Le 11 novembre 1983 Francois Mitterrand accompagné de Louis Mermaz a été reçu à la mairie de Bourg par Louis Robin.
Au temps des bancs rugueux de l’école Sainte-Marie, des encriers blancs en porcelaine et des porte-plumes Sergent-Major qui tachaient nos doigts de violet, nous récitions la liste des départements, préfecture, sous-préfecture : elle commençait par l’AIN, Chef-lieu Bourg-en-Bresse, Sous-préfectures Belley, Gex, Nantua…
En 1983, les socialistes se réunissaient lors du congrès de Bourg-en-Bresse, soit deux ans après l’élection de François Mitterrand et quelques mois après ce qu’on a appelé «le tournant de la rigueur».
J’étais alors Conseiller Technique au cabinet du Président de l’AN, Louis Mermaz fidèle parmi les fidèles de Mitterrand, maire de Vienne, président du CG de l’Isère flanqué de Didier Migaud directeur de cabinet, le rocardien de service qui était convié aux dîners entre Mermaz et Delors, celui-ci était classé dans le courant Mitterrandien, ça tombait comme à Gravelotte sur le rable de Jean-Pierre Chevènement. Le père Delors, éternel démissionnaire, considérait ce dernier comme le fourrier de l’économie française. Jean-Pierre Chevènement perdit l’arbitrage face à Jacques Delors sur la question du maintien ou non de la France dans le SME, le Système monétaire européen, qui était un mécanisme de change entre les monnaies, l’une des premières tentatives de régulation des monnaies avant la mise en place de l’euro comme monnaie unique. Le ver était dans le fruit du PS mais l’ambiguë Tonton sut maintenir tout le monde sur le radeau.
Je n’étais pas présent à Bourg-en-Bresse et, j’avoue sans honte que ma mémoire ne l’associait pas au chef-lieu de l’Ain pour une raison simple en 1981 la star de l’Ain, l’un des opposants de droite féroce aux socialo-communistes, avec Toubon, Madelin, Seguin, était le maire député-maire de Belley : Charles Millon.
En plongeant dans les archives du Monde je retrouve le lien avec Philippe Ridet
Charles Millon ou la revanche d’un réactionnaire ICI
Edouard Jacquinet pour M Le magazine du Monde
L’ex-ministre de la défense de Jacques Chirac, qui avait été soutenu par le Front national en 1998, affirme avoir rejoint l’équipe de campagne de François Fillon.
Par Philippe Ridet Publié le 17 mars 2017
Amoureux de l’Italie comme lui j’avais lu son livre « L’Italie, Rome et moi » chez Flammarion.
« J’ai longtemps rêvé d’être italien. À défaut, j’ai cherché à en avoir l’air… »
Oui mes amis je rêve…
Je lui avais emprunté cette phrase dans une chronique :
14 février 2014
Lettre d’un parisien à ses amis italiens de Paris : préparez-moi une Vignarola alla romana ! ICI
Bref, je m’étais dit en apprenant la sortie de son nouveau livre « Ce crime est à moi » fin janvier 2020 aux EDITIONS DES EQUATEURS, que je l’achèterais. Puis le confinement vint, il fit parti de ma moisson du premier jour de liberté.
Restait à le lire.
Je viens de le faire.
Comme toujours je vais à la chasse aux critiques sur la Toile et la première qui s’affiche est l’œuvre d’une nantaise (vous connaissez mes attaches nantaises)
Les Chroniques d'une nantaise ICI
Elle conclue : Le roman est assez court, faisant à peine plus de 200 pages, et je l’ai donc lu assez rapidement. Ce n’est pas une lecture que j’ai trouvée captivante étant donné qu’il ne s’y déroule pas énormément d’événements mais j’ai beaucoup apprécié la simplicité des propos ainsi que leur réalisme et ai trouvé ce livre hypnotisant. J’avais envie d’en poursuivre la lecture, de retrouver l’atmosphère à la fois malsaine et vintage de Ce crime est à moi et j’ai eu la sensation que l’auteur relatait sa propre vie tellement les ressentis et les sentiments exprimés paraissaient sincères.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, et j’en suis la première surprise, ce livre m’a marquée. À l’heure où je vous écris ces lignes, cela fait moins de 24 heures que je l’ai terminé et je ne peux m’empêcher d’y repenser et d’y réfléchir. Certains aspects du livre résonnent en moi, cette période de doute entre la fin de l’adolescence et le début de la vie adulte me parle totalement et j’ai été touchée par les propos de l’auteur sur plusieurs points. Je vous invite donc à découvrir ce roman qui a été pour moi une belle découverte.
Philippe Ridet est né en 1955, ce n’est pas un vraiment comme moi un baby-boomer, le pur baby-boom s’étend entre 45et 55 est trop souvent assimilé aux fameuses 30 Glorieuses. Alors que j’avais 20 ans en 1968, lui n’était qu’un adolescent à Bourg-en-Bresse.
Dans une chronique de 2017 j’écrivais, « contrairement à Paul Nizan dans Aden Arabie, aujourd'hui je n'écrirai pas « J'avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie ».
De ce temps je ne suis ni fier, ni repentant, il reste pour moi le moment où la société française, sa jeunesse tout particulièrement, dans l'un de ses spasmes violents dont elle a le secret, explosaient les coutures d'un habit trop étroit. Nous pensions sincèrement faire la Révolution, renverser la table alors qu’en fait la société de consommation avait besoin qu'on brise des tabous pour prospérer, et nous lui avons grande ouverte les portes.
« … Paul Nizan, pour notre localité qui l’accueillit comme professeur de philosophie au lycée Lalande, des mots méprisants : « Les gens s’ennuient tant, écrit-il dans Présentation d’une ville, qu’ils ne voient pas à vingt mètres devant eux. Leur ville rumine, leur ville digère. Quand ils se sont acquittés comme d’une triste corvée des innombrables tâches qui les font vivre, ils rentrent chez eux. Et la plupart du temps, ils y restent. »
« Tout y est bâti dans une pierre molle et blanche comme la chair des femmes pieuses. »
Le Français (ndlr. le restaurant iconique) est « Le rendez-vous des commerçants, des fonctionnaires, de chefs locaux du PS. »
Exécution en règle, je n’ai jamais arpenté les rues de Bourg-en-Bresse alors que bien sûr en tant locataire du 78 rue de Varenne la volaille de Bresse, était et reste le fleuron de la volaille AOC (la seule) et j’ai sillonné la Dombes. Je n’y ai fait, en direction de Genève, que des haltes brèves à la gare TGV.
Philippe Ridet se contente, à propos de Bourg-en-Bresse d’écrire avant de la décrire, la ville (page 45) « est le chef-lieu du département. Mais personne ne la connaît véritablement. Ou on y vit, ou on y passe. Personne ne la visite Ce n’est ni le Périgord ni le Luberon. La beauté ne vous saute pas aux yeux. Certains habitants, un peu susceptibles, se sentent humiliés lorsque, à la question « c’est où déjà ? », ils doivent préciser que leur commune est située entre Lyon et Genève, comme si elle ne pouvait exister que dans son rapport géographique aux deux métropoles de réputation internationale dont elle est séparée de soixante kilomètres pour la première, et de quatre-vingt-dix, pour la seconde. D’autres, au contraire, se gaussent de sa taille modeste et de son absence de particularités en l’appelant « le village », une autre manière de dire qu’elle mérite sa notoriété discrète, pour ne pas dire son oubli. »
Dans mon job au 78 rue de Varenne j’ai beaucoup fréquenté les Préfets, en effet le terroir agricole n’est guère parisien, et j’imagine la tête de l’épouse du Préfet de l’Ain lorsque son mari lui annonçait sa nomination à Bourg-en-Bresse. Un trou, l’horreur absolue, mais dans la préfectorale, il faut savoir gravir les marches de la hiérarchie une à une…
En 1964, Alain Gottvallès est le meilleur nageur au monde sur 100 mètres nage libre. Il est le favori logique de la finale olympique.
Si je me polarise sur la ville, c’est qu’elle est dans le livre de Philippe Ridet une actrice essentielle, le premier chapitre avec sa carte postale de la piscine Alain-Gottvallès, « centre de son univers, entre treize et dix-huit ans. », donne le ton. Le crime du maître-nageur, Didier Cornaton, qui avait voté René Dumont, par la jeune étudiante en philosophie, Martine Amouroux, n’est qu’un fil rouge, une étrange obsession, permettant à l’auteur d’évoquer sa jeunesse.
Page 105 :
« Aujourd’hui, j’ai beaucoup de mal à harmoniser les souvenirs de ma jeunesse avec le récit magnifié et recomposé de cette époque par les émissions de télévision qui, régulièrement, exhument les années soixante-dix comme un éden de permissivité. Les filles aux seins nus, dansant bras écartés en dodelinant de la tête, le regard perdu parmi leurs longs cheveux blonds, je ne les ai vues qu’à Woodstock (le film), mais jamais dans la vraie vie. Étais-je au mauvais endroit ? Trop timoré ? L’amour libre n’était pas notre modèle. Nous suivions avec quelques aménagements le canevas tissé par nos parents. Seule la perspective du mariage et de la fondation d’un foyer n’entrait plus dans nos priorités.
Qui croit que les années soixante-dix ont été un déchaînement des sens se trompe lourdement. Au contraire, elles furent pour moi des années inquiètes et studieuses où tout le monde était habillé avec des parkas marron et des pantalons bleus informes. Des années où la question de gagner sa vie s’imposa dans nos préoccupations sans même que nous n’y prenions garde. Des années mieux symbolisées par la bande à Baader et des terroristes italiens que par le flower-pop »
Là je me sens très proche de Philippe Ridet, les années 70 ont été des années grises et violentes.
Page 145
« … Ville née sans prétention, elle l’était restée. Elle ne s’était pas effondrée comme beaucoup de communes de province ignorées des lignes TGV et des autoroutes. Modeste, elle tenait son rang, sans désirer qu’il soit plus élevé. Elle n’est pas très belle, mais courageuse. Beaucoup lui en voulaient d’être restée debout, alors qu’ils s’étaient effondrés. »
Enfin, clin d’œil à la maman de Philippe Ridet, rocardienne post PSU, le père étant lui un mitterrandien.
Si tant est que mes conseils de lecture pèsent un peu dans vos choix, je vous conseille de lire « Ce crime est à moi », c’est bien plus que l’histoire d’un meurtre mais celle d’une tranche de vie…
« Ce roman est le fruit d’une réflexion où j’ai adopté un style, une écriture pour lui donner une forme, trouver la bonne distance entre la période sans que cela soit nostalgique. C’est tenir des jumelles à l’envers pour toucher les choses et les rendre lointaines. »
(Photo : Patrice Normand)
Philippe Ridet, 52 ans, est journaliste au Monde. Son métier, selon lui, consiste à être attentif, écouter. Il faut, comme il dit : « Surveiller un pays comme le lait sur le feu ». L’observation de l’autre, d’une ville, d’une époque révolue, c’est un peu ce dont il est question dans ce premier roman Ce crime est à moi (éditions des Equateurs) dans lequel Philippe Ridet narre l’histoire d’un crime commis dans une petite ville des années 1970. Un fait-divers qui modifie profondément la trajectoire du narrateur. Celui-ci ne peut ni devenir nageur professionnel ni postier alors il se tourne vers le journalisme et l'écriture. La trace laissée par ce crime donne ainsi naissance à sa vocation littéraire.
L’année précédant son élection, le 12 octobre 1980. François Mitterrand, ici au Parc des expositions de Bourg pour la Fête de la rose, répond à nos questions. Derrière lui, Charles Hernu / Archives DR ICI