Que voulez-vous, je trouve que PAX à un petit air de famille avec le détective belge Hercule Poirot ; interprété par Peter Ustinov dans le film Mort sur le Nil, tiré du roman d’Agatha Christie, d’où mon titre. Coquet, notre Lutzelhousois déclare se nipper comme la reine d’Angleterre, l’inoxydable Elizabeth II. Pour ma part je préfère la première, fille du puissant Henri VIII et d'Anne Boylen. À la mort de sa mère, qui fut décapitée par ordre du roi, incarnée par la diaphane Cate Blanchett dans le film de Shekhar Kapur.
Il se dit aussi graphomane, excellente disposition qui me permet d’abandonner la souris pour faire la grasse matinée.
Attention, cette fois c’est du lourd.
Une croisière musicale d’une huitaine de jour sur le Danube au départ de Vienne. Il faut donc gagner Vienne. A peu près huit heures de voiture soit une heure de moins que pour aller à Collioure. Comptons donc dix heures avec les haltes de repos, les pleins et le pique-nique. Par l’autoroute c’est direct depuis Lutzelhouse.
Mais il faut passer par l’Allemagne. Une fois sur l’Hafraba, plein Nord jusqu’à Karlsruhe puis plein Est, c’est tout droit. On connaît pour avoir fait ce trajet plus d’une fois.
Mais pax est un homme de peu de foi. Le GPS, soudain, indique de quitter l’autoroute. Pas folle la boite ? On connaît le chemin quand même. Ce n’est que beaucoup plus tard que nous comprendrons que la boite avait voulu nous éviter le gigantesque bouchon dans lequel nous nous trouvâmes bientôt enfermer.
Travaux, déviations, bretelles et portions d’autoroute fermées. Je n’y ai rien compris, nous roulions au pas et avancions avec le hoquet et observions sur la voie de droite et/ou la bande d’arrêt d’urgence des files ininterrompues de camions à l’arrêt, chauffeur à bord !
L’Allemagne et ses autoroutes !
Quand viendra la fin du monde, l’Allemagne sera toujours en travaux. Curieusement beaucoup de travaux concernaient la construction de murs antibruit. Pour une population vieillissante et donc dont l’acuité auditive va en baissant on se demande à quoi ça rime.
Vienne, Handelskaï, on embarque.
Vienne !
Cette ville destination de mon premier voyage en stop. On dormait dans des auberges de jeunesse. Ni Blablacar ni Air'nb. L’aventure et la liberté ! Cette ville passionnante ou vécurent les plus grands écrivains d’Europe et autres artistes comme ceux de la Sécession. Mais aussi, Vienne l’autrichienne, capitale d’un peuple qui, après un délirant Anschluss joyeux et festif, a réussi, après-guerre, à se faire passer pour victime et, comme telle n’a pas été dénazifiée.
Peuple dont les élites n’ont reculés devant aucune turpitude pour tenter de ne pas rendre à Maria Altmann victimes des spoliations nazies les tableaux de Klimt appartenant à sa famille. Cette unique survivante d’une grande famille juive, déportée et tuée dans les camps, demandait que lui soit restitué le superbe portrait de sa tante Adèle, peint par Klimt. Après d’interminables procédures elle finit par le récupérer avec quatre autres toiles toujours de Klimt. Restait pour cette élite arrogante que la honte et leurs yeux pour pleurer.
représentant sa tante, Adèle Bloch-Bauer, la fameuse "Woman in Gold" (ou "portrait doré").
Mais cette ambiguïté, fait partie du charme de cette ville qui, pardon pour le cliché, aura toujours les couleurs et l’ambiance du film « Le troisième homme » avec l’entêtante musique d’Anton Karas. Un moment, on entend Orson Welles dire à Joseph Cotten, dans une nacelle (grande comme un wagon de chemin de fer) de la Grande Roue du Prater : «Toute l’histoire mouvementée et immorale de l’Italie des quatro et cinquecento ont donné, Michel Ange, Raphaël, Vinci et tant d’autres grands artistes. Pendant ces siècles de paix, en Suisse, aucune création mémorable, sauf des coucous en bois ! » (de mémoire)
Vienne, où je ne suis plus sûr de retourner, tant la ville semble atteinte du syndrome de Venise bousillée par le tourisme de masse. Le célèbre, car superbe « Café Central », foyer intellectuel de l’intelligentsia viennoise et internationale du XIX siècle et haut lieux de toujours de rencontres de politiciens de tout bord, n’est plus aujourd’hui qu’une attraction pour touristes. Il faut y faire la queue avant de pouvoir entrer dans ce lieu qui n’a rien perdu de son cachet mais n’a plus d’âme. «Je hais les voyages et les explorateurs» proclamait avec prémonition Claude Lévi-Strauss au début de Tristes Tropiques…
Le bateau lève l’ancre et navigue de nuit en remontant le Danube pour faire escale, sur la rive droite, à Melk que domine une splendide abbaye et bibliothèque baroque. Deux citations pour décrire ce que l’on ressent devant de tel monument: « Où tant d’or se relève en bosse » – Molière, Femmes savantes III 2 ou encore « des tonnes de staff... des stocks de stuc... » Bric à Brac de Raymond Devos.
À midi, pendant le déjeuner à bord, le bateau fait demi-tour. On redescend le fleuve pour faire escale à Dürnten sur la rive gauche. Cette petite cité médiévale présente un triple intérêt. Son église baroque au bord même de Danube, superbe pâtisserie en bleu marial et blanc, Sur les hauteurs le château ou Richard Cœur de Lion fut enfermé. Et enfin les « heurige », vignoble de la Wachau oblige, lieux charmants ou les vignerons vous font déguster leur production. Je ne suis pas monté au château, je n’ai pas visité l’église.
Navigation de nuit et de jour pour gagner Bratislava prochaine escale.
Attention, terre et langue étrangère il me faut veiller sur mon épouse préférée, distraite comme un oiseau des îles, pour qu’elle ne se perde pas. Ce qui explique que Je m’habille comme la reine d’Angleterre. Depuis toujours je porte nœuds paillons et veste à l’ancienne en toutes occasions avec pour sortir, chapeau, canotier ou casquette ou encore panama. Dans les réunions, rencontres ou autre manifestation je m’amuse à compter qui porte encore la cravate et constate avec le même amusement que je suis souvent le seul. (Il ne sait pas quoi inventer pour se faire remarquer murmurent beaucoup – Justement c’est fait pour ça coco !) Ces tenues ont essentiellement pour but de permettre à Marie Louise de me reconnaître dans la foule. Exactement comme le service d’ordre et de sécurité de Sa Gracieuse Majesté ne peut perdre de vue celle dont les tenues ont l’ardente obligation de conjuguer élégance et identification aussi certaine qu’immédiate.
Bratislava est une charmante ville ou les habitants sont souriants. J’y ai souvent séjourné et j’y ai toujours retrouvé cette agréable impression. La ville apparaît comme une jolie petite capitale d’opérette comme dans les BD d’Hergé « Le sceptre d’Ottokar » ou de Franquin « QRM sur Bretzelburg » Bien sûr je vais saluer mon vieux copain le soldat Chvéïk . Ce soldat quelque peu ahuri observe et constate avec étonnement un monde dont il ne perçoit que les incohérences et les contradictions. Une espèce de Sapeur Camember devenu emblématique et qui met, involontairement, les rieurs de son côté contre un pouvoir qui se prend tellement au sérieux. On le trouve, à un carrefour, dans la vieille ville. Il sort la tête d’une bouche d’égout. Elle repose sur ses deux bras croisés au niveau de la chaussée. Mine de rien il a l’air de se foutre de tout et de nous en particulier.
On rembarque le soir même pour Budapest. On savoure l’instant qui se répètera presque chaque fin d’après-midi. Un concert donné par de jeunes et talentueux musiciens embarqués à bord. Après une belle journée de soleil automnale, descendre le Danube, avec cette lumière caractéristique entre chien et loup, en écoutant le trio n° 100 de Schubert. Que demande le peuple ?
Budapest a tout d’une capitale Européenne, avec, entre autre, son célèbre Café Gerbeaud fondé au XIX siècle par un Suisse formé à Paris qui illustre ce qu’était le cosmopolitisme de l’Europe centrale dans ce siècle tumultueux tant dans les faits que dans les arts et la littérature Tous les grandes chaînes de l’hôtellerie sont présentes. Quel contraste avec le visage que présente le pays dès que l’on quitte la capitale. La Hongrie apparaît alors, comme un pays très en retard par rapport à l’Europe occidentale ! En outre, les commerçants, la encore dès que l’on quitte les grandes avenues avec les grands noms du luxe international, sont peu aimables.
On peut acheter des cartes postales mais ni enveloppe ni timbre-poste. Quant à savoir ou trouver des timbres…
On ne parle quasiment pas l’allemand ou l’anglais. Le français ? Inutile de rêver. Quand il y a quelques plaques d’information bilingue, on trouvera l’allemand et/ou l’anglais. Le français jamais. Marie Louise pour sa part gardera un bon souvenir : le château de Gödölö. C’était la résidence préférée de Sissi quand elle faisait tout ce qu’elle pouvait pour séduire les Hongrois et les intégrer de manière définitive à l’empire Autrichien.
Le bateau fait demi-tour et remonte le Danube jusqu’à Vienne. Alain Duault de Radio Classique et qui collabore aussi à « Classica » poursuit ses conférences quotidiennes. Pour l’instant il nous parle du « Bocca Negra » de Verdi que nous irons écouter dès notre arrivée, point d’orgue de la croisière, à l’Opéra de Vienne sur le Ring. C’est souvent une très belle soirée que l’on peut savourer tranquillement grâce à la présence d’écrans fixés au dos du fauteuil devant vous ou l’on peut lire, en temps réel et dans la langue de votre choix le texte chanté. Malheureusement cette année, cet opéra de Verdi n’est pas ce qu’il a produit de meilleur. Livret alambiqué, trop de sérieux et de lourdeur, pour moi, dans la musique. On est loin du fantastique Lohengrin de l’an passé avec une mise en scène pleine d’invention, évitant le modernisme outrancier que l’on voit trop souvent et sachant échapper au kitsch habituel tel le cygne sur roulette qu’un machiniste propulse sur la scène côté jardin et qu’un autre tire avec une ficelle côté cour.
Mais je vois que le temps qui m’est imparti est épuisé alors, la suite au prochain numéro selon le bon vouloir d’un Taulier patient et bienveillant
Huit heures. Les premiers rayons du soleil effleurent les collines verdoyantes de Cheviot Hills, un quartier cossu de l'ouest de Los Angeles. Dans le jardin de sa petite maison, une vieille dame en peignoir hume ses rosiers, une tasse de café fumant à la main. Comme tous les matins, Maria Altmann, qui va fêter ses 90 ans, sort de la piscine où elle se dérouille quelques instants avant de partir faire ses courses dans sa vieille Chevrolet beige. Grande, discrètement maquillée, auréolée d'une permanente impeccable, cette ex-vendeuse de vêtements, veuve depuis dix ans, savoure la fin de sa longue existence et la victoire de son dernier combat. «Les Autrichiens ont fait traîner les choses en comptant sur mon âge avancé, lâche-t-elle avec un sourire ravi, mais je suis toujours là!» Et bien là: après sept ans de procédure acharnée, Maria a réussi à faire plier l'Etat autrichien, à qui elle réclamait six tableaux de Gustav Klimt, dont son oncle avait été spolié par les nazis et conservés depuis la guerre au musée du Belvédère, à Vienne. Trois portraits et trois paysages, considérés comme des chefs-d'?uvre du maître de l'Art nouveau, évalués entre 150 et 200 millions d'euros! Le 17 janvier dernier, un tribunal arbitral siégeant à Vienne a rendu un jugement sans appel qui ordonne la restitution des oeuvres à la vieille dame.
Maria Altmann est la dernière survivante des Bloch-Bauer, une famille de la bourgeoisie juive viennoise du début du siècle. La suite ICI