J’avoue que j’ai lu avec gourmandise l’interview d’Hubert donné à Sud-Ouest ICI, dans un temps où le chacun pour soi triomphe voilà un homme fort occupé dans ses vignes, dans son chais, dans les vignes et les chais des autres par le monde, qui n’a eu de cesse de consacrer toutes les forces qui lui restaient à défendre, promouvoir, vendre la belle appellation de Saint-Émilion.
Un moine civil cet Hubert, il est partout là où il faut être, il collectionne les présidences comme d’autres les œuvres de Caillebotte ou les timbres-poste, c’est un stakhanoviste du dévouement, jamais il ne met en avant ses intérêts propres, tout pour les autres, sans doute faudra-t-il un jour le proposer à la béatification et cotiser à un ex-voto en l’église de Saint-Émilion.
Mais pourquoi diable vient-on chercher des poux dans sa magnifique crinière blanche ?
Je ne sais, je ne suis ni juge d’instruction, ni procureur, ni avocat en défense, ni maître Morain, mais ce que je sais c’est que ce cher Hubert, l’homme au petit sécateur, dans son plaidoyer pro-domo nous prend pour des idiots, il nous fait prendre des vessies pour des lanternes et il se brûle.
Lors de son procès perdu contre Isabelle Saporta devant la XVIIe chambre du TGI de Paris, cité comme témoin par la défense j’ai pu tout à loisirs répondre aux questions pertinentes de la Présidente et, en tout premier lieu, que sa nomination au Comité National Vins et Eaux-de-vie de l’INAO ne devait rien au hasard mais relevait d’une stratégie à long terme.
Dans son interview ce bon Hubert déclare : « Je n’ai rien demandé. Un jour le Préfet m’a appelé pour m’informer que le Ministre de l’Agriculture avait sollicité ma nomination. » Roulez carrosse, tapis rouge, pour avoir manié la mécanique des nominations à l’INAO je ne puis que sourire face à une telle présentation. Que je sache, ce dévoué Hubert était président du Comité Régional de l’INAO pour la beauté du geste sans aucun doute, surtout pas pour en faire un tremplin vers Paris. Il a fallu que le Ministre – lequel cher Hubert ? – le sollicite, lui fasse dire par le Préfet « vous êtes si représentatif des appellations bordelaises, si dévoué à leur cause, que votre présence dans le cénacle du comité national s’impose… »
Être là où il faut quand il le faut, permet de cultiver les liens à la fois avec les autres membres du Comité National, son président en particulier – Christian Paly en a fait la démonstration devant la XVIIe chambre en évoquant les petits échanges de services – et avec la technostructure de l’INAO. Le Directeur de l’INAO de l’époque, dont j’oublie volontairement le nom, a partagé avec moi la naphtaline du gagatorium du CGEER, et a évoqué devant moi tout le soin que prenait Hubert à inspirer, suivre, approuver l’élaboration du texte organisant le fameux classement.
L’intérêt général, bien sûr !
Je n’irai pas au-delà, mes déclarations devant la XVIIe chambre ont été consignées, j’ai juré de dire la vérité rien que la vérité, je n’ajoute ni ne retranche rien, je crois simplement qu’elles ont contribuées à mettre en lumière la réalité de la partie immergée de l’iceberg. Tout se passe avant à l’INAO, la mécanique délibératoire ne fait qu’entériner ce qui a été mijoté dans l’arrière-cuisine.
En conclusion deux remarques :
- Notre cher Hubert défend avant tout sa marque : Angelus, je ne lui reproche pas loin de là c’est son patrimoine, l’appellation Saint-Émilion n’est là que comme support du fameux classement de 1955.
- Que ce classement n’est qu’un classement commercial, ce n’est pas un gros mot dans ma bouche, et que j’ai toujours soutenu que l’INAO n’a rien à faire dans ce type de procédure. Hubert enfonce mon clou, il a raison lorsqu’il déclare « Si dès l’instant où on est membre de l’INAO, il y a prise illégale d’intérêt, il n’y a plus d’institution. » Oui, mettre sur le même plan, le fameux terroir et la qualité des hôtesses d’accueil c’est transformer cette vieille institution en une entente entre initiés permettant de d’ajouter des zéros à son capital. Comme me l'a déclaré le précédent directeur de l'INAO avant son départ à la retraite : plus jamais ça !
Je me rendrai à l’audience du TC de Bordeaux pour suivre le procès…