. Bordeau Chesnel n’est pas la première entreprise charcutière à prendre le virage du végétal. Herta et Fleury&Michon, par exemple, se sont déjà lancés
La recette est disponible au rayon charcuterie-tartinables au prix recommandé de 2,55 € le pot de 180 g. Elle est déjà disponible dans les enseignes Cora, Casino, Géant Casino et dans quelques Intermarché.
La marque a vu le jour en 1922 grâce à un couple : Jules Bordeau et Marie-Louise Chesnel qui décida d’offrir leurs rillettes aux voyageurs et techniciens de la ligne de chemin de fer Paris-Brest. Des années plus tard, le jeune couple ouvre une charcuterie près de la ligne, à quelques kilomètres du Mans, et se lance dans la fabrication. Avec toute la réussite qu'on lui connaît aujourd'hui.
Le soja étant un produit typiquement sarthois, je trouve qu’il y a là un glissement suspect qui entache notre image nationale de patrie du bon goût. L’ex-Ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, maire du Mans, si prompt à dégainer pour vilipender notre Macron national qui frétille dès que c’est nouveau, n’a pas encore réagi. C’est regrettable, je le déplore…
Quel temps de cochon
Temps froid et humide
Origine : Expression française qui trouve son origine dans les campagnes d'antan. En effet, à cette époque, l'abattage du cochon était effectué à des fins nourricières mais vu la corpulence l'animal, une partie en était conservée pour des temps plus difficiles. La principale méthode de conservation était le saloir et pour que la prise de sel se fasse dans les meilleures conditions, il fallait disposer d'un temps clément pour l'opération à savoir un temps froid et humide. De ce fait le porc ne pouvait être tué pour servir à cette fin qu'autour du mois de novembre.