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1 octobre 2019 2 01 /10 /octobre /2019 06:00

L’image contient peut-être : texte

La première fois que j’ai vu Jacques Chirac en chair et en os ce fut chez le bougnat de la rue Mazarine, j’y habitais dans un minuscule 2 pièces au-dessus de la librairie Gründ, lors de la campagne des municipales de Paris en 1977 où il écrasa le candidat de Giscard le chamallow d’Ornano. Haute taille, jovial, il serrait les manettes avec une dextérité extraordinaire, sourire aux lèvres, pas fier, un gars aussi à l’aise aux culs des vaches qu’à la table de François Pinault.

 

Il fut Ministre de l’Agriculture, tout comme son ami de jeunesse Michel Rocard, puis Premier Ministre, deux fois, Giscard et en cohabitation avec Mitterrand, et, hasard de la politique, Michel Rocard lui succèda à ce poste, en 1988. Il gravira deux fois la dernière marche sur laquelle son vieux compère échoua, la première fois en éliminant Balladur puis, la deuxième fois, se retrouvant face à Le Pen : j’ai voté pour lui sans hésitation.

 

  Image

 

« Il est Premier ministre sortant, je suis Premier ministre entrant, il vient de subir la cohabitation avec Mitterrand comme président de la République, je suis socialiste, je suis dans le parti de Mitterrand depuis quatorze ans, je le connais donc autrement, et probablement plutôt mieux. Et Chirac me dit quand même: « Méfie-toi de Mitterrand, c’est quand il te sourit qu’il a le poignard le plus près de ton dos. » Michel Rocard confie à Georges-Marc Benamou que ce jour-là, les deux hommes ont «beaucoup ri».

 

Aucune description de photo disponible.

 

Fin juin 2016, dans l’une des dernières interviews de Michel Rocard accordées au «Point», ce dernier explique qu’avec Jacques Chirac, ils avaient en commun «l'humour, le refus de l'arrogance et la simplicité».

 

Leur amitié remonte à Sciences-Po, dont ils fréquentent les bancs au début des années 50. Dans le livre d’entretien «Si la gauche savait», avec Georges-Marc Benamou, paru aux éditions Robert Laffont, Michel Rocard racontait sa rencontre avec celui qui allait devenir président de la République. «Ce Chirac était un jovial, un gars généreux, pas trop compliqué. Il aimait s’amuser. J’avais essayé de lui fourguer la carte des Etudiants socialistes SFIO. Il s’en souvient. Il ne l’a pas prise. (…) C’était vraiment un bon copain. Je me souviens surtout qu’il me bluffait par son aisance et ses manières. J’étais éberlué par son audace auprès des filles.» Le destin politique les fait bifurquer - Michel Rocard à gauche, Jacques Chirac à droite - mais les deux hommes continuent de s’apprécier, bien au-delà des clivages.

 

Michel Rocard aimait à dire en plaisantant qu'il trouvait alors son condisciple « trop à gauche »...

 

Je n’irai pas au-delà de cette évocation, qui va encore mettre un de mes vieux détracteurs en rogne, rien ne me plait plus que ce genre d’atrabilaire hargneux sur lequel je tire la chasse d’eau afin d’expédier ses « commentaires » là ils sont le plus appréciés, pour laisser la parole à Richard Werly le correspondant à Paris du journal Le Temps de Genève.

 

C’est pertinent,

 

Jacques Chirac, la France et nous: les leçons d’un hommage

 

Alors que la célébration officielle à la mémoire de l’ancien président français Jacques Chirac vient de s’achever à Paris, notre correspondant revient ce qu’il convient d’en retenir.

 

Un hommage et un héritage populaire. Telle est la leçon principale de ces journées d’adieu à Jacques Chirac qui se sont achevées ce lundi, avec la messe officielle en l’église Saint-Sulpice, puis l’inhumation de l’ancien président français aux côtés de sa fille à Paris, au cimetière Montparnasse.

 

La «monarchie républicaine» est souvent évoquée pour résumer le rapport si particulier des Français avec leurs présidents. Là, ce parallèle est justifié. Comment expliquer autrement les 7000 personnes qui attendirent, dimanche, entre trois et quatre heures pour se présenter, quelques minutes durant, devant le cercueil de Jacques Chirac placé sous un drapeau bleu blanc rouge, et surplombé d’une photo le montrant saluant de la main le public, lors de l’élection présidentielle de 2002? Le lien entre Chirac et son peuple, que son successeur Nicolas Sarkozy surnomma en 2009 «le roi fainéant» était au fond celui d’un «bon monarque», soucieux des gens, proche d’eux, n’hésitant pas à leur rendre service. L’homme d’une dynastie aussi: celle du gaullisme dans lequel il se drapa longtemps, et au nom duquel il créa en 1976 son Rassemblement pour la République (RPR) dernier grand parti de droite populaire en France.

 

Président des «Trente glorieuses»

 

La seconde leçon porte sur l’époque qu’incarnait Jacques Chirac. On l’a beaucoup écrit, mais il est impossible de dissocier cet héritage politique français d’une séquence historique bien précise qui s’est achevée, en gros, au début des années 2000. Chirac est, avec François Mitterrand, un pur président de l’après-guerre et des «Trente glorieuses», ces années de prospérité dont les Français se souviennent avec émotion. On voit là combien l’élection de Valéry Giscard d’Estaing fut, en réalité, une incongruité en 1974. Giscard voulait moderniser la France. Chirac et Mitterrand ont présidé, les yeux dans un miroir.

 

Pour Mitterrand, le miroir des années sombres de la guerre.

 

Pour Chirac, le miroir des années cinquante, de la guerre d’Algérie et d’une France au bord de la guerre civile. Or de nombreux Français regrettent à la fois cette époque et cette manière de gouverner.

 

Il a beaucoup trahi. Il fut libéral, puis élu sur la fracture sociale. Il parlait au peuple mais soignait ses amis milliardaires.

 

La France, alors, était une puissance. La France dominait l’Europe. La mondialisation était timide. Le rêve demeurait national. Et qu’importent les coulisses sombres de ce pouvoir. Les affaires. Le financement occulte de la vie politique. L’utilisation éhontée des réseaux africains. S’y ajoute, dans le cas de Jacques Chirac, son talent pour la politique à l’ancienne des petits gestes, des interventions personnelles, des renvois d’ascenseurs… Avec lui, les Français avaient l’impression que l’Etat était encore à leur service. Non le contraire…

 

«Mi-politicien, mi-soldat électoral»

 

Dernière impression à l’issue de ces journées de deuil: la stature. Les Français veulent un président doté d’une stature. C’est d’ailleurs ce qui a sauvé Emmanuel Macron, au plus fort de la crise des «gilets jaunes». Un Chef de l’Etat reconnaissable, qui en «impose». Chirac était cela. Avec ce qu’il faut de grivoiserie dans son tempérament pour apparaître comme le parfait président «gaulois»: amateur de bonne chère, de femmes et longtemps fumeur invétéré de «Gitanes». Mitterrand était le sphinx Français. Chirac était un cavalier, mi-politicien, mi-soldat électoral. Il parvient même, sacrée prouesse, à faire oublier qu’il vécut tout le temps à Paris, dans les palais de la République ou dans de luxueux appartements plus ou moins prêtés par des amis, bien qu’étant député de la Corrèze. Mais ce côté caméléon, plein de contradictions, plaît en France s’il ne nuit pas à la stature. Chirac pouvait dire, politiquement tout et son contraire. Il a beaucoup trahi. Il fut libéral, puis élu sur la fracture sociale. Il parlait au peuple mais soignait ses amis milliardaires…

 

Qu’importe: il représentait bien la France, maniant la puissance (les reprises des essais nucléaires en 1995, l’ordre donné aux Casques bleus français de reprendre le pont de Vrbanja en Serbie cette même année), la connaissance (sa compétence en arts premiers, son goût de la poésie chinoise, son musée du quai Branly) et les réseaux internationaux (combien de Chefs d’Etat ou de gouvernement rencontrés en un demi-siècle?). Son public conservateur, enfin, lui savait gré d’avoir envers et contre tout tenu à sa famille. Son épouse Bernadette en pilier. Sa fille Claude en guerrière à ses côtés. Sa première fille Laurence, malade, en douleur lancinante, en plaie jamais refermée. La force du président Chirac, dont le bilan en termes de réformes fut maigre et discuté, est d’abord d’avoir vaincu la malédiction de l’Elysée en restant, dans ce palais fermé à huis clos, un homme supposé accessible, sur le tard atteint par la maladie.

 

Séduction, audace, goût mêlé pour les combines et les idéaux dans le sillage de la figure tutélaire de Charles de Gaulle: Jacques Chirac incarnait les contradictions d’une France qui, aujourd’hui encore, hésite à tourner la page de cette époque présumée révolue.

François Bazin: «Chirac est à la politique ce que Johnny est à la musique»
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commentaires

A
Pascal Ratineau publie dans son éditorial du jour ( Le Populaire du centre)<br /> <br /> https://www.lepopulaire.fr/paris-75000/actualites/la-correze-savait_13651335/<br /> <br /> " Un beau matin donc, un élu d'une petite commune de la Corrèze appelle le « Grand » à Paris. Il a besoin d'une faveur personnelle, pour son fils. Après les salutations d'usage, il expose le problème. En moins de cinq minutes, Chirac lui répond : « Considère que c'est réglé ». Mais avant de raccrocher, il lui demande : « Pourquoi tu n'as pas appelé le préfet ? ». Réponse de l'élu : « Je n'ai pas osé le déranger »… "<br /> <br /> Les plaçous, il connaissait !
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