« Mon père (André Raimbourg, dit Bourvil) me disait : moi la tête d’affiche, quand j’arrive sur un plateau de cinéma, je salue d’abord les figurants. »
Dominique Raimbourg, 68 ans, ancien député de Nantes-Sud, avocat et socialiste, s’est intéressé aux exclus : SDF, prisonniers, gens du voyage, pour lesquels il a fait voter la loi de janvier 2017 mettant fin à leur statut discriminatoire. C’était juste avant de se faire éjecter de son siège de député par la vague macroniste. Devenu premier secrétaire du PS 44, Raimbourg s’occupe désormais d’une autre population en péril : les militants socialistes.
« Le meilleur des hommes », selon Gérard Oury, avec qui il tourna trois films d’anthologie dont Le Corniaud (1965) et La Grande Vadrouille (1966).
« Un homme vrai », souligne le réalisateur Frédéric Zamochnikoff dans son documentaire qui retrace la courte vie de ce fils de paysan normand, amoureux de la musique et des gens.
« Bourvil, un homme vrai », de Frédéric Zamochnikoff (Fr., 2016, 52 minutes)
Télérama
Des intervenants triés sur le volet, des anecdotes savoureuses et, en prime, une remarquable déconstruction de la mécanique du rire chez Bourvil-Louis de Funès. Le bouleversant portrait d'un comédien doué, homme à l'empathie sans limite.
Le 27 juillet 2017, André Raimbourg, plus connu sous le nom de Bourvil, aurait eu 100 ans. Décédé le 23 septembre 1970, il fut l’un des acteurs les plus populaires et les plus talentueux du cinéma français. Nez de travers, sourire tendre, yeux rieurs et voix perchée, Bourvil séduisait par son empathie et sa vraie-fausse naïveté, qu’il cultivait habilement.
C’est grâce à son instituteur du petit village de Bourville, dans le pays de Caux, que le jeune André Raimbourg s’ouvre à la culture et à la musique. Ne voulant pas prendre la suite de la ferme familiale, il devient mitron avant d’entamer une formation d’instituteur. Il décide finalement de s’orienter vers le spectacle après avoir vu, sur scène, son idole Fernandel.
Jouant le plus souvent les comiques paysans avec sa mèche rabattue et son costume étriqué, André Raimbourg se lance dans une carrière musicale à Paris après avoir gagné, en 1938, un radio-crochet sous le pseudonyme d’Andrel, en référence à son modèle Fernandel. Il prendra le nom de Bourvil en 1942 pour ne pas être confondu avec son cousin Lucien Raimbourg, déjà dans le métier.
« Si c’est avec Bourvil, je signe tout de suite »
Sa carrière décolle en 1956 avec le film La Traversée de Paris, de Claude Autant-Lara, adapté d’une nouvelle de Marcel Aymé, qui avait pourtant exprimé ses réticences quant au choix de Bourvil « acteur comique ». Jean Gabin trancha le conflit : « Si c’est avec Bourvil, je signe tout de suite. » Ce film, devenu depuis un classique du cinéma français, a permis à Bourvil de montrer toute la palette de son talent, comique et dramatique, comme le souligne Francis Huster, qui avait repris ce rôle au théâtre près de quarante ans après.
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Film d'Alex Joffé (France, 1960). Scénario : A. Joffé et Pierre Corti, d'après Michel Breitman. Image : Pierre Petit. Musique : Denis Kieffer. 115 mn. NB. Avec Michèle Morgan : Juliette. Bourvil : Fortunat. Gaby Morlay : l'institutrice. Rosy Varte : Mme Falk. Teddy Bilis : M. Falk. Frédéric Robert (Frédéric Mitterrand) : Maurice.
Le genre : mélodrame.
Juliette Valecourt, grande bourgeoise parisienne, ignore que son mari fait partie d'un réseau de résistance. Quand il est arrêté par la Gestapo, elle se réfugie dans une bourgade de province proche de la ligne de démarcation. Elle y rencontre Fortunat, un cordonnier un peu rustre et ivrogne qui doit, pour leur sécurité, se faire passer pour son mari...
Fortunat a profondément marqué les spectateurs à sa sortie. En le revoyant, on découvre combien les conventions du cinéma commercial de l'époque (duo de stars, décors de studio...) pèsent peu en regard de l'intelligence et de la sensibilité de la mise en scène. Le scénario, peu explicatif, procède par petites touches. Il dévoile par mille et un détails les sentiments de condescendance et d'amour mêlés qu'éprouvent Juliette et Fortunat. La scène de l'arrestation des voisins est un modèle de pudeur. Bourvil est magnifique, tour à tour grand benêt et homme d'honneur. Michèle Morgan laisse percer derrière son visage de sphinge de véritables troubles. Alex Joffé est un cinéaste populaire injustement oublié.
Philippe Piazzo