Certains jouent sur les mots, ce matin je joue sur les titres, Monsieur Klein est un film français de Joseph Losey sorti en 1976, produit par Alain Delon qui en est l'acteur principal, alors que le mien est le physicien Etienne Klein qui nous invite à réfléchir au temps dans un article sur le site The Conversation, et les épidémies au cinéma sont une chronique d’Elsa Bellanger, publiée le 01/05/2020 par le Quotidien du Médecin.
Avec le confinement, notre espace-temps est chamboulé
Comme à peu près tout le monde, je ne pensais pas vivre un jour pareille situation : ce mélange sidérant d’hyperconnectivité numérique et de jachère sociale, d’urgence absolue et de calme apparent, de tranquillité dans les rues et de course contre la montre en certains autres lieux, tels les hôpitaux.
Dans son Essai sur le don, Marcel Mauss avait inventé le terme de « fait social total ». La pandémie en cours représente davantage encore : c’est un « fait mondial total », puisqu’elle concerne l’humanité tout entière. Elle touche tout le monde, directement ou indirectement, et chacun a quelque chose à en dire. Quant au confinement, qui, lui, n’aura affecté que la moitié des humains, il se contente de n’être qu’un fait mondial semi-total, ce qui est déjà extraordinaire.
Cette expérience exceptionnelle ne va certes rien changer au temps tel que le figurent les équations de la physique, et il n’y a nul doute que toute minute du monde d’après durera toujours 60 secondes, qu’elle soit de douleur ou d’extase, de télétravail ou d’ennui. Mais elle trouble notre perception du temps : les jours de confinement en viennent à tous se ressembler ; notre métrique des durées devient de plus en plus molle ; le défilement des heures manque de rythme, de figures imposées, de marqueurs, de rendez-vous, de sorte que la place que nous occupons au sein du temps semble s’étaler, presque s’évanouir.
C’est le premier paradoxe dont le confinement nous fait prendre conscience : le fait d’avoir du temps nous fait perdre la notion même de temps.
Pour bien sentir le temps qui passe, faudrait-il donc se laisser « intoxiquer par la hâte » ?
En réalité, nous sommes tout le temps confinés dans le temps puisque ce dernier est, malgré ses faux airs de fleuve, une authentique prison sans barreaux, au moins pour notre corps. Le temps est comme une étreinte vis-à-vis de laquelle nous ne pouvons être que passifs : nous habitons physiquement l’instant présent et ne pouvons pas en sortir, sauf peut-être par la mémoire ou l’imagination. Mais depuis quelques semaines, nous sommes en plus confinés dans l’espace, qui est d’habitude le lieu de notre liberté ; d’un seul coup, notre logement s’est transformé en cage, en petit vase beaucoup trop clos.
Une double assignation à résidence
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Les épidémies au cinéma : une fenêtre sur nos imaginaires et nos représentations en temps de crise
Et si le cinéma pouvait nous éclairer sur l’état d’esprit actuel de la population et nous aider à comprendre nos représentations d’une crise épidémique et nos imaginaires collectifs ? Dans « JAMA Network Open », ICI un chercheur de l’école de médecine du Nouveau Mexique aux États-Unis s’est penché sur un siècle de représentations de la menace épidémique portées sur grand écran.
À travers une sélection de 80 films sortis en salle de 1914 à nos jours, il explore l’évolution des peurs et des espoirs accompagnant les épidémies et dégage une série de thèmes récurrents, reflet de nos perceptions.
Certes, nous dit-il, l’épidémie s’inscrit dans le temps long ; certes, ce qu’il appelle « le petit coronavirus » vient chambouler notre perception (nous avons perdu la notion du temps jusqu’à ne plus savoir quel jour on est) ; certes, notre rapport à l’espace s’en trouve perturbé également puisque le virus nous confine dans un espace réduit, que « notre ligne d’univers individuelle s’en trouve ratatinée de façon drastique » et que même si « chacun est chez soi, presque plus personne ne sait où il habite ».
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