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26 mai 2019 7 26 /05 /mai /2019 07:00
«Dans la solitude des champs de coton» le chef-d’œuvre de Bernard-Marie Koltès, Grande Halle de la Villette, Mata Gabin Charles Berling…

C’est ainsi, à chaque fois que je me retrouve face à la Grande Halle de la Villette, je pense à l’impéritie des Ingénieurs du Génie Rural et aux politiques qui n’ont rien compris à l’évolution de l’abattage des animaux en érigeant une cathédrale de béton à la Villette.

 

 

Le chantier est arrêté en 1971. L’ensemble des activités du site sera supprimé trois ans plus tard. Excepté la Grande halle de la Villette et quelques autres éléments comme la fontaine aux Lions de Nubie, la totalité des bâtiments est démoli. (Voir plus bas)

 

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Ce jeudi soir, l’air est doux même si nous sommes bien loin d’un beau mois de mai ; les gens baguenaudent au flanc de la Grande Halle, souriants, détendus, les gens qui vont au théâtre, qui plus est voir Dans la solitude des champs de coton, portent en eux des trésors en voie d’extinction.

 

Dans la solitude des champs de coton n’est composé que d’une seule scène dans laquelle on assiste à la rencontre et à la discussion que vont avoir les deux personnages de la pièce : Le Dealer et Le Client. L’action se situe dans un lieu désert et indéterminé à une heure elle aussi indéterminée de la nuit. Les deux protagonistes dialoguent par le biais de longues tirades, sauf à la fin où le dialogue s’accélère.

 

À noter que Patrice CHEREAU a mis en scène cette pièce trois fois. D’abord au Théâtre des Amandiers à Nanterre en 1987 avec Laurent MALET (le client) et Isaac DE BANKOLE (le dealer). Puis en 1990 il reprend lui-même le rôle du dealer, et enfin en 1995 où Pascal GREGGORY prend le rôle du client (Molière de meilleure mise en scène en 1996).

 

La salle est pleine, nous sommes bien placés.

 

 

« Dans un décor monumental où les lumières jouent avec les ombres, le dealer est une femme androgyne qui se fond dans les ténèbres et l’acheteur un homme blanc en costume de ville. Dans une danse bestiale faite d’avancées, de frôlements, de reculades, de chuchotements, de cris, de défis, de replis, ces deux- là ne peuvent tout simplement pas s’éviter. Ni se confondre. Un affrontement sado-maso poétique, tout en rudesse et fragilité. »

 

« Aussi belle que complexe, la langue de Bernard-Marie Koltès est piégeuse pour quiconque veut se l'approprier. Sans pour autant en briser le mystère et en purger la poétique, Berling parvient à la rendre limpide. Le joli duo qu'il forme avec Mata Gabin confère à ce texte difficile une clarté nouvelle et met l'excellence du dramaturge français à la portée de tous.

 

Plutôt que deux monologues qui se répondraient en écho, Berling transforme l'échange entre le dealer et son client en un véritable dialogue. Se succédant à un rythme effréné dans les positions de dominant et de dominé, ils se lancent dans une joute verbale où l'attraction et la répulsion s'entremêlent jusqu'à conduire à un inévitable conflit. 

 

 

De prime abord surprenant- les deux protagonistes étant habituellement le miroir l'un de l'autre -, le choix d'un duo masculin-féminin se révèle pertinent. Quand Mata Gabin exhibe toute sa force oratoire, Charles Berling la joue plus en finesse, inversant par là même les attributs traditionnels des deux genres.»

 

Un tout petit peu plus d’une heure d’un grand bonheur, transporté, accroché par cette lutte de mots, extirpé du quotidien, tiré vers le haut, touché au plus profond, au cœur, à la tête, loin du  réalisme cru je me laisse prendre par la poétique du texte puissant, violent, organique, orgasmique… Je partage cette fusion…

 

Ne me traitez pas d’intello sinon je vais me fâcher tout rouge

 

Que se disent ces deux-là ?

 

« Des choses à la fois les plus banales et les plus belles qu’il soit, dans la langue élaborée et cadencée de l’auteur, à savoir que l’on peut tout autant s’aimer que se haïr, selon les circonstances, l’heure ou l’endroit. Seul, le désir qui a force de loi existentielle mène la danse et conduit les êtres vers leur destin. »

 

« Alors ne me refusez pas de me dire l’objet, je vous en prie, de votre fièvre, de votre regard sur moi, la raison, de me la dire ;  et s’il s’agit de ne point blesser votre dignité, eh bien, dites-la comme on la dit à un arbre, ou face au mur d’une prison, ou dans la solitude d’un champ de coton dans lequel on se promène, nu, la nuit ; de me la dire sans même me regarder », invoque patiemment le dealer.

 

« Le Dealer

 

[…] Deux hommes qui se croisent n’ont pas d’autre choix que de se frapper, avec la violence de l’ennemi ou la douceur de la fraternité. […] ».

 

« Le Dealer

[…] parce qu’on n’inflige que les souffrances que l’on peut soi-même supporter, et que l’on ne craint que les souffrances qu’on n'est pas soi-même capable d’infliger. […] ».

 

Fin

 

« Un deal est une transaction commerciale portant sur des valeurs prohibées ou strictement contrôlées, et qui se conclut, dans des espaces neutres, indéfinis, et non prévus à cet usage, entre pourvoyeurs et quémandeurs, par entente tacite, signes conventionnels ou conversation à double sens - dans le but de contourner les risques de trahison et d’escroquerie qu’une telle opération implique - , à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, indépendamment des heures d’ouverture réglementaires des lieux de commerce homologués, mais plutôt aux heures de fermeture de ceux-ci. ».

 

Applaudissements !

 

Les saluts rituels.

 

Les habituels pressés sortent alors que les applaudissements crépitent, quel manque de respect pour les acteurs, même s’ils n’ont pas aimé ces grossiers pourraient rester quelques minutes de plus le cul visser à leur fauteuil sans applaudir. Sans doute leur estomac prime sur leur savoir-vivre.

 

Merci Mata Gabin Charles Berling…

 

 

Bernard-Marie KOLTES (1948/1989) est un dramaturge français. Il fait des études de scénographie au Théâtre National de Strasbourg. Il effectue aussi de nombreux voyages notamment en Amérique du Sud, en Afrique et à New York qui vont être une grande source d’inspiration dans l’écriture de ses œuvres.

 

En 1977, il écrit et met en scène La nuit juste avant les forêts qui sera présentée au Festival Off d’Avignon la même année avec Yves FERRY dans l’unique rôle de la pièce. Il s’agit d’un long monologue, d’une seule phrase, adressé à un personnage muet. C’est son premier succès en France et en Europe.

 

En 1979 il écrit Combat de nègre et de chiens, mis en scène en 1983 par Patrice CHEREAU qui deviendra son metteur en scène quasi attitré. Le succès est mondial. Il collabore à nouveau avec Patrice CHEREAU en 1985 pour Quai Ouest et Dans la solitude des champs de coton.

 

En 1988, il écrit Roberto Zucco qui reste aujourd’hui sa pièce la plus jouée de par le monde.

 

Il meurt en 1989 du virus du Sida.

 

 

Devenus symboles de gaspillage, les abattoirs de la Villette ferment leurs portes le 15 mars 1974.

 

Ils ont été construits par Baltard à l’époque de Napoléon III. En 1959, on décide de les reconstruire. Le but ? Installer un marché d’intérêt national de la viande. Mais rien ne se déroulera comme prévu. En 1961, les travaux commencent. Mais le chantier prend du retard et ce n’est que trois ans plus tard, en 1964, qu’est achevé le bâtiment de stabulation et en 1967 que se finit la construction du bâtiment des abattages, prévu pour produire 450.000 tonnes de viande.

 

Entre-temps, les coûts s’envolent et, surtout, avec le développement du transport frigorifique, l’abattage sur les lieux d’élevage est devenu beaucoup plus rationnel… Le chantier est arrêté en 1971. L’ensemble des activités du site sera supprimé trois ans plus tard.

 

Excepté la Grande halle de la Villette et quelques autres éléments comme la fontaine aux Lions de Nubie, la totalité des bâtiments est démoli. Aujourd’hui, cet espace de 55 hectares situé entre deux portes de Paris est occupé par des lieux d’études, loisirs et distractions, comme le Parc de la Villette, la Cité de la musique, la Cité des sciences et de l’industrie et le Zénith.

 

 

M. Pierre Marcilhacy : Monsieur le président, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, je voudrais qu’il fût bien entendu que c’est le sénateur qui prend la parole et non l’ancien président de la commission d’enquête sur l’affaire de La Villette, qui a fini de remplir sa mission le jour où, le 24 avril 1971, le rapport a été publié à la suite d’un vote du Sénat.


Qui est responsable de ces décisions successives ?

 

A l’origine le conseil de Paris, décision qu’on ne discute pas, veut moderniser les abattoirs de La Villette. Il décide de maintenir La Villette. C’est peut-être une erreur ; cela ne me regarde pas. Le Gouvernement y raccroche le marché d’intérêt national. Attention ! Il s’agit bien là d’une décision gouvernementale. Un marché d’intérêt national, c’est très grave, parce que, pour qu’un tel marché fonctionne, il faut lui donner les moyens de s’approvisionner. Il faut donc prendre en même temps les mesures qui doivent lui permettre de tourner. En effet, on ne demande pas aux abattoirs de gagner de l’argent, mais de tourner. Ce qui est effrayant, c’est qu’on a construit un outil qui ne pourra jamais servir. Ce n’est pas parce qu’on abat quelques tonnes de viande que l’affaire marche. Ce n’est pas vrai. C’est une absurdité.

 

Tout le processus est décrit dans le rapport et comme le ministre de tutelle est celui de l’agriculture, je suis obligé de dire que la responsabilité politique incombe au ministre de l’agriculture de l’époque. Cependant, je dois reconnaître que, dans la dernière période, sa responsabilité est diminuée puisqu’il est arrivé en prenant le train en marche et qu’il a souvent essayé de l’arrêter. Je trouve, sauf erreur, les noms de MM. Pisani, Edgar Faure, Boulin, Duhamel et Cointat. Je ne peux pas raisonner autrement et, si je suis obligé de vous donner ces noms, monsieur le secrétaire d’État, c’est parce que vous allez être amené, je l’espère, à sanctionner ces fautes administratives.

 

Or, quelle peut-être la position de ces administrateurs — le reste, je ne veux pas le savoir — maladroits, incompétents ou négligents ? Ils pourront dire : « Nous n’avons fait qu’exécuter une décision politique qui venait de très au-dessus de nous. Nous n’avions qu’à claquer des talons et à passer à l’exécution. Si vous dites que le projet a échoué et que nous avons dilapidé 100 milliards d’anciens francs, prenez-vous en à d’autres qu’à nous. » Et ils auront raison ! Cette affaire met en cause toute une série de procédés qui interviennent dans la gestion des affaires de l’État.


 

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commentaires

P
Allons allons Taulier, on en peut traiter d'intello quelqu'un qui parle avec ses tripes du bonheur ressenti et du plaisir pris à un spectacle. Dommage car j'aurai aimé voir la couleur rouge de la fâcherie . Rouge sang comme celui des abattoirs de La Villette ?<br /> "La Villette story" est une des spécialités de nos zélithes , comme la cession des autoroutes, l'écotaxe , la vente de l'aéroport de Toulouse, la fraude à la Tva sur le marché du carbone, Super Phénix, etc. etc. Chacun complètera la liste à sa manière. Rien de grave dans tout cela. Certes, une fois de plus se sont trompés mais l'essentiel n'est il pas qu'il se soient trompés dans les règles ?
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