Les municipales sont des élections locales, à Paris comme ailleurs, et même plus qu’ailleurs eu égard au mode de scrutin MLP, les dernières en date sont aussi une première puisque, entre un premier tour sous Covid menaçant et le second post-un très long confinement, la plage des alliances s’est enlisée dans beaucoup de villes dans les sables de mariage contre-nature de la part des marcheurs en pleine déconfiture.
Je ne vous dis pas, ça part dans tous les sens les alliances de deuxième tour, c’est le bordel, et, hormis la déculottée prévisible de LREM à Paris, Lyon, Marseille…, ce ne sera pas un triomphe pour les insoumis de Mélenchon qui ont zappé l’élection.
Le Ministère de l’Intérieur n’aura même pas besoin de maquiller les étiquettes les résultats seront confus, difficilement interprétables pour en tirer des enseignements clairs quant à l’avenir des formations politiques dites de gouvernement.
Plus de 60% des électeurs ne se sont pas déplacés ce dimanche à l'occasion des élections municipales. Une participation historiquement basse trois mois après le premier tour, qui montre, selon Olivier Duhamel, politologue, "une forme de dégagisme de la démocratie".
À Paris, comme je l’ai écrit, les dés étaient jetés, c’est pour cette raison que j’ai décidé pour exprimer mes réticences face à la gouvernance de notre maire sortant et de son équipe pléthorique de pratiquer une abstention de combat ICI
Le niveau record de l’abstention de ce deuxième tour n’est donc pas à mettre dans le fourre-tout commode d’un soudain désamour des français pour leur maire mais plus d’un désappointement face à une complète perte des repères.
La « vague verte » bien réelle puisqu’elle se traduit par la prise d’une longue liste de villes emblématiques : Lyon, Bordeaux, Strasbourg… ou moyennes Annecy, Poitiers, Limoges… est donc à relativiser si l’on se projette dans la fameuse élection pivot qu’est la présidentielle. Hier, on votait dans à peine 1 commune sur 7. Et avec 60% d'abstention.
Résultat : seuls 7 millions d'électeurs se sont déplacés.
7 millions, c'est 14% du corps électoral français.
Le RN, conquiert sans surprise Perpignan, Le RN a perdu 598 conseillers municipaux. Comme dit MLP, c’est un vrai déclic. Derrière la victoire à Perpignan, le Rassemblement national cache une dégringolade. En 2014, le RN avait comptabilisé 1 438 sièges dans 463 communes. Six ans plus tard, ils ne sont plus que 840 sièges dans 258 communes.
Marseille « Avec ses 8 élus, Samia Ghali détient la clé de Marseille ». Cambadélis a regardé les résultats de près.
Lille, la folle soirée de Martine Aubry qui se tape un vert d’un cheveu.
Lyon, la déconfiture du roitelet Collomb.
Bordeaux la tristesse de Juppé et Poutou au conseil municipal.
Lorient, Le Drian prend une claque.
Pau, le tractoriste Bayrou, élu pépère.
Et bien sûr au Havre le triomphe du Premier Ministre sur un brave du PCF.
Le PCF qui coule doucement, la ceinture rouge n’est plus qu’une guenille, à Saint-Denis : Mathieu Hanotin met fin à 76 ans de règne communiste Le Parti communiste perd également Aubervilliers, où il était solidement ancré depuis 1944 (malgré un maire PS de 2008 à 2014). La ville bascule du côté de l’UDI avec la victoire de Karine Franclet (44,54%)
Les Républicains, du gros benêt Christian Jacob, ne ressuscitent pas ils se contentent de confirmer leur implantation en remportant dès le premier tour bon nombre des villes de plus de 9.000 habitants qu'ils contrôlaient. Hier, ils ont vu Jean-Luc Moudenc reconduit de peu à la tête de Toulouse, comme Christian Estrosi à Nice.
Reste bien sûr la Bérézina des Marcheurs, à Paris c’est même le genre Attila : ni Agnès Buzyn, ni Gaspard Gantzer, ni Marlène Schiappa ne siégeront au Conseil de Paris.
Quelle gifle pour un parti présidentiel théoriquement si parisien !
Estimations de la répartition des sièges au Conseil de #Paris par arrondissements :
Anne Hidalgo : 99 élus
Rachida Dati : 57 élus
Agnès Buzyn : 6 élus
Danielle Simonnet : 1 élu
La France municipale n'est plus celle d'Emmanuel Macron
COMMENTAIRE. Emmanuel Macron voit le front de ses adversaires se renforcer à l’issue du second tour des élections municipales dominées par une vague verte. La victoire de son premier ministre ne peut guère le réconforter.
Richard Werly
Publié dimanche 28 juin 2020 à 22:16
Modifié lundi 29 juin 2020 à 07:34
Le meilleur résumé de ce second tour des élections municipales françaises se trouve sans doute à Lyon. La capitale des Gaules fut, durant la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron, le tremplin vers la victoire pour ce dernier, dont le meilleur allié était en 2017 le maire sortant socialiste Gérard Collomb.
Abstention et «grève civique»
Trois ans après, la parenthèse lyonnaise se referme avec fracas pour la majorité présidentielle et le locataire de l’Elysée. Gérard Collomb, qui avait pourtant démissionné en octobre 2018 de son poste de ministre de l’intérieur dans l’espoir de garder sa ville, se retrouve humilié, emportant avec lui les espoirs de «La République en marche» (LREM), le parti présidentiel. La victoire de l’écologiste Gregory Doucet y est en revanche éclatante, avec 53,5% des voix. La relève politique incarnée en 2017 par le réformateur Macron a désormais changé de camp: c’est aux Verts que les Français font confiance pour changer la politique même si une autre leçon de ce scrutin est redoutable et cruelle: l’abstention record, à près de 60%. Du jamais-vu depuis 1958 pour une élection municipale comme l’a fait remarquer le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon en parlant de «journée de grève civique».
Croire que Lyon est un cas isolé, expliqué avant tout par le délitement du système Collomb, serait en effet une grave erreur. Presque partout, et notamment dans les métropoles qui constituent leur terreau électoral prioritaire, les candidats macroniens ont échoué, y compris lorsqu’ils se sont alliés avec la droite traditionnelle comme l’avait fait l’ex-maire socialiste lyonnais. A Paris, l’échec de l’ancienne ministre de la santé Agnès Buzyn (13% des voix) vire à la catastrophe dans une capitale où Emmanuel Macron avait caracolé en tête lors de la présidentielle.
En prenant un peu de hauteur, l’enseignement de ce scrutin est limpide: la droite réussit à se maintenir (à Nice, Aix-en-Provence, Toulouse, Lorient), la gauche ne perd pas pied (grâce aux victoires obtenues à Paris, Lille – d’extrême justesse – Le Mans, Nantes, Nancy ou Montpellier), l’écologisme municipal décolle (les Verts l’emportent à Strasbourg, Bordeaux, Besançon) tandis que l’extrême droite s’enracine et décroche son symbole à Perpignan, conquise par le député du Rassemblement National Louis Aliot. Or cette nouvelle carte électorale dit une France qui n’est plus celle d’Emmanuel Macron. Et ce malgré la victoire au Havre de son premier ministre, Edouard Philippe.
Macron face aux obstacles
Comment le président français peut-il s’en sortir alors qu’un remaniement gouvernemental est attendu dans les jours prochains?
La question peut très difficilement trouver réponse.
Premier obstacle: le positionnement présidentiel au centre droit, avec d’emblématiques réformes comme celle de l’assurance-chômage ou des retraites, peut paraître conforté… Mais il ne profite en rien au locataire de l’Elysée qui l’avait emporté face au candidat «Les Républicains» François Fillon, naufragé par son affaire de «détournement de fonds publics». Laquelle sera, choc du calendrier, jugée ce lundi à 13 heures.
Edouard Philippe, le chef de gouvernement nommé en 2017, est celui qui en tire les bénéfices. Le garder à l’Hôtel Matignon peut donc sembler cohérent, mais avec un risque pour Macron: se retrouver ligoté, sans marge de manœuvre.
Deuxième obstacle: le fossé est béant entre le pouvoir exécutif et l’opinion qui, pour bousculer le jeu politique à l’issue de la crise sanitaire, fait localement confiance à des candidats écologistes souvent jeunes. Emmanuel Macron, qui reçoit dès ce lundi les délégués de la Convention citoyenne sur le climat, devra impérativement apporter des réponses à cette poussée verte, sur fond du plan de relance européen dont il doit, lundi soir, débattre avec la chancelière Angela Merkel, à l’orée de la présidence semestrielle allemande de l’UE.
Troisième obstacle enfin: la colère sous-jacente dans le taux d’abstention massif à ces municipales, dans les 5000 communes qui n’avaient pas encore élu leurs conseils municipaux et leurs maires. Même si l’épidémie de coronavirus et les peurs liées à l’organisation du scrutin (trois mois après le premier tour du 15 mars) peuvent l’expliquer, le constat est clair: la démocratie représentative française est bien en crise. L’Etat centralisé, que les écologistes dénoncent en plaidant pour plus de décentralisation, n’est plus la solution.
Le besoin de démocratie directe, à côté des rendez-vous électoraux traditionnels, est patent. Les avertissements sortis dimanche soir des urnes municipales sont nombreux. Les sorties possibles pour un président toujours plus isolé à deux ans de la fin de son mandat en 2022, sont toutes assurées d’être tumultueuses.
Mais la Présidentielle est une mécanique infernale où le coefficient personnel joue un rôle déterminant, plus encore depuis « le hold-up » de Macron qui a fait exploser en vol les deux grands blocs de gouvernement.
Sur la ligne de départ avec une casaque connue : le sortant Macron doté d’un parti en charpie, la Le Pen assise sur un parti peu crédible pour gouverner, Mélenchon, redoutable compétiteur de premier tour mais qui ne pourrait triompher au second que s’il reconstituait l’Union dites de la Gauche chère à Tonton.
C’est sur cette « Gauche plurielle à la mode sous Jospin » que tout se jouera et là le choc des ambitions Mélenchon-Jadot est prévisible.
Alors LFI socle d’une « gauche unie » ou EELV socle d’une « gauche plurielle »? Avec pour supplétifs, genre MRG le PS de ce pauvre Faure.
L’obstacle sera l’élaboration d’un programme commun dans le style remake jospinien mais les Verts pour l’heure veulent reprendre le leadership perdu par le PS avec un Jadot moins répulsif au second tour que Mélenchon pour les électeurs centraux.
Reste Macron et son non parti, pour lui l’alternative : pencher dans une Union des droites avec son Premier Ministre si populaire dans l’électorat de gauche et de droite ou engager le pari fumeux d’un en Même temps verdit avec un introuvable nouveau Premier Ministre ?
Si je reviens vers vous après les résultats du second tour c’est pour vous conseiller de lire La fin des Partis sous la direction d’Igor Martinache et Frédéric Sawicki, PUF, « La vie des idées », 98 p., 9,50 euros.
Dans « La fin des partis ? », six professeurs de sciences politiques, économiques et sociales incitent à ne pas enterrer trop vite l’«ancien monde …
Par Julie Carriat Publié le 19 février 2020
Il arrive à point nommé, ce mince volume, cosigné par six professeurs de sciences politiques, économiques et sociales. A un mois d’élections municipales où de nombreux candidats préfèrent cacher toute étiquette politique, la question s’impose : assiste-t-on à la fin des partis ?
Les symptômes sont connus. 2017 a signé l’éclatement des deux partis de gouvernement (PS, LR) pour porter à près de 25 % et 20 % au premier tour deux candidats issus de formations créées pour l’occasion, revendiquant chacun une forme de « dégagisme ». Mais « comme souvent, lorsqu’un “changement de monde” est proclamé, il apparaît nécessaire de s’interroger sur ses soubassements et sa supposée nouveauté », écrit Igor Martinache en introduction.
Premier suspect de la mort présumée des partis, la présidentialisation de la politique française, coupable idéale, est remise à sa place par le politiste Frédéric Sawicki. Rien d’automatique en effet dans la « conversion du capital électoral présidentiel en sièges parlementaires puis en positions électives locales », même si les législatives de 2017 ont accrédité cette idée. Pierre Leroux et Philippe Riutort complètent la réflexion en dressant un parallèle entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, exemples de « personnification » de la vie politique. L’occasion d’une exégèse politique savoureuse, où les deux hommes ayant contourné les partis pour se qualifier autrement – par leur charisme médiatique notamment – se retrouvent côte à côte sous la qualification du sociologue Pierre Bourdieu d’« entrepreneur indépendant du salut », de « prophètes » en politique.
L’élitisme du vivier politique
Mais leur avènement ne suffit pas à signer l’arrêt de mort des partis. Rémi Lefebvre décrit ainsi l’affaiblissement de l’ancrage social et militant des formations partisanes, qui les fragilisent et rend les électeurs « volatils ». En cause notamment, le financement public de la vie politique : « A quoi bon recruter des adhérents (…) quand le parti tire des ressources pérennes d’argent public indexées sur ses victoires aux élections ? » Les partis, repliés sur eux-mêmes, deviennent donc des groupes d’élus vivant « de et pour leur mandat », un constat qui s’applique aussi bien aux « antisystèmes » du Rassemblement national qu’au Parti socialiste et à la droite Les Républicains. LRM et LFI y échappent mais pour combien de temps ?
Carole Bachelot relativise cette fin d’un monde en prenant appui sur la théorie de la cartellisation des partis. Plutôt qu’une Révolution, le titre du livre de campagne d’Emmanuel Macron, la recomposition actuelle s’impose alors comme le « renouveau cyclique d’un processus déjà ancien », qui n’entame en rien l’élitisme du vivier politique. Ainsi, les néo-députés LRM sont-ils largement issus des catégories favorisées.
Sans faire le tour de la question, le livre s’impose comme un sémillant précis de science politique et aiguise la curiosité sur les résultats des prochaines municipales, cruciales pour définir les contours des partis de demain. Il conforte aussi l’idée qu’au fond, on n’est jamais vraiment fini en politique.