Qui en Vendée ne connaît pas le chaos de Piquet ?
C’est Ouest-France, Thierry DUBILLOT le 06/09/2020 qui pose la question dans un papier titré : Le chaos de Piquet, un site idyllique de la vallée de l’Yon à préserver ICI
Moi qui pourtant y suis né, y est vécu jusqu’à l’âge de 16 ans, y a habité quelques années à la Roche-sur-Yon...
Le chaos de Piquet « C’est un paysage des plus romantiques. Un concentré de carte postale. Qui en Vendée ne connaît pas le chaos de Piquet ? Incontestablement, c’est le plus joli coin de la vallée de l’Yon, rivière qui se faufile entre des rochers de granit, jetés là par un jardinier géant. »
La Vendée a été suffisamment massacrée dans son bocage par nos chers Ingénieurs du Génie Rural : arrachons ces buissons, nivelons, remembrons, c’est la modernisation, les vaches n’ont plus besoin d’ombre, elles bouffent à l’étable de l’ensilage de maïs qui pue, et le maïs il lui faut de la place, défigurée sur ses côtes, nos belles dunes, par des promoteurs type Merlin plage y jetant des bicoques à deux balles, pour mettre en avant ce site remarquable plutôt que le barnum de cette raclure de De Villiers au Puy du Fou. Sommes pas gâté du côté personnel politique, pensez-donc ce petit couteau de Retailleau se voit un destin national. Comme le disait un vieux latifondiaire vendéen, Boux de Casson, indépendant-paysan, à propos de ses électeurs : « Ils voteraient pour mon âne si le présentait. »
Pour y aller, si on n’est pas du coin, le chaos de Piquet se mérite.
Il n’y a pas vraiment de pancarte qui l’indique. On le rejoint un peu par hasard la première fois. Le parcours est presque initiatique. Le plus simple, à partir de La Roche-sur-Yon, est de prendre la route de Luçon. Arrivé à Saint-Florent-des-Bois, on tourne à droite en direction du village du Tablier.
À la sortie de la commune, suivre la route sur un kilomètre environ, puis tourner à droite. Une pancarte indique la guinguette de Piquet. On continue sur cette route et l’on tombe sur un groupe de statues monumentales.
Vous y êtes presque. Face à la guinguette, deux parkings ont été aménagés, qui dominent le site. Attention à la descente, elle est un peu périlleuse.
Comment préserver le chaos de Piquet ?
Ce site remarquable « a un succès qui ne se dément pas. Un peu trop d’ailleurs. En 2019, le Département, propriétaire du site, a décidé de le classer en espace naturel sensible. Les interdictions se sont mises à pleuvoir. Interdit de se baigner, interdit de faire du feu, obligation de tenir les chiens en laisse…
Le chaos de Piquet n’est plus vraiment un espace de liberté. Mais il faut l’accepter pour essayer de préserver au maximum ce lieu exceptionnel. »
Sébastien Guilhemjouan, jeune homme éleveur, qui appartient au réseau Paysans de nature, a été chargé par le Département de mettre en valeur ce milieu naturel. Il installe son troupeau de vaches maraîchines (une dizaine) et ses quatre-vingts brebis Landes de Bretagne dans ces espaces.
« Cela favorise la biodiversité, tout en permettant de promouvoir les filières d’élevage de races locales »
« Les sols sont peu riches. Si l’on fauche, on ne parvient pas à maintenir cette biodiversité. Le piétinement des animaux est mieux indiqué. »
La filature
« Parmi les choses insolites qui attirent les promeneurs, il y a les ruines encore spectaculaires d’une filature et d’une teinturerie. « La filature de Piquet, construite en 1861 par Félix Grimaud, teinturier à Champ-Saint-Père, et Léon Beneteau, son beau-frère, instituteur à Luçon, a été acquise sur le 27 mars 1865, par Jean Aimé Drochon, marchand de tissus à La Roche-sur-Yon, place du Marché », apprend-on par les historiens locaux.
La filature, qui n’aura donc fonctionné que quatre ans, employait cinquante personnes. Rachetée, l’usine est démolie au début des années 1870, et sert de carrière de pierre. Certains matériaux ont été utilisés pour la construction du château de Rosnay.
Deux facteurs sont à l’origine de l’abandon de la production : le manque d’eau d’abord dans la rivière, notamment en été. Pénurie qui ne permettait pas d’entraîner la roue à aube et les machines de la filature. Les propriétaires ont tenté de résoudre ce problème en installant une machine à vapeur près de l’usine mais sans succès.
L’autre facteur tient à un conflit avec un meunier, qui possédait un moulin en amont et avait lui aussi besoin de l’eau de la rivière… »
La guinguette
On peut aussi en saison aller déjeuner au restaurant de la guinguette dans le cadre idyllique de Piquet. Le 20 septembre, ce sera terminé. Au moins jusqu’en mars 2021.
« Comme tout le monde, j’ai ouvert en juin. Comme nous sommes en plein air, je n’ai pas eu de problèmes de distanciation » , raconte la propriétaire Kateline Jarin. « Nous avons eu des concerts de musique, mais on n’a pas pu danser. »
Kateline est aux premières loges pour voir ce qui se passe sur le site. Et c’est peu dire qu’elle est très en colère.
« Sous prétexte de gratuité, les gens font n’importe quoi. Ils ne respectent rien et surtout pas la nature. J’en ai vu qui descendait au bord de la rivière avec un barbecue à roulettes. Ils font des feux, ils laissent leurs chiens divaguer, ils vont jusqu’à piller les nénuphars dans la rivière. Pour quoi faire ? Pour les mettre dans leur lavabo ? Il y en a qui ont cassé mes clôtures pour récupérer des bulbes de cyclamens. »
Pour elle, la sauvegarde du site de Piquet passe par une répression accrue. Particulièrement en cette période estivale.
« J’ai alerté tout le monde. Sur les parkings qui ont été aménagés, il n’y a même pas de poubelle. Du coup, les gens se débarrassent de leurs déchets n’importe où. Imaginez que dans mon établissement, j’ai retrouvé des couches de bébé sales sous les tables ! »
La propriétaire demande un minimum de surveillance, et des actions pour responsabiliser les visiteurs. « Ce qui m’intéresse, ce sont les amoureux de la nature et de la musique. Les autres, je n’en veux pas chez moi ! »