Ni le temps, ni l’envie, je n’achète ni ne lis la prose politique, pourtant je pense que pour ce livre Confusions je vais faire une exception à ma règle.
Le vieux rocardien que je suis fait mien ce sage avertissement du secrétaire-général de la CFDT à cette jeune femme qui travaillait à la CFDT, où elle était en charge des discours.
« Ces gens-là, ils ne sont pas comme toi, Marie », la prévient Laurent Berger, le jour où elle lui annonce son envie de rejoindre la macronie.
« Plus qu'un pamphlet, un repentir. La force de ce livre, Confusions, est dans sa nuance et dans le calme avec lequel Marie Tanguy, ancienne plume d'Emmanuel Macron, narre son expérience. De la déception, oui, de la haine, jamais, ce qui rend ce récit d'autant plus redoutable. »
En dépit de ces avertissements, « elle y est allée quand même par goût de l'aventure et pour une certaine idée de l'émancipation, née chez elle à gauche, et qu'elle retrouvait chez l'ancien ministre de Hollande. Elle a passé des entretiens avec Brigitte Macron et Ismaël Emelien. Son profil Sciences Po et les quelques essais qu'elle a rédigés ont joué en sa faveur. Aussitôt, la jeune provinciale, originaire de Cahors et issue d'un milieu modeste, s'est retrouvée membre du pôle Idées de l'équipe de campagne du candidat, partageant un étroit bureau avec Quentin Lafay et David Amiel, au QG rue de l'Abbé-Groult. « David » et « Quentin » (elle les présente ainsi), « cinquante ans à eux deux », sont deux des acteurs centraux du livre. Comme ça, désignés par leurs prénoms, ils rappellent un duo de comiques vu à la télé (« Éric et Quentin »), mais ils peuvent se vanter d'être « les chefs de chantier » du programme présidentiel. Il leur revenait de donner de la substance aux intuitions et aux promesses du candidat, de trouver eux-mêmes des idées pour se démarquer de Hollande, pour faire mieux que Benoît Hamon, plus écolo que les écologistes, mieux que tout le monde. »
Elle écrit : « Ceux du sixième étage n'avaient rien à faire avec les bénévoles… » On découvre, effaré, la langue de ces « gens-là ». C'est technique, prétentieux, abstrait, sec, froid. Rien de charnel, rien de vécu, rien de spontané. Un bureau des Idées dans lequel défilent des surdiplômés et si peu d'élus… »
Tout est toujours « TTU » – « très très urgent » –, animée par des « mecs », mangeurs de chirashis, qui ne communiquent que sur Telegram, se droguent aux sondages (« Quel est le rolling du jour, Denis ? ») et truffent les discours du candidat de citations de René Char.
L’article Le livre choc d'une repentie de la macronie ICI
Avec l'ancienne plume de Macron qui a démissionné après un burn-out
Après avoir lu le récit de Marie Tanguy, on s’imagine une femme endurcie par la politique qui lui a fait tant de mal. La réalité est tout autre. Lorsque j’arrive dans le café où nous avons rendez-vous, sa jeunesse me frappe. Plus tard, elle me confiera qu’on la confond souvent avec la baby-sitter quand elle va chercher sa fille à la crèche. Pour me saluer, elle se lève précipitamment, faisant tomber son sac à dos qui s’écrase bruyamment contre le sol.
Trente-trois ans ? J’aurais parié qu’elle avait moins. Ses grands yeux qui ont, un jour, été cernés de noir me sourient. Son débardeur laisse entrevoir deux larges tatouages sur ses bras. C’est la première interview qu’elle donne pour la promotion de son livre : « Je suis un peu stressée » avoue-t-elle. Posé sur la table à côté d’un expresso, son livre Confusions s’apprête à sortir en librairie. Elle y raconte son ancienne vie de plume pour Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017.
« Politiquement, j’y croyais très fort. J’ai vu en Macron quelque chose qu’il n’était pas »
« Quand ils parlaient de la classe moyenne et en ricanaient, c’est comme s’ils parlaient de ma mère »
L’interview ICI
L’Hommage d’Emmanuel Macron à Michel Rocard ICI
Quand Emmanuel et Brigitte Macron recevaient les Rocard à dîner ICI
Parrainé par des rocardiens pendant sa campagne en 2017, le président de la République s’est éloigné des principes de ce courant de pensée.