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10 décembre 2019 2 10 /12 /décembre /2019 06:00
La réforme des retraites, méthode et principes avril 1991, Michel Rocard, 1er Ministre, donnait le coup d’envoi d’un grand débat national sur l’avenir du système de retraites en publiant un Livre blanc : « Demain, les retraites. Un contrat entre les générations ».

Je ne cultive aucune nostalgie rocardienne. 

 

Je me contente de verser une pièce au dossier de notre incapacité à anticiper, à réfléchir sereinement. 

 

Le Livre blanc de 1991 demeure, avec les éléments de diagnostic qu’il apportait et les principes qu’il rappelait, d’actualité.

 

Naturellement, les données ont changé depuis trente ans.

 

D’autres réformes ont modifié ces données.

 

Le débat entre retraite par capitalisation et retraite par répartition, qui opposait alors la droite et la gauche, n’est plus le cœur du débat même si certains tentent de le faire accroire en suggérant qu'une retraite par points est de la capitalisation.

 

Pressé par le Président de la République et une partie du PS d’agir plus vite sur le terrain social, il ne veut pourtant pas bousculer les choses et reste fidèle à sa méthode : établir avec les partenaires sociaux et la société dans son ensemble un diagnostic partagé, explorer les différents scénarii possibles et leurs conséquences, créer les conditions d’un choix démocratique en prenant le temps nécessaire à la négociation. Une mission d’appui, pilotée par Robert Cottave, secrétaire général de la fédération des cadres Force Ouvrière, était nommée pour animer ce débat.

 

Quelques semaines plus tard, Michel Rocard était « remercié » par François Mitterrand. De ce moment, on a surtout retenu une « petite phrase », selon laquelle ce dossier était tellement explosif qu’il pouvait faire chuter sept ou huit gouvernements…

 

Il reste qu’entendre la voix de Michel Rocard – qui manque tant au débat public aujourd’hui – exposer sa méthode, tirer de l’histoire et des exemples étrangers quelques enseignements essentiels et fixer les enjeux pour l’avenir (il s’agissait alors de l’horizon 2010…) nous a paru utile dans les temps incertains que vit notre pays. C’est pourquoi nous publions ci-dessous quelques extraits de la préface qu’il avait rédigée pour ce Livre blanc.

 

 

« Demain les retraites. Un contrat entre les générations »

 

 Extraits de la préface de Michel Rocard au Livre blanc sur les retraites

 

«[…] Nos systèmes de retraite ont réussi. Les missions qui leur avaient été assignées en 1944 par le Conseil National de la Résistance ont été pour l’essentiel atteintes. Aujourd’hui, les Français vivent mieux et plus longtemps et ils sont tous concernés à un titre ou à un autre par un régime obligatoire d’assurance vieillesse. Aujourd’hui, heureusement, la plupart des personnes âgées ne souffrent plus de la grande pauvreté. Aujourd’hui, enfin, le niveau de vie des nouveaux retraités tend à rejoindre celui des actifs. Ils peuvent ainsi plus que par le passé prendre dans notre vie sociale la place qui leur revient légitimement.

 

Tout cela n’est que justice à l’égard des générations qui par leur travail ont puissamment contribué à la prospérité du pays.

 

Maintenir ces acquis collectifs, poursuivre le mouvement de réduction des inégalités qui touchent les plus âgés de nos concitoyens, tout particulièrement les veuves, tels sont les premiers buts que je m’assigne.

 

Nous avons également vis-à-vis des générations futures un devoir de lucidité et un impératif de solidarité. Nous leur devons des choix pour garantir leur avenir.

 

C’est ainsi que nous resterons fidèles aux principes fondateurs de notre Sécurité sociale.

 

«[…] Un système de retraites est un ensemble d’obligations réciproques entre générations et professions. C’est un mécanisme d’assurance sociale qui dans tous les pays développés comporte sous des formes et dans des proportions variables un étage de base public et universel, un étage professionnel et un étage facultatif, collectif ou individuel.

 

Le système français s’est historiquement formé sur le principe de la répartition. Il comporte une assurance vieillesse de base généralisée gérée par une pluralité de régimes et des régimes complémentaires obligatoires institués à l’initiative des partenaires sociaux. Dans un tel système, les cotisations des actifs sont immédiatement utilisées pour financer les pensions des retraités. Depuis quelques années, on constate en outre un effort individuel d’épargne.

 

J’observe que reconnaître à tous les Français le droit à une retraite n’a pas suffi pendant longtemps à assurer à chacun une pension décente. Ce n’est somme toute que depuis vingt-cinq années qu’une amélioration réelle de la condition des retraités a été mise en œuvre. Le contexte des « trente glorieuses », avec la croissance, une population rajeunie, a permis cette évolution qui s’est malgré tout poursuivie dans les années de crise : c’est ainsi que l’âge de la retraite a été abaissé à 60 ans en 1982.

 

Des cotisants plus nombreux et mieux rémunérés ont permis durant quatre décennies d’attribuer à des retraités plus nombreux des pensions plus élevées. Les transferts sociaux en faveur des retraités ont atteint, en 1990, 12 % du produit intérieur brut. Au-delà de la diversité des situations et des inégalités qui subsistent, notre société a mis fin à l’insécurité des vieux jours qui planait sur nos anciens.

 

«De cette histoire, je retiens trois enseignements.

 

Si l’œuvre de généralisation entamée à la Libération vient à peine de s’achever, la vigueur des particularismes professionnels a mis en échec la grande ambition d’une Sécurité sociale unique. Il reste que toute la population active bénéficie aujourd’hui d’une couverture à titre obligatoire dans le cadre soit du régime général, soit de régimes spéciaux, soit de régimes propres à telle ou telle catégorie sociale. Par rapport à l’avant-guerre, le progrès est considérable.

 

Les différences qui subsistent entre les pensions des salariés et des non-salariés s’expliquent notamment parce que ces derniers ont fait le choix de solidarités professionnelles moins étendues. Les écarts entre les salariés du secteur public et ceux du secteur privé portent pour leur part moins sur le niveau des pensions que sur les conditions d’âge et les avantages annexes parfois plus favorables dans le secteur public.

 

Si le projet d’un système unique, uniforme, n’est plus le nôtre depuis quelques décennies, nous n’avons pas renoncé à l’idée et à la pratique d’une solidarité entre les différents régimes de retraite. Leur diversité a rendu indispensable la création d’un minimum de ressources accordé de façon égale par tous les régimes, ainsi que la mise en place de mécanismes de solidarités financières au bénéfice des régimes pénalisés par l’évolution sociale et démographique de leurs effectifs.

 

«] Gardons trois leçons essentielles de ces exemples étrangers : d’abord, les adaptations ont été préparées longtemps à lavance, et le consensus recherché a souvent été atteint ; ensuite, les leviers de la réforme ont été trouvés dans une combinaison dinstruments et l’ensemble des régimes de retraite sont concernés ; enfin, les calendriers d’application s’étendent sur plusieurs décennies.

 

Les défis qui nous sont opposés peuvent être résolus. Des solutions existent, des choix s’offrent à la société française.

 

L’un des intérêts majeurs du débat public sera de permettre de prendre le temps de la réflexion, de la mise en cohérence des propositions et de l’acceptation honnête des conséquences des choix proposés. En cette matière, j’espère que nous éviterons toute démagogie.

 

Pour ma part, avant d’envisager les avenirs possibles, je crois sage de fixer trois principes.

 

Nous devons respecter l’équité entre les générations, celle des grands-parents qui sont aujourd’hui en retraite, celle des parents qui le seront au début du siècle prochain, et celle de nos enfants qui, au-delà de 2010, auront alors à payer les retraites de leurs parents.

 

Nous devons satisfaire l’équité au sein de chaque génération, nos régimes actuels n’assurant pas toujours les solidarités espérées.

 

Nous devons évidemment assurer la maîtrise financière des régimes de retraite pour en garantir la pérennité.[…] »

ICI 

Écoutant le Livre de l’Exode « un pays ruisselant de lait et de miel » (Ex. 3,8) et entendant ses camarades parler de prospérité, d’abondance et de bonheur, un adolescent s’exclame « la Parole décrit un pays avec des vaches et des abeilles » ! À l’image de cette anecdote, ceux qui parlent de retraite oublient parfois sa raison d’être. Le raisonnement courant est simple : si notre régime par répartition est en déficit, c’est parce que nous vivons plus vieux. Or la durée moyenne d’activité (38 ans pour un homme) est de facto inférieure à la durée de cotisation requise (41 ans en 2012). Il est donc illusoire d’espérer un retour à l’équilibre financier en demandant aux salariés de travailler plus longtemps. La création de nouvelles ressources, si elle peut à court terme pallier les déséquilibres, n’apporte pas non plus de réponse fondamentale aux évolutions profondes, non seulement démographiques, mais aussi des parcours de vie. Il est urgent de repenser la question des retraites avec un paradigme qui replace la personne humaine au cœur du système.

Réforme des retraites : cinq questions sur la valeur du point et le calcul des futures pensions ICI
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commentaires

A
Y a pas mieux pour les jours de grève. L'appui devant. Les Vendéens ne font pas comme les fabricants de pantoufle de Nontron, ils innovent ! et piquent du boulot aux chinois.<br /> <br /> https://www.youtube.com/watch?v=S9CChivY840&feature=youtu.be
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A
Merci !<br /> souvenirs... je recherche ce tract... si par hasard...<br /> https://saintyrieixlaperche.wordpress.com/2019/12/08/je-me-souviens-de-mon-etonnement-en-lisant-un-tract-de-lunef-en-1967-qui-exposait-le-budget-normal-dun-etudiant/
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P
1) 1991 / 2019 28 ans de perdus ( j'ai toujours dit que Michel Rocard était trop bien pour eux.)<br /> 2) La Suède ( et d'autres pays) a mis plus de 10 ans a mettre sa réforme en place avec des résultats<br /> consternant. Taux de pauvreté des retraités supérieur du double par rapport à la France !<br /> 3) Le Turlupin en chef, gros bras à défaut de grosse tête, veut tout régler en 2 coup de cuillère à pot !<br /> 4) Le point : Laisser moi rire. Qui va fixer son montant ? Les bouffons au pouvoir ? On sait les <br /> tripotages dont ils sont capables. La rémunération du Livret A. Son taux avait été fixé par la loi <br /> pour le mettre à l'abri de l'arbitraire intéressé des politiques incapable de limiter l'appétit d'un <br /> capital irresponsable. Il devait suivre 2 x l'an l'inflation . On peut effectivement, 2 x l'an, suivre leur<br /> mascarade.<br /> 5) Une note d'optimisme, on va bientôt revoir la fameuse vignette à coller sur son pare-brise . <br /> L'argent ainsi récolté devait servir à la " retraite des vieux " ; Selon la vieille habitude ces sommes <br /> rejoignirent très vite le budget général de l'état.<br /> <br /> Est ce ainsi que les hommes vivent...?
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