Je devrais écrire étiez-vous puisque Pierre Péan vient de nous quitter à l’âge de 81 ans.
Il est mort « des suites d’une maladie » à l’hôpital d’Argenteuil, dans le Val-d’Oise, a précisé vendredi son fils, l’écrivain Jean Grégor, avec qui il avait rédigé son dernier livre, Comme ils vivaient, une enquête sur le génocide méconnu des juifs de Lituanie parue l’an dernier au Seuil.
La question lui avait été posé par Le Figaro 28/03/2014 titré « Le journalisme d'investigation n'existe pas ! » ICI
« Ça fait des années que je m'évertue à répéter que je ne me reconnais pas sous le vocable de «journaliste d'investigation». «Investigation», c'est la traduction d'une expression américaine policière. Je préfère le mot «enquête». Je me définirai plutôt comme un «enquêteur d'initiative sur sujets sensibles». Attendre sur son bureau les PV des juges, ce n'est pas ce que j'appelle de l'enquête, mais de la simple gestion de fuites. Le journaliste devient un pion, rentrant dans les objectifs des uns et des autres, devenant l'outil de vengeances ou de stratégies judiciaires. Je revendique de prendre l'initiative, je ne suis pas un auxiliaire de justice, je n'ai pas besoin de la justice pour déterminer le sujet de mes enquêtes. »
Le Monde autrefois journal de référence titre tout de même Mort de Pierre Péan, écrivain et journaliste d’investigation
Deux livres de lui m’ont marqué :
En 1994 il écrit Une jeunesse française : François Mitterrand 1934-1947, dans lequel le président socialiste s’explique pour la première fois sur son appartenance à la droite pétainiste qui allait engager la France dans la collaboration avec l’occupant nazi, avant son action dans la Résistance.
La face cachée du Monde en 2003, avec Philippe Cohen où le père Plenel est montré sous vrai visage.
Je partage sans réserve son point de vue sur le journalisme dit d’investigation.
Dans ma vie sous les ors de la République, du vécu :
- Lorsque nous avions besoin de renseignements sur certaines personnes, soit des solliciteurs, soit des investisseurs, soit des gens qui nous voulaient du bien nous sollicitions les RG. Lire une note des RG sur une personne valait son pesant de presse people, rien ne manquait, le ou les noms des maîtresses, la fréquentation assidue de certains lieux, tout y passait.
- Comme nous étions partie prenante aux négociations du GATT suite à l’ouverture de l’Uruguay Round je recevais chaque mois je recevais le directeur de la DGSE pour faire le point sur les coups tordus de nos amis américains. L’ambassade US à Paris grouillait de conseillers du genre espions de romans, et les honorables correspondants nous étaient signalés.
- Chaque directeur de cabinet avait un correspondant au Canard Enchaîné, nous recevions le Canard la veille de sa parution, et mon correspondant me signalait éventuellement ce qui serait publié de gênant. Un coup de fil par semaine et une bouffe annuelle payée par le correspondant du Canard.
- Enfin, je suis allé témoigner en Corse auprès du juge Duchaine à Bastia dans le cadre de l’enquête sur les pratiques du Crédit Agricole de l’île. Par quelle opération d’investigation le Monde de l’époque a-t-il publié une double page de mon témoignage ?
Le flux des infos dans presque 100% des cas va de la gorge profonde vers le journaliste, nous faire accroire que celui-ci l’a débusqué après de longues investigations est une plaisanterie de garçon de bains qui ne ferait même pas rire l’ombrageux Eddy.
La protection des sources, normale, sert à cacher une réalité pas forcément très reluisante, niveau basse police, délation, manipulation, vengeance…
Je n’ai rien ni pour ni contre Médiapart, qu’ils lèvent des affaires tant mieux mais qu’ils n’en rajoutent pas dans l’extrême difficulté de leur métier, c’est du pipeau.
Les fameuses sources sont très largement policières, parfois judiciaires, un bon carnet d’adresses, et comme la hiérarchie policière est très politisée ça ouvre la voie à des coups fourrés de la part de ceux qui font de la basse police.
De plus les moyens modernes smartphones, réseaux sociaux fluidifient la remontée de l’info dans l’escarcelle des limiers autoproclamés de la presse d’investigation.
Jean-Marc Berlière : " La police crève du politique "
A l'origine. L'historien Jean-Marc Berlière explique pourquoi la police politique est un mal français. Propos recueillis par François-Guillaume Lorrain
Publié le 19/01/2012 à 00:00 | Le Point c’est sous Sarkozy ICI
EXTRAIT du journal Le Monde du jeudi 24 octobre 2002 : Pierre Joxe a témoigné devant le juge en juin.
Ministre de l'intérieur de mai 1988 à janvier 1991, Pierre Joxe, aujourd'hui membre du Conseil Constitutionnel, a été interrogé le 28 juin en qualité de témoin * par le juge Duchaine. " Comment expliquez-vous sue l'Etat ait pu consacrer plus de 440 millions de francs à la mesure[Nallet], alors que l'enveloppe prévue était de 185 millions ?" lui a demandé le magistrat." Les dépassements de crédits sont fréquents, a répondu M.Joxe. Ils sont votés annuellement, ils peuvent être reconduits d'année en année ou augmentés par décision budgétaires ou par transfert interne." Questionné sur le témoignage du directeur de cabinet au ministère de l'agriculture à cette époque, Jacques Berthomeau, pour qui le dossier avait été "piloté par Matignon(...) et copiloté par Pierre Joxe", il indiqué : " C'est exact que j'ai copiloté ce dossier, puisque, même si Rocard s'y intéressait beaucoup, il m'a délégué et soutenu dans l'élaboration du statut pour la Corse. M.Berthomeau, qui avait déclaré qu'il voyait " mal un préfet aller chercher ses ordres ailleurs qu'auprès de M.Joxe", s'est attiré cette réplique : " Si Berthomeau voit mal, je n'y peux rien."