Par ces temps d’inepties, entre les gilets jaunes à casquettes et les politiques qui ne savent plus où ils habitent, où le moi je des réseaux sociaux propulse des va de la gueule sur le devant de la scène, il est bon de prendre le temps d’écouter un bardé de diplômes (Normale Sup ULM (Maths), ENSAE, Docteur en Mathématiques appliquées, Ancien Quant chez CPR et CALYON, Jésuite, Chef Economiste de l'AFD (Agence Française de Développement), qui n’étale pas sa science de sachant, qui s’efforce d’expliquer.
Un jeune et tout nouveau jésuite…
Dans ma Vendée crottée j’ai découvert les Jésuites, grâce à mes très chers frères du bienheureux Grignon de Montfort, au travers de la pièce « Das Heilige Experiment » de 1942 (Sur la Terre comme au Ciel en français), écrite en cinq Actes par M. Fritz Hochwälder(1911-1986) traite de la fin des Missions Jésuites du Paraguay au XVIIIème siècle.
Elle a connu par le passé de légitimes succès au théâtre et a grandement inspiré le scénario du film de Roland Joffé « Missions » (Palme d’Or au festival de Cannes en 1986, César du meilleur film étranger en 1987; avec Robert De Niro, Jeremy Irons, Liam Neeson projeté dans les salles obscures en 1986 pour un succès tout aussi important.
« An de grâce 1767 – Un émissaire du roi d’Espagne arrive au sein du Collège jésuite d’Asunción implanté au Paraguay. La confrérie ignacienne qui y réside depuis le début du XVIIe siècle a fait preuve d’une telle efficacité dans sa mission qu’elle y a constitué un véritable état théocratique: une centaine de pères jésuites règnent spirituellement et matériellement sur cent cinquante mille indiens guaranis!
Les guaranis ont été évangélisés pacifiquement et sédentarisés dans des Réductions si bien organisées que ces dernières s’autogèrent en pratiquant la culture du thé et son exportation. Une telle réussite déplait naturellement aux colons espagnols qui accusent les clercs de concurrencer leur commerce et d’exploiter de façon illicite des mines d’argent sans en faire profiter la couronne d’Espagne…
Un jugement est donc réclamé auquel prennent part le Père Provincial, les colons ainsi que Don Pedro de Miura, l’envoyé du roi. Malgré le manque de preuves, ce dernier décide de dissoudre définitivement la Compagnie de Jésus : les pères sont expulsés du Paraguay, les Réductions saisies et les indiens misérablement réduits à l’esclavage. Tous les chefs d’accusation sont, bien sûr, injustifiés mais il est de notoriété publique qu’en ce bas-monde l’on ne contrarie pas inopinément les puissants, qu’ils soient temporels ou spirituels : les Grands d’Espagne ne peuvent tolérer la souveraineté de cette « expérience jésuite civilisatrice », quant à Rome, l’autorité papale ne conçoit pas qu’un ordre puisse avoir l’audace d’offrir le bonheur terrestre à ses fidèles: cette mission n’appartient qu’a Dieu en son paradis céleste!
Face à une telle incohérence, le Père Provincial se retrouve pris en étau: doit-il se rebeller ou doublement se soumettre au vœu d’obéissance qui lie son ordre au pape et sa personne au roi ? S’il refuse d’obéir à ses supérieurs, cet homme trahit sa foi et sa couronne ; s’il admet ses fautes et laisse les Guaranis aux mains des négriers, il abandonne ses ouailles et récuse toutes les valeurs chrétiennes qui l’ont amené à créer cet incroyable Royaume de Dieu.
Cette évocation n’est pas de ma part innocente, Gaël Giraud, lui aussi est pris en tenaille, ce qui n’enlève en rien de la pertinence à ses propos.
« Gaël Giraud possède deux vestes bleu marine strictement identiques. À un détail près. Sur l’une d’entre elles est épinglée, discrète mais bien visible, une petite croix argentée. L’une est celle du jeune prêtre ordonné il y a moins d’un an, la seconde, celle du chercheur.
Alors qu’il s’apprête à se plier à l’exercice imposé de la photographie de presse, le jeune jésuite demande : « C’est pour qui, déjà ? Ah, La Croix ? Attendez, je vais enfiler l’autre. » Tout Gaël Giraud est là. Dans ce balancement entre deux mondes, a priori inconciliables. D’un côté, l’univers de la finance, des marchés, de la politique et de l’université. Il est, dit-on, la bête noire des banquiers. ».
G. Giraud s’accommode fort bien de ce double visage des plus inattendus et P. Gaillardin le note si joliment que je ne résiste pas au plaisir de citer son propos: « Considéré comme l’un des économistes les plus doués de sa génération, le jeune prêtre est passé par les bidonvilles du Tchad et les salles de marché new-yorkaises, avant de rejoindre les Jésuites. […]
Je vous invite donc à l’écouter, ça dure 1 heure 36
D'abord un tsunami financier, puis un désastre humanitaire ?
« L'entretien réalisé par Thinkerview deviendra bientôt un in-con-tour-na-ble :
« Tout honnête homme du XXIème siècle devrait l'avoir visionné, sauf s'il a déjà lu les principaux livres de Gaël GIRAUD.
En effet, en moins d'une heure trente, Gaël GIRAUD résume le contenu principal de ses (brillantes) thèses, qui réconcilient, selon le modèle qu'il préconise, l'activité bancaire (telle qu'elle devrait fonctionner à ses yeux), la finance et le rôle des Banques centrales (tels qu'ils devraient être régulés selon lui), et l'organisation d'un développement durable, respectueux de la Planète et de l'Humanité.
Un entretien à visionner en famille, un samedi ou un dimanche, en projetant l'entretien sur grand écran, par exemple à la place du film du dimanche soir, ou à la place d'une demi-journée de grève au lycée pour les adolescents, qui en apprendront beaucoup plus en revisionnant plusieurs fois cet entretien très dense que dans la cour de récré en répétant : "yaka, faucon, suffideux". »
Entretien avec l’économiste en chef de l’Agence française de développement, qui s’alarme de la distance croissante entre riches et pauvres.