Les saillies de Chirac, grand peloteur du cul des vaches, bâfreur, buveur de bière, serreur de manettes hors catégorie, adorateur de sumo, humour de carabin, pourraient faire l’objet d’une anthologie à la manière de Desproges.
Expression favorite de Chirac « Ça m'en touche une sans faire bouger l'autre… » Voir plus bas.
Chirac-Rocard, une amitié de 65 ans
Dans une déclaration écrite à l’AFP, Jacques Chirac a rendu hommage à «son ami de jeunesse» dont il a appris le décès, samedi, «avec une profonde tristesse».
« La France perd un homme d'État qui unissait, de manière rare, le goût des concepts et la capacité d'action et de réalisation»
« Leur amitié remonte à Sciences-Po, dont ils fréquentent les bancs au début des années 50. Dans le livre d’entretien «Si la gauche savait», avec Georges-Marc Benamou, paru aux éditions Robert Laffont, Michel Rocard racontait sa rencontre avec celui qui allait devenir président de la République.
«Ce Chirac était un jovial, un gars généreux, pas trop compliqué. Il aimait s’amuser. J’avais essayé de lui fourguer la carte des Etudiants socialistes SFIO. Il s’en souvient. Il ne l’a pas prise. (…) C’était vraiment un bon copain. Je me souviens surtout qu’il me bluffait par son aisance et ses manières. J’étais éberlué par son audace auprès des filles.»
Michel Rocard explique qu’avec Jacques Chirac, ils avaient en commun «l'humour, le refus de l'arrogance et la simplicité».
Hier (juin 2009), les deux hommes ont déjeuné ensemble à l'Auberge d'chez eux, un restaurant gastronomique du VIIe arrondissement de Paris. Ils ont évoqué la politique française à voix haute, faisant profiter les tables voisines de leur conversation. (ils sont sourds tous les 2)
« Et toi, tu t'entends bien avec Sarkozy ? » demande Rocard.
« À ça va, ça va, répond Chirac. Mais quand j'ai un message à faire passer, j'appelle Claude Guéant. C'est un bon. Un type très bien, très honnête. »
D'accord sur les conséquences « désastreuses » du réchauffement climatique, ils ont envisagé de publier ensemble un manifeste contre la déforestation, sous le patronage du chef de l'Etat. « On va aller le voir tous les deux », glisse Chirac. « Dans la vie, il y a des moments où c'est bien d'être sérieux ! » lance Rocard. « Tu as raison, mais c'est sacrément fatigant », plaisante Chirac
Avant de partir, Chirac a proposé de raccompagner en voiture l'ancien Premier ministre. Qui a décliné l'offre en souriant : « Tu sais, Jacques, j'ai aussi une voiture. La République a cela de bien qu'elle est généreuse avec ceux qui l'ont servie, même à des postes aussi subalternes que celui de Premier ministre. »
Jean-Luc Barré, qui s'est chargé d'écrire les Mémoires de l'ancien président de la République, l'a fréquenté intensément durant quatre ans. Il a livré des détails étonnants sur sa personnalité et celle de son épouse. Avec au passage, quelques punchlines inscrites dans le marbre.
C'est un homme qui a acquis la confiance de Jacques Chirac, et par la même une occasion en or d'en dresser un portrait parfaitement intime, inédit. Jean-Luc Barré, biographe de 62 ans, a permis à l'ancien chef de l'Etat, décédé des suites d'une longue maladie le 26 septembre 2019, de publier ses mémoires. Deux tomes, sortis en 2009 puis 2012, dans lequel se raconte l'ancien leader de droite. En le fréquentant durant quatre années,
« On était autour d'une petite table, Chirac buvait du punch à 10h du matin, donc je buvais du punch à 10h du matin, ou du gin tonic, avec un peu de saucisson, il y avait quelque chose de très convivial, on parlait, on bavardait ».
Parfois, il adoptait un ton et des formules absolument incroyables, dignes de Desproges, pour ridiculiser sa propre relation avec Bernadette Chirac.
« On beaucoup ri ensemble, beaucoup travaillé, mais surtout beaucoup ri », confie Jean-Luc Barré, qui se souvient finalement d'une punchline aussi drôle que cruelle :
« Un jour, je lui dis en riant ‘vous avez quand même beaucoup trompé votre femme », et il me répond « non, vous faites erreur, je n’ai pas trompé ma femme, je me suis trompé de femme ». C’est presque du Sacha Guitry, mais non, c'est de lui ».
Physique
« Je sais que j'ai une gueule de droite, mais on peut pas se refaire. »
Lucide, dans Libération en mai 1995.
Aléas
« Dans la vie il y a des hauts et des bas. Il faut savoir mépriser les hauts et repriser les bas. »
En 1986, année de son retour au pouvoir, au poste de Premier ministre.
Action
« Lorsque la prudence est partout, le courage est nulle part. »
Parole de sage dans Une nouvelle France : réflexions (1994).
Politique
« L'État doit être un garant, et non un gérant. »
Une pique contre les socialistes, lors d'un meeting en 1984.
La France
« La France a besoin de passion - celle de l'amant - et de constance - celle du mari. »
Cité sur France 2, en 1995.
Culture
« Pendant 20 ans on m'a pris pour un parfait ignorant parce que j'avais fait courir le bruit que je n'aimais que les romans policiers et la trompette militaire. »
Mise au point dans Femme, en 1995.
Paroles
« Les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent ».
Cité dans Le Monde, en 1988. Les Français ont fini par comprendre.
Margareth Thatcher
« Mais qu'est-ce qu'elle veut en plus cette ménagère ? Mes couilles sur un plateau ? »
La phrase qui faillit relancer la guerre de Cent ans, après un échange plutôt vif entre les deux Premiers ministres sur des questions budgétaires, lors d'un sommet européen en 1988.
François Mitterrand
« Méfie-toi de Mitterrand. C'est quand il te sourit qu'il a le poignard le plus solide dans la main. »
Un avertissement donné à Michel Rocard, qui lui succède au poste de Premier ministre en 1988.
Nicolas Sarkozy
« Sarkozy, il faut lui marcher dessus. Pour deux raisons. Un, c'est la seule chose qu'il comprenne. Deux, ça porte chance ! »
Cité par Ghislaine Ottenheimer dans Le Fiasco (Albin Michel, 1996).
Édouard Balladur
« Balladur, c'est comme la porcelaine. Il supporte les décorations, mais pas le feu. »
Cité par Ghislaine Ottenheimer dans Le Fiasco.
Sondage
« Les sondages, ça va ça vient, c'est comme la queue d'un chien. »
L'une de ses phrases préférées, à l'usage de la jeune génération politique.
Bilingue
"What do you want ? Me to go back to my plane and go back to France ?"
Dans un anglais aléatoire et fort peu diplomatique, le président fait éclater son exaspération devant un service d'ordre israélien trop envahissant lors de sa visite de Jérusalem, en 1996. Les Palestiniens ont adoré.
Fatalisme
« Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille »
Citée dans de nombreux articles, digne des Tontons Flingueurs