Contrôler aujourd’hui pour décider demain manifeste a été adopté par le 8° Congrès National du PSU (Toulouse, 9-10-11 décembre 1972)
L’autogestion, une appellation à l’époque dévoyée par l’usage qu’en faisait Tito en Yougoslavie.
L’autogestion à la Rocard se fonde sur une hostilité, jamais démenti chez lui, à la trop grande intervention de l’État. Ce qui ne signifie pas moins d’État mais ce qu’aujourd’hui on appelle le local, Décoloniser la province au colloque de Saint-Brieuc en décembre 1966, où il fustige la centralisation française et prône une plus grande autonomie des territoires, il propose d’en finir avec « une tradition politique qui, des rois aux républiques, en passant par les empereurs, gouverne à l’intérieur par ses missi dominici, ses intendants et ses préfets en étouffant les pouvoirs locaux. », à l’époque c’était les GAM (groupe d’action Municipale) chers à Hubert Dubedout qui a conquis Grenoble.
Les jacobins de tous les bords le raillent, se moquent, et rappelez-vous bien plus tard, lors de son discours de politique générale les moqueries pour son souci des réparations des cages d'escalier, des ascenseurs, des halls d'entrées des HLM dans les quartiers dégradés.
La 2ième gauche, le Rocard’Estaing cher aux cryptocommunistes du CERES de Chevènement et des Poperénistes...
Mais revenons à l’aventure post-soixante-huitarde de l’entreprise LIP.
« En juin 1973, le mouvement de protestation au sein de l’horlogerie LIP de Besançon va leur donner l’occasion d’expérimenter leur idéal. Pour éviter les licenciements massifs dans cette entreprise en grave difficulté, les employés se saisissent des stocks de montres et relancent la production en privilégiant une commercialisation en circuit court. Le PSU est au cœur de l’expérience, notamment par l’intermédiaire du principal animateur du mouvement Charles Piaget, membre du parti, ainsi que de la CFDT. Michel Rocard lui aussi s’y implique, participant à plusieurs manifestations de soutien au ouvriers de l’entreprise autogérée, notamment la grande marche du 29 septembre qui rassemble 100 000 personnes dans la ville de Besançon. Par le biais de ses réseaux au sein du patronat, il va aider à trouver une solution de reprise, notamment auprès de ses amis José Bidegain et Antoine Riboud. C’est finalement l’un de ses proches, Claude Neuschwander, le numéro 2 de Publicis, qui prend la tête de la société à l’origine du rachat de LIP en janvier 1974. Pur faire rentrer les stocks de montres saisies les mois précédents, une rocambolesque opération va alors se mettre en place, racontée par Michel Rocard à Bernard Ravenel :
« Juste avant son installation, il faut récupérer l’argent des ventes et les montres non vendues. Tout doit se faire à Besançon, à l’usine. Un réseau de camionneurs syndiqués CFDT est mis en place. On prévient le préfet pour qu’il n’y ait pas de contrôle, sinon c’est le bordel. Il y aura une nuit sans patrouille dans la région. Dans au moins un cas, un équipage de camion (chauffeur et accompagnateur) aura une mitraillette sur les genoux, contre quiconque empêcherait de passer… Vers minuit et demi arrivent beaucoup d’argent, un paquet de montres dont beaucoup, pas toutes, viennent de couvents. Un autre camion part dans la nuit pour Paris avec l’argent enrobé dans des colis circulaires, des « tommes de fromages ». Arrivée à 4 heures du matin à Pari, où Bidegain et Riboud attendent pour récupérer l’argent et le « légaliser ». Vers 5 heures du matin, ils sont là avec un membre de la FGM-CFDT, Riboud prend livraison des « fromages », il réveille au téléphone son ami banquier de la Compagnie financière, filiale de Rothschild, de Fouchier : « venez en urgence, j’ai arrangé des fromages » De Fouchier, irrité, se rend à 6 h 30 à sa banque. Le veilleur de nuit, stupéfait, ouvre la salle des coffres et on descend l’argent sous forme de colis, tout est décompté, enregistré comme support en capital. Le trésor des Lip est entré dans la légalité. »
Mais le projet ne convainc pas les investisseurs. À la tête de l’entreprise, Claude Neuschwander tente de prolonger l’autogestion ouvrière. Mais il est bientôt désavoué par les patrons qui l’ont soutenu, dont Antoine Riboud, PDG de BSN-Danone. Le gouvernement aussi, confronté désormais à la crise économique, lâche l’entreprise. Lip doit finalement fermer deux ans plus tard. À cette date, Michel Rocard n’est plus au PSU.
De l'usine Lip à Besançon, « il ne reste plus que le nom » ICI
Par Audrey Fisne | 25/05/2018
Rachetée in extremis, l'usine ne survivra pas au nouveau capitalisme « où la finance » et « l'intérêt de l'argent sont au cœur de l'économie », explique Claude Neuschwander, le repreneur de l'entreprise en 1974
Quelques écrits du TAULIER
Le silence qui s’ensuivit marquait le triomphe du malingre. Il jouissait de son avantage car évoquer devant moi le souvenir du gourou de la Gauche Prolétarienne c’était, il le savait le bougre, me replonger dans un temps où le grand n’importe quoi régnait en maître. Poursuivant son avantage Duruflé, après avoir lampé son Bas-Armagnac, ricanait : « C’était le gros Geismar qui pilotait une vieille 4L vers Palente. Un peu avant l’usine, quelques camarades locaux les attendent. J’en suis car j’étais déjà des deux bords. Quand on s’aperçoit que le Benny est flanqué de Geismar ça gueule sec. «Putain, tu te prends pour un touriste. Franchement si tu pointes ta tronche dans l’usine tout le monde va se dire que les maos viennent foutre la merde dans notre grève… » Le pépère Geismar il n’en revenait pas. Ni une, ni deux, il se retrouvait accroupi au fond d’une bagnole qui, deux précautions en valaient mieux qu’une, le déposait sur le quai de la gare de Dijon pour embarquer dans le premier train pour Paris. Pendant ce temps-là, tel un brave visiteur, « Pierre Victor » dont nul ne connaît le visage du côté de Palente, franchit les grilles de l’usine, accompagné de deux ouvriers de chez Renault, sans encombre. Même qu’il se fait cornaqué par un responsable de l’accueil. Tout lui est ouvert, même les AG, à la condition qu’il respecte la libre parole et bien sûr ne participa pas aux votes. Le gars qui les accueille c’est Jean Raguenès, OS chez Lip depuis 3ans, dont Benny Levy, qui a son service de renseignement, sait que c’est un père dominicain détaché de son couvent qui fut, en mai 68, l’aumônier des étudiants en droit et qu’il a défendu les katangais de la Sorbonne… »
Y’a pas photos les mecs, même si je n’aime pas beaucoup mes curés, Piaget et Raguenès, qui ne pouvaient pas se piffer, c’étaient des couillus et même l’archevêque de Besançon, Marc Lallier, il n’envoyait pas dire ce qu’il avait envie de dire. Pas de la petite bière qui défile pépère de République à Nation, des gars qui sont capables de mettre la main sur le trésor de guerre de Lip. Opération commando à la nuit tombée qui investit la « chambre froide », là où sont stockés le disponible, vingt-cinq mille montres prêtes pour la vente, et qui met ce petit trésor en lieu sûr. Le « casse social » du siècle ! Le camarade Benny Levy à l’impression de vivre le scénario idéal, pur et dur en direct et il est partagé entre le malaise et la jubilation… L’illégalité des larges masses c’est le credo de la GP et ça le fait bander, si tant est qu’il bandât ; mais ce qui le trouble c’est que ce mouvement est entre les mains des révisionnistes modérés, Piaget CFDT et PSU est de ce type de catho dévoué qui n’est pas vraiment la tasse de thé de « Pierre Victor » qui haïssait les syndicalistes légaux.
Qui se souvient du « discours de Marseille » d’Antoine Riboud du 25 octobre 1972 aux Assises du CNPF ?
« La responsabilité de l'entreprise ne s'arrête pas au seuil des usines ou des bureaux. Les emplois qu'elle distribue conditionnent la vie entière des individus. Par l'énergie et les matières premières qu'elle consomme, elle modifie l'aspect de notre planète. Le public se charge de nous rappeler nos responsabilités dans cette société industrielle. (...) La croissance ne devra plus être une fin en soi, mais un outil qui, sans jamais nuire à la qualité de vie, devra au contraire la servir ».
Claude Neuschwander, responsable de l'entreprise, lui-même proche du PSU à cette époque, qui a démissionné en février 1976, nous a adressé la lettre suivante.
LES LIP, L'IMAGINATION AU POUVOIR de Christian Rouaud
« Lip, c'est fini ! », déclare le 15 octobre 1973 Pierre Messmer. Le Premier ministre de Pompidou a tort. Après six mois de lutte syndicale, les salariés de l'usine de montres de Palente (Doubs) veulent toujours sauver leur entreprise, en dépôt de bilan depuis avril. Le dénouement aura lieu trois ans plus tard, le 28 novembre 1977, avec la transformation de l'usine en six coopératives, Les Industries de Palente _ des initiales qui sonnent toujours : « LIP ».
LIP a fait partie des grandes maisons horlogères mondiales, et a pendant longtemps représenté le savoir-faire français des montres à l’international. Les valeurs de la marque se basent sur des innovations techniques importantes et sur des efforts permanents pour rester à l’avant-garde du secteur horloger. Avec des origines remontant à plus de 150 ans, l’aventure LIP n’a pas toujours été facile, mais elle s’est inscrite dans l’histoire et continue de surprendre…