Calmos Interjection. (Familier) Demande de rester calme.
CALMOS (1976) Un film réalisé par Bertrand Blier ICI
Ce matin je me lève et découvre sur Twitter une vieille photo de Benjamin Griveaux avec d’autres jeunes macronistes en compagnie de DSK avec la mention « J'imagine les folles soirées de benji avec DSK... »
Je ne comprends rien au film.
Et puis, l’heure avançant je découvre avec stupeur l’affaire Benjamin Griveaux, candidat LREM à la mairie de Paris, qui a très vite annoncé qu’il se retirait de l’élection. Cette décision intervient après la diffusion ces derniers jours sur Internet de vidéos à caractère sexuel qui lui sont attribuées. L’ancien porte-parole du gouvernement a expliqué sa décision par une volonté de protéger sa famille.
Mais jusqu’où iront-ils dans l’ignominie ?
La lettre politique de Laurent Joffrin
Infamie en ligne
Voilà un dénonciateur russe qui réveille une peu reluisante tradition française : celle de la délation couperet. Pendant la Révolution, Jacques-René Hébert publiait une feuille de dénonciation émaillée de jurons, le Père Duchesne, mélange de vrai et de faux, d’arguments et d’insultes, qui envoyait souvent à la guillotine les victimes de ses diatribes. Ainsi a fait ce Père Duchesne au petit pied, qui a mis en ligne une vidéo sexuelle attribuée à Benjamin Griveaux, ce qui a fait tomber symboliquement dans le panier la tête du candidat. Procédé d’une rare bassesse que rien ne saurait justifier.
Le délateur invoque «l’hypocrisie» du leader macronien. S’il fallait se débarrasser de tous les élus coupables d’écarts dans leur vie privée – quoi qu’on pense de ces écarts –, la vie publique se changerait vite en désert. La haine de «l’oligarchie» semble désormais autoriser les coups de Jarnac les plus infâmes.
On dit que la vie politique française s’américanise. Plusieurs leaders furent victimes de ce genre de révélation crapoteuse aux Etats-Unis. Gary Hart, candidat démocrate à la présidence dans les années 1970, fut le plus célèbre. L’exposition médiatique de sa liaison avec une certaine Donna Rice lui coûta sa carrière. John Kennedy, Dwight Eisenhower pendant la guerre ou encore Bill Clinton échappèrent à ce sort funeste, soit qu’ils bénéficiaient de la discrétion des journalistes, soit, comme dans le cas Clinton, qu’ils firent front avec succès.
Mais, en France aussi, tous les présidents depuis Pompidou ont été attaqués sur leur vie privée, de manière plus ou moins oblique, même si le scrupule des médias «mainstream» – quoique désormais entamé – leur a évité de succomber à l’opprobre.
La différence tient aujourd’hui à la vitesse destructrice des réseaux sociaux, dont les démocraties n’ont toujours pas maîtrisé les effets pervers et ravageurs. La dénonciation de Griveaux repose sur une illégalité. Mais la justice, si elle est saisie, statuera au mieux dans plusieurs mois. En attendant, l’exécution du candidat à l’aide d’une guillotine numérique donne une idée désastreuse du processus électoral, qui fait écho aux décapitations symboliques prisées par certains gilets jaunes, aux agressions contre les élus ou leurs permanences, aux insultes «hébertistes» proférées envers Brigitte Macron.
La violence verbale inonde l’univers sans loi des réseaux, et dans les algorithmes la mauvaise monnaie de la communication tend sans cesse à chasser la bonne. A quelque chose malheur sera-t-il bon ? L’affaire Griveaux devrait être le point de départ d’une prise de conscience générale et d’une réflexion collective. L’abolition de la distinction entre vie publique et vie privée n’est pas un progrès de la transparence dans le débat. C’est un recul de la civilisation.
Eric Morain à Paris en février 2018. Photo Jacques Graf. Divergence
Me Eric Morain Que pensez-vous de la réaction de ceux qui taclent le comportement du candidat LREM, relevant pourtant de la stricte vie privée ?
Mais qui est irréprochable ? Ce discours des purs, ça me rappelle la phrase de Charles Péguy : «Ils ont les mains propres, mais ils n’ont pas de mains.» On peut avoir une appréciation, pour le coup, strictement morale des choses. Mais la morale de la République, moi, je ne sais pas ce qu’elle est. En revanche, je connais la loi de la République. C’est du même acabit que de dire à une victime de viol qu’elle n’avait pas à se promener à 2 heures du matin toute seule.
Enfin, cette affaire est peut-être aussi un signal de ce qu’est devenue notre vie politique. Aujourd’hui, on va chercher ce type d’arguments, le ricanement, le clash, la petite phrase, etc. Jusqu’à preuve du contraire, Benjamin Griveaux n’a commis aucune infraction. C'est lui la victime, mais il se retrouve à devoir partir. Triste constat
L’interview intégrale ICI INTERVIEW
«En matière de "revenge porn", il y a tout ce qu'il faut dans la loi»