Terroir : mot magique, une exclusivité française, très prisée dans le monde du vin, de plus en plus mis à toutes les sauces pour estampiller son produit du sceau de l’authenticité.
Dans la Croix Vincent Moriniaux, géographe (Université Paris-Sorbonne) revient sur ce concept de terroir, très français. Longtemps influencé par la seule viticulture, il évoque l’alliance des hommes et de la terre, une alchimie de l’ordre du mystère.
Selon la définition « officielle » établie en 1995, le terroir est « un système d’interactions entre le milieu naturel et les facteurs humains »
Terroir. Derrière ce mot en apparence modeste, tiré de « terre », comme son cousin le « terrain », et apparu dans notre langue au XIIe siècle selon le Littré, se cache un concept unique en son genre et très français. Il n’a aucun équivalent dans aucune autre langue. Nos amis anglais, espagnols ou allemands utilisent, en ouvrant grand la bouche sur le oi, notre mot. Les Italiens, pourtant nos frères dans leur attachement à la gastronomie et aux prodotti tipici, parlent de territorio, le territoire. Le terruño espagnol, qui pourrait sembler approchant, désigne le terrain.Quelle est donc cette notion si particulière que beaucoup de nos voisins d’Europe et d’ailleurs nous envient ?
J’ai osé écrire dans une récente chronique sur le vin nature et ses détracteurs :
« Quand à ce pauvre terroir, invoqué, jamais défini, leurre absolu »...
Un vigneron m'a répondu : c'est très discutable, à la limite de la fausse information.
Et me voilà taxé de fabriquer une fake news comme on dit de nos jours.
Je conviens que ma formulation était un peu abrupte, donc discutable, mais si je veux bien la tempérer je demande qu’on me définisse très précisément ce qu’est le terroir.
Pas du blablabla de cul de bouteille pour faire joli, séduire l’acheteur, une vraie définition applicable dans tous les cas de figure, de Dunkerque à Tamanrasset, façon de parler comme le grand Charles. (Allocution du général de Gaulle du 16 septembre 1959 en faveur de l'autodétermination de l’Algérie)
Pour vous aider voici les définitions du CNRTL
TERROIR, subst. masc.
A. − Étendue de terre exploitée.
1. Rare. Domaine, territoire.
« Donc, en ces temps damnés, une très noble dame Vivait en son terroir, près la cité de Meaux (Leconte de Lisle, Poèmes barb., 1878, p. 281).
« Les souilles ne sont pas les mêmes l'été et l'hiver, ce sont là choses bien connues sur tout terroir de chasse » (Vidron, Chasse, 1945, p. 93).
2. Ensemble de terres exploitées diversement par une collectivité rurale. Terroir communal.
« S'il s'agissait d'histoire, on commencerait à l'instruire [l'enfant] de celle de son village et des hameaux avec lesquels il fait terroir; du canton où il ira les jours de foire (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 175).
« Je voudrais (...) entrer dans l'âme de ce sauvage que nous étions, il y a si peu de temps encore, deux mille ans (...), quand il fondait l'un des plus vieux terroirs du monde (...), défrichait la forêt, étendait la clairière, bâtissait les chemins, créait la campagne » (Guéhenno, Journal « Révol. », 1937, p. 83).
3. Étendue de terre présentant une certaine homogénéité physique, originelle ou liée à des techniques culturales (drainage, irrigation, terrasses), apte à fournir certains produits agricoles. Terroir de vallée, de versant; terroir de graviers, de tuf, de sable; terroir à céréales; terroir fertile, maigre, pauvre; bon terroir; le terroir de Champagne, de la Beauce; fruits, produits du terroir.
« Ce terroir opulent qui s'étend de Nérac à Villeneuve, d'Agen à Marmande (...), pays de produits de luxe, et d'où l'on descend vers le fleuve aux larges eaux, la Garonne » (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 165).
− En particulier. Ces terres considérées du point de vue de la nature du sol qui communique un caractère particulier aux productions, notamment au vin.
« Cette nature de terroir explique le goût particulier du vin de Soulanges, vin blanc, sec, liquoreux, presque semblable à du vin de Madère (Balzac, Paysans, 1850, p. 300).
« Le kilogramme de raisins noirs d'Ay, fixé à 1 fr. 25 (...), M. Dumesnil acheta au même taux dans les grands terroirs: Cramant, Avize, Verzenay, pour descendre à (...) cinquante centimes dans les petits vignobles » (Hamp, Champagne, 1909, p. 133).
♦ Sentir le terroir, avoir la saveur, le goût du terroir. Avoir le goût particulier dû à la nature du sol.
« Le jeune homme (...) goûte ce pain et ce vin qui ont la saveur de leur terroir » (Pesquidoux, Chez nous, 1921, p. 66).
♦ Vin de terroir. Vin dont le goût particulier tient à la nature du sol.
« Nous ferons notre dîner de ces fruits des Hespérides, avec un vin de terroir qui magnifie le goût des pêches » (T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p. 245)
Une définition parmi d’autres concernant le vin (elle bien longue et contient un biais)
Le terroir est composé de l’ensemble des facteurs de l’écosystème de la vigne : sol, sous-sol, climat et topographie.
Les éléments essentiels du terroir
- Le sol
Le sol doit être pauvre mais équilibré. Les racines de la vigne puisent l’eau et les éléments nutritifs dans le sol, la nature de ce dernier et les oligo-éléments qu’il contient ainsi que sa régulation hydrique participent donc au goût du vin.
- Le climat
Le climat conditionne la croissance et la maturation du raisin. Tous ses composants font donc partie de l’élaboration du terroir : pluviométrie, vents, ensoleillement et températures.
La clef d’un terroir, c’est son bilan hydrique, généralement déficitaire ou faiblement positif.
- La topographie
Les sols de coteau sont, en règle générale, plus pauvres que les sols de plaine, la vigne y est donc moins vigoureuse, le rendement plus faible, mais de plus grande qualité.
- Le vigneron
L’intervention du vigneron joue également un rôle important puisque c’est lui qui détermine le choix des parcelles cultivées, prend soin du sol, choisit la meilleure période pour les vendanges.
Les types de sols
Le type de sol semble induire des caractéristiques :
- les sols siliceux favorisent la finesse, les notes subtiles et florales;
- l’argile donne des vins plus ‘durs’, plus fermes, puissants et alcoolisés, des polyphénols aromatiques;
- le calcaire induit la rondeur, la souplesse, des notes minérales, florales et fruitées.
Adéquation terroir et cépage
Le Gamay donne des résultats décevants en Côte d’Or, et de remarquables réussites sur les schistes du Beaujolais. Morgon et ses ‘roches pourries’ (schistes fortement dégradés) produit un vin corsé, ferme avec un nez typique de kirsch… Le même gamay sur les granites de Chiroubles est floral et délicat…
La viticulture du nouveau monde privilégie le cépage et la technologie. La vieille Europe s’appuie sur une viticulture de terroirs : à quelques mètres de distance, le Pinot Noir de Bourgogne peut produire ici un vin ordinaire et là un vin sublime…
Le terroir est parfois tyrannique : des viticulteurs de la vallée du Douro prétendent qu’avec n’importe quel cépage, ils feraient du Porto : le sol dicte sa loi !
Définition du terroir par l'INAO :
Le terroir est un espace géographique délimité, dans lequel une communauté humaine, construit au cours de son histoire un savoir collectif de production, fondé sur un système d’interactions entre un milieu physique et biologique, et un ensemble de facteurs humains. Les itinéraires socio-techniques ainsi mis en jeu, révèlent une originalité, confèrent une typicité et aboutissent à une réputation, pour un bien originaire de cet espace géographique.
Voilà c’est dit, pendant le Réveillon du Nouvel An, plutôt que de vous empailler à propos des gilets jaunes essayez donc de répondre à ma question en étant concis.